L'HOMME
Le triangle nature/machine/homme
La seule manière aujourd'hui, pour l'humanité, de prévoir son avenir, c'est de se regarder dans la glace. Le paradoxe majeur de l'explosion technologique, de la multiplication des machines, de leur dissémination, de leur autonomisation, de leur complexification, c'est qu'elles nous ramènent à nous-mêmes.
(*92. Je commence à êter moins sûr. Il faut peut-être dépasser totalement, admettre que la machine nous dépasse. Mais alors pouvons nous la penser?
Notable qu'en quittant la foi, je pose plus nettement cette question d'un dépassement de l'homme. L'histoir chrétienne du salut n'est plus aussi intellectuellement structurante pour moi...)
Tout me conduit à cette conclusion qui n'est qu'un point de départ. Et pourtant tout tend aussi à en écarter, ce qui expliquer l'obstination qu'il m'a fallu pour y parvenir.
Tout y conduit, mais ces raisons même ont tout pour faire diverger le regard.
X.1 La plus remarque machine informationnelle de l'univers
Toute la cosmogénèse peut s'intepréter comme la montée vers le plus grand cerveau. Oui, mais justement
:
- l'anthropomorphisme est dangereux et même trompeur, de même que ce n'est pas en imitant le battement des ailes des oiseaux que l'on est parvenu à voler (on en a cependant imité au moins la force globale, pendant que ballons et dirigeables gagnaient doucement les galeries de l'Histoire);
- la naissance et la montée des technologies de l'information, et même de l'intelligence artificielle, ne se font pas dans le sens d'androïdes de plus en plus ressemblants, mais vont vers une panoplie de machines plus inhumaines d'aspect les unes que les autres;
- les technologies modernes de l'information sont basées sur le silicium, notre système nerveux sur la chimie du carbone; il ne faut pas trop espérer la convergence : les technologies très rapides de demain ne font que diverger encore plus !
Je crois pourtant qu'on ne peut échapper à l'anthropomorphisme. A ses formes rustiques, certainement, mais pas à ses grandes impulsions. S'il n'y avait des oiseaux, aurions-nous songé à voler?
Reste à savoir tout de même si nous ne seront pas dépassés par nos productions, machines intelligentes et autres robots. Sur ce thème ressassé par la science-fiction, et bien avant elle par le méthode de Pygmalion et ses innombrables émules (Golem, Frankenstein,...), nul n'a jamais joué aussi fortement qu'Asimov dans "Moi, Robot". A la fin, un robot gestionnaire de l'univers va jusqu'à déclencher de petites crises technico-économiques pour en éviter de plus graves, en vertu du la troisième loi de la robotique asimovienne "un robot ne fera pas de mal à un être humain, ni ne laissera de mal lui advenir".
Si l'avenir est là, la prospective est au bout des robots, au bout des technologies. Mais nous ne pouvons échapper à une alternative fondamentale : asservissement ou dépassement.
Asservissement
Ou bien, c'est l'asservissement, les robots ne convergent pas vers l'humanité, ils prennent le pouvoir et nous détruisent, ou en tous cas nous asservissent. Alors, notre devoir est de nous battre pour les en empêcher. Jusqu'à plus ample informé, cela n'est guère à craindre. Deux scénarios cependant doivent en permanence retenir notre vigilance, car ils sont toujours menaçants, au moins sous des formes partielles.
1. L'asservissement de l'humanité à un homme ou à un petit groupe d'hommes par technologie interposée. Le scénario type est celui de "Un bonheur insoutenable", d'Ira Levine. Mais cela n'est pas tellement nouveau. Le canon et la propagande bien maniée conduisent à des résultats identitques. Il n'est pas évident qu'ordinateurs et robots soient fondamentalement plus dangereux. Du moins est-il sage, et on l'a fait, de mettre en place et de maintenir actives des structures comme la Commission Nationale Informatique et Libertés en France.
2. Par paresse et lâcheté, nous abandonnons aux robots certaines responsabilités que nous nous devons d'assumer. Une telle démission à l'échelle planétaire est-elle possible? Il y a des exemples historiques, et certains peuvent considérer que la bureaucratie soviétique constitue un tel exemple de machine incontrôlée. Mais, bien plus quotidiennement, les exemples de petites démissions abondent : "c'est la faute à l'ordinateur", "c'est le règlement", "j'étais sous l'influence de l'alcool" et enfin, l'excuse traditionnelle "je n'ai fait qu'obéir".
Dépassement
Ou bien, c'est le dépassement. Ce scénario frise l'utopie et le rêve, mais il peut être significatif de certaines orientations futures. Jean-Eric Forge, partant d'un schéma psychologique d'Alain Tournier (dans le Roi des Aulnes), propose l'allégorie suivante: "En l'an 3000 et quelques, l'Humanité avait développé un Grand Ordinateur qui récapitulait tout son savoir, toute son expérience, toute son Histoire. Mais l'Humanité était mortellement menacée par la pollution.
Il y avait une solution: sauver le Grand Ordinateur, en l'envoyant dans l'espace au moyen d'une super-fusée nucléaire. Malheureusement, le supplément de pollution causé par le départ de la fusée serait irrémédiablement fatal à l'Humanité toute entière. On fit un référendum. L'Humanité décida de sauver le Grand Ordinateur, et mourut".
C'est donc l'hypothèse où, par des voies chimiques, biologiques et/ou logicielles, nous parviendrions à créer un surhomme, et où il faudrait choisir entre sa survie et la nôtre. Mais un surhomme ne mériterait un tel sacrifice de la part de l'Humanité que s'il lui était supérieur non seulement en savoir mais en humanité même, non seulement par la tête, mais aussi par le coeur. Alors, ce serait plutôt à lui de choisir, du moins devrait-il participer à la décision.
Et, de Socrate à Jésus aux héros de nos guerres e de nos révolutions, les vrais surhommes choisissent le sacrifice sur l'autel de l'Humanité, si imparfaite soit-elle.
X.2 L'homme recouvre progressivement la planète et l'espace accessible. Il y devient la seule source réelle d'autonomie, d'innovation.
Il s'agit d'une spirale ascendante. Plus nous échappons aux contraintes matérielles, plus notre vie consiste à prendre des décisions, à faire des arbitrages. Ce sont précisément ces décisions qui créent la source indéfinie de l'information nouvelle, et d'autant plus nouvelle que ces décisions seront prises librement et sur la base d'informations détaillées et de qualité.
Cette maîtrise de l'homme est scandaleuse. D'autant que cet homme est toujours l'homme occidental, voire le Japonais quand il enfourche les chevaux de l'Occident.
Comment osons-nous engager le monde dans cette aventure, qui pourtant n'a pas de quoi nous rendre si fiers, après Hitler, Staline, et avant eux l'inquisition, les négriers, le colonialisme et notre quart-monde?
Oser? Mais pouvons-nous faire autrement? Faut-il nous suicider collectivement? Si vous le croyez, ne lisez pas plus loin : allez acheter un revolver ou une bombe atomique et passez aux actes. Vous ne serez pas le premier, rassurez-vous. Ni le dernier, rassurons-nous.
X.3 L'homme est le seul objectif valable
Nous devons tout mettre au service de l'homme, seule finalité valable. Aimer les autres, vouloir leur développement, vouloir communiquer avec eux. Donc notre maîtrise de l'univers est orientée, par devoir autant que par nécessité, vers l'homme. Les plus hautes autorités spirituelles, notamment le pape Jean-Paul II, le répètent en toute occasion.
Mais c'est folie de fonder la prévision sur la morale ! Vous prenez vos désirs pour des réalités.
D'ailleurs l'homme est inhumain, et les bons sentiments n'ont jamais changé grand-chose à l'Histoire.
Eh, justement. La seule réalité de demain, c'est le désir !
X.4 L'humain, ou le paradigme voulu
L'homme est pourtant, plus que jamais, remis en question. Où commence-t-il? Où finit-il? Edgar Morin ne montre-t-il pas que l'idée d'homme est dépassée, qu'il s'agit d'un paradigme perdu?
Au vrai, c'est encore un thème constant de la science fiction : comment savoir ce qui est humain. On se pose la question pour la robotique (Dick, Asimov), aussi bien que les anthropoïdes de la paléontologie (Vercel), sans parler des "petits hommes verts" de tout poil (feuilleton "les envahisseurs", ET, La planète des singes...).
Et la femme, d'ailleurs, est-elle un homme? Et le foetus, quand devient-il homme qu'on ne peut tuer? Et le comateux, et le sidaïque même, et les races inférieures...
On demande alors à la Science de répondre. Racisme, euthanasie, paléo-anthropologie... la Science a beaucoup à dire sur l'homme, mais finalement elle n'en peut tracer les limites. Seul un autre homme, et plutôt une communauté humaine, peut tracer la frontière en reconaissant ou en refusant l'autre.
Du point de vue de l'information, de l'intelligence artificielle, Turing a proposé très tôt un test astucieux, visant à éliminer les facteurs corporels de la reconnaissance. Mais lui-même montre bien que l'intelligence est bien difficile à définir.
Et pourtant, cette sacrée humanité fonctionne. Et pourtant, indéfinissable peut-être, elle est la seule base solide pour déterminer l'avenir. Comment? Par ses limites, peut-être pas définitivement, métaphysiquement, scientifiquement établies avec précision. Ses limites moyennes, en quelque sorte.
Le premier exemple qui me mit sur cette voie, alors que je méditais sur l'invraisemblable survivance de Cobol au fil des générations d'ordinateur, fut cette simple constatation : nous utilisons encore, en 1987, à de minces nuances près, le même alphabet depuis l'antiquité.
Gutenberg, Mac Luhan, Averty... sont passés par là, mais on écrit toujours de A à Z. Et, pour les orientaux extrêmes, la stabilité remonte plus loin encore.
Exemple typique, appartenant d'ailleurs au monde de l'information, d'une limite qui détermine un optimum, un nombre optimal de symboles différents pour le langage. Optimum qui a été trouvé relativement vite à partir du moment où l'on est passé de l'empreinte sur argile et de la gravure (cunéïformes, hiéroglyphes) au papyrus moins contraignant.
Cette stabilité n'est pas un hasard. Si l'Humanité ne change pas, c'est parce qu'elle ne veut pas changer.
L'interdiction de l'inceste a bloqué les mutations génétiques. Le surdoué, comme le "mutant" de certaines fictions, gênent plus qu'autre chose. La sélection génétique des nazis nous fait horreur. Superman nous amuse, comme les héros de western, avec leur psychologie primaire dans des situations caricaturales.
Et les sociétés les plus évoluées mettent leur point d'honneur à assumer leurs membres handicapés, à protéger les faibles, à lutter contre les inégalités.
L'Humanité cherche volontairement sa stabilité et sa cohérence. Et Morin se trompe : le paradigme humain n'est pas perdu. Pour la bonne raison qu'il n'a jamais été trouvé, mais qu'on l'a toujours cherché, et que nous continuons, comme nos Pères, à le chercher passionnément.
Nous allons ici à contre-courant d'idées bien actuelles. après l'existentialisme qui posa l'importance de l'acte gratuit, après l'exaltation de la liberté, après le renoncement universel au "droit naturel", comment oser fonder la prospective sur la nature humaine ! Osons.
Voilà sans doute des considérations bien philosophiques. Nous allons voir qu'elles débouchent sur des conclusions bien concrètes. Et ce sont elles qui nous ont dicté notre plan : non pas une typologie des machines, toujours à reprendre, de mécanographie en informatique, de télématique en bureautique, mais à partir du fondamentalement stable : l'homme, et les structures qu'il engendre
X.5 Les déterminations majeures
S'imposant cette stabilité génétique, l'Humanité doit donc réécrire constamment un même texte dans un contexte nouveau. Le texte de base est celui qui se transmet, de génération en génération, au niveau des chromosomes. Le contexte change, lui. Aux origines, il était essentiellement matériel, un biotype. De plus en plus, le contexte est constitue des autres textes, du texte des autres, dans lequel chacun va devoir écrire le sien, et que le tout compose un Livre.
Le texte purement biologique va se trouver étendu, surtout dans les premières années de la vie, par la transmission d'un texte culturel, fait de connaissances, d'interdits, de désirs et d'idéaux plus ou moins clairement assumés. Lire à ce sujet aussi bien Desmond Morris que Piaget ou Freud et, plus récemment, les thèses de l'analyse transactionnelle et de la réalisation d'un "programme", d'un "script", écrit dans le conscient et l'inconscient de chacun, et qu'il faut assumer et dépasser.
X.5.1 La rationalité limitée
Le texte des origines impose à chacun des limites. D'autant qu'il s'écrit sur le même matériau de base : la chimie du carbone. Chacun n'a donc qu'un certain nombre d'années de vie, un certain nombre de kilos de muscles, d'organes visuels et tactiles, de neurones, donc d'aptitudes à réécrire son texte par la reproduction et par la matérialisation des structures.
La plus importante limite est la "rationalité limitée", mise en avant par Herbert Simon après Miller : nous ne pouvons penser qu'à un certain nombre de choses à la fois. Bruno Lussato a tenté une certaine formalisation de cette idée, mais l'a gardée au niveau du document confidentiel, sans base expérimentale.
Tout marketing profond pour l'avenir devra pousser des analyses à ce niveau : dans le canal des perceptions informationnels de chacun, comment faire passer le produit que je vends ou que j'envisage de créer. analyse de capacité, analyse aussi des forces en présence, de l'envie et du besoin. Lussato propose, sans aller au delà, le terme d' "ergie". A creuser.
Le consommateur, de son point de vue, mènera une analyse analogue : comment utiliser au mieux, pour le devoir et pour le plaisir, ma capacité de m'informer ; comment choisir, sur le bruyant marché de l'information, ce que je vais acheter et consommer.
Note. Certains produits informationnels ont déjà pour rôle unique de réduire l'espace informationnel : découpage de l'espace (murs), oeillères du cheval, barrières limitant l'espace pour enfants.
X.5.2 L'erreur, le doute, la faute
Cette limite à la consommation d'information ne porte pas uniquement hélas (mais cet hélais est déjà tout chargé de bonne vieille morale), à des quantités.
La qualité de l'information elle-même est limitée : elle peut être fausse. Le faux se vend aussi bien que le vrai. Au moins dans un premier temps. Aux consommateurs d'apprécier cette qualité. Aux associations de consommateurs et aux pouvoirs publics la responsabilité d'une certaine production du consommateur.
X.5.3 Le contrat
L'individu se trouve donc, dès ses origines, enlacé dans un réseau de déterminations. Les limites mêmes de sa rationalité rendent indispensables, pour chacun, une réduction correspondante du champ de ses capacités brutes. On n'est pas à tout instant disponible pour converser, pour échanger. Il faut au moins convenir d'heures, de lieux pour les rencontres.
La montée de l'informationnel, c'est la transformation progressive de ces déterminations factuelles, inconscientes, en choix clairs, en contrats explicites (sans qu'ils aient besoin d'être écrits, bien sûr). L'émergence de relations de marché est un progrès dans cette voie (mais avec ses propres limites et perversions possibles).
Par le contrat, la promesse, l'engagement, j'accepte de limiter ma liberté, j'accepte de me formaliser, de me réduire (au sens du "réductionnisme") pour que l'autre aussi puisse se développer et que nous profitions tous deux de cette arrangement, de cette répartition du présent et de l'avenir.
Et ce sont ces contrats, grands et petits, qui font l'Histoire, qui sont, et de plus en plus, l'objet majeur de l'information. Au point, mais on y reviendra, que tout finit par se retourner : le monde tient "par en haut", selon la géniale expression de Teilhard de Chardin. L'homme n'est plus la pointe avancée de la matière dans l'informationnel, mais l'ancrage de l'informationnel dans la matière.
X.5.4 La structure
La masse des contrats fait peu à peu apparaître des structures. La multiplicité des petits et grands contrats bilatéraux donne naissance à des organisation.
Des déterminations élémentaires de chaque individu va naître un ordre. On rapprocherai ici le "order from disorder" de Von Foerster des structures dissipatives de Prigogine.
Du fait même de la fixité fondamentale du texte génétique humain, il y a tout lieu de penser que les structures fondamentales de la société ne changeront pas tellement, tout en se perfectionnant et s'adaptant à une humanité plus nombreuse, à une information plus riche.
C'est pourquoi nous organiserons notre réflexion autour de grands niveaux structurels, certes bien classiques, mais base la plus sûre de notre prospective :
- l'individu avec sa réalité biologique bien séparée, les contrats qu'il passe avec lui-même, les prothèses dont il se munit,
- la famille, ou le ménage, lieu tout à la foi de l'abri et de la transmission biologique et culturelle de base,
- l'entreprise, où l'échange s'organise en production et en commerce,
- l'Etat, avec mon monopole de la Violence, avec la Nation, où se définissent les normes fondamentales, à commencer par une, essentielle : le langage,
- les communautés idéologiques, associatives, culturelles et religieuses, où s'exprime la transcendance.
D'où vient la solidité de ces structures
Du fait même de la rationalité limitée, il nous faut définir, préciser notre pesonnage pour le autres, engrener nos activités, nos modes d'expression, avec les leurs. Cela prend du temps, consomme de l'énergie. Il s'agit d'une création coûteuse, d'un investissement. L'accessoire, l'aléatoire même, deviennent le béton, contraignant mais porteur. Et finalement, c'est encore lui qui restera de nous, comme les frontières des cellules dans le bois morts, les murs historiques de nos cités anciennes et le serment de Strasbourg, toujours lu dans les écoles alors que son objet est pratiquement relégué dans la préhistoire.
Les structures s'affirment de deux façons qui retiendront notre attention car elles jouent un rôle majeur dans les systèmes d'information et dans l'informatique en particulier :
- une manière diffuse, immatérielle, répartie entre les constituants de la structure, acceptée par eux s'ils sont humains : la norme,
- une manière plus matérielle, dont la réalisation est unique pour une structure données, l'intégration.
Curieux objet que la norme. Typiquement accidentel, né des aléas d'une question temporairement posée, d'un rapport de forces conjoncturel, des caprices d'un comité international. Et le voilà fixé pour des décennies, sinon pour des siècles. Pensons aux claviers des machines à écrire, dont la disposition n'a d'autre importance que la formation et les habitudes de millions de dactylos et d'utilisateurs de l'informatique. "Quelle est la différence entre le chapelet à 49 grains et le chapelet à 50 grains? ", demande Saint-Exupéry au Cheikh (dans La Citadelle). "Toutes les têtes que j'ai coupées au nom du chapelet à 50 grains", répond le Cheikh. Sans doute aux racines mêmes des spécifications biologiques y eut-il des hasards de même type, entérinés par la combinaison d'autre hasards et de quelques nécessités essentielles.
Pourquoi les sucres naturels tournent-ils toujours dans le même sens?
Norme, étonnante synthèse de l'arbitraire et du nécessaire!
Une norme, un langage par exemple, se rattache à une structure : langue et orthographe définie par un Etat, ses écoles et ses académies, termes techniques et marques commerciales définies plus ou moins explicitement par des firmes.
La montée de l'information donne une importance particulière aux normes. Dans quel langage faut-il programmer? Comment faut-il structurer les réseaux de transmission de données? Cette dernière question, à elle seule, occupe à longueur d'année des centaines d'experts de haut niveau, principalement autour de cette colossale construction qu'est le modèle OSI à sept couches.
C'est autour des normes, par elles, pour elles, que se structureront les marchés du futur. Ce qui devient important, pour les firmes comme pour les individus, c'est d'être partie prenante, partie dominante si possible, dans le processus de création des normes. Ce sont elles qui limitent les territoires, plus sûrement que les barbelés.
On peut d'ailleurs en faire commerce, comme d'autres vendent du béton. Ou vendre des outils pour renforcer la capacité de normalisation, etc.
Si solide et si définitive que soit une norme, elle peut fluctuer, ou devenir obsolescente si la technologie et les marchés abandonnent son domaine.
Coquille vide, comme désormais le modèle des cartes perforées à 80 colonnes.
En fait, c'est un mouvement de création continu. IL appelle politique et gestion, comme on gère le sole national et municipal. Marché dans doute, avec ses étals, ses criées et ses banques. Marché remuant qui ne fera pas de cadeaux aux handicapés et aux attardés.
Norme, fantaisie qui amusa Boris Vian, occupation pour associations sans but lucratif, jeu gratuit sur des gammes et des mots. Norme, réalité majeure sur les marchés du futur.
Intégration, un mot cher à l'informatique. Hier plus qu'aujourd'hui? On cherchait à intégrer le système d'information de l'entreprise autour de son ordinateur. Le mot appartient aujourd'hui à l'électronique, avec ces circuits intégrés et même à haute intégration (VLSI : Very Large Scale Integrated Circuits).
Mais le mouvement est permanent : tout système cherche constamment à intégrer d'autres composants, à ieux intégrer ceux qu'il contrôle déjà. Est-ce un bien ou un mal? Faut-il être pour l'intégration ou pour la répartition?
En tous cas, l'intégration a des avantages :
- suppression des redondances, particulièrement nette pour les systèmes d'information où, en première analyse, il est tout à la fois inutile et dangereux de stocker plusieurs fois la même information;
- économie d'échelle;
- réduction des encombrements et consommations;
- meilleure adaptabilité dans certaines circonstances, notamment quand il faut pouvoir déployer des moyens importants;
- gain d'efficacité par spécialisation des composants.
L'intégration a aussi ses inconvénients :
- multiplication des échelons de gestion, de management, de partage des ressources communes;
- maintien de la cohésion exigeant des efforts et des contraintes permanentes;
- création d'inégalités et d'oppositions entre le haut et le bas de l'échelle, le "centre" et la "périphérie" (Hess).
Un des atouts de l'information, c'est qu'elle peut remplacer par des liens légers et souples les outils plus matériels de cohésion. A la limite, elle dépasse le problème centralisation/décentralisation, comme le sentit dans les années 60 le président du groupe Drouot, M. Tattevin. Bruno Lussato, bien plus tard (1975), montra la convergence possible entre micro-informatique et gestion des grandes structures.
Dans l'argumentaire des vendeurs de produits informationnels, intégration et autonomie des composants resteront deux bonnes cartes à jeter sur le tapis vert des conseils d'administration centraux ou locaux. Tantôt l'une, tantôt l'autre. Parfois les deux à la fois.
Y. L'INDIVIDU, CONSOMMATEUR ET EMETTEUR
D'INFORMATION
Défini à la base par son patrimoine génétique, ce texte codé en ADN, chaque homme le développer au long de son existence.
Y.1 La consommation constructrice
Les premières années (à commencer par les mois de vie intra-utérine) ont pour résultat le plus évident de multiplier le texte original par quelques milliards de cellules, et par là de donner au texte la possibilité d'émerger et d'atteindre l'autonomie.
A cette construction coopère un milieu de plus en plus large : la mère d'abord, puis la famille, complétée par ses conseillers (médecins), par l'école, les médias généraux, présents aujourd'hui très tôt au foyer par le télévision, la radio et la presse enfantine. Le "script", la personnalité se déterminent, la culture s'étoffe.
Economiquement, cette activité et sa part informationnelle est considérable. Il suffit d'évoquer le budget de l'Education nationale. Ce marché majeur est pour la plus grande par contrôlé par l'Etat. Il y a tout de même beaucoup à faire.
Les applications pédagogiques de l'ordinateur individuel, dont le prix rejoint peu à peu celui de la calculette, viennent en tête de la liste. En lui-même, l'ordinateur est profondément pédagogique, comme l'ont maintenant bien exposé plusieurs auteurs (Papert, Turckle? .xxx). Avec des logiciels appropriés, nous ne sommes qu'aux tout débuts de marchés énormes, mais, surveillés depuis plusieurs années par les grands fournisseurs, de jeux et de littérature enfantine. Les démarrages ne sont cependant pas aussi faciles ni aussi "linéaires" qu'on aurait pu l'espérer. Ces marchés ne sont pas faciles à prendre; encoder qu'une très bonne idée, avec une solide protection industrielle et une commercialisation bien étudiée, puisse toujours faire une percée. Mais, dans nos pays occidentaux, le sexe et les animaux domestiques trouvent plus facilement financement que l'enseignement !
C'est tout l'univers ludique et pédagogique de l'enfant qui va être pénétré de mille façons par l'ordinateur sous toutes ses formes, apparentes ou non.
Quelques exemples :
- le Lego comporte maintenant des pièces pour faire des tableaux de bord, les enfant les appellent souvent ordinateurs;
- l'apprentissage de la langue (prononciation, orthographe) donne lieu à de nombreuses réalisations, notamment chez le constructeur américain Texas Instruments;
- les jeux électroniques en tous genres, matériels et logiciels.
La presse enfantine s'est beaucoup développé. Il reste encore beaucoup à innover.
Classons dans la famille des jeux informationnels, les "jeux de rôle" et le principal, Donjons et Dragons.
On peut considérer que le succès de ces nouveaux jeux est une réponse naturelle des enfants (et de certains adultes) à un type de société moins primitif que ceux évoqué par les échecs et les jeux de cartes.
Dans la plupart des jeux, l'apparition de l'ordinateur pourra apporter des développements originaux, ne serait-ce que par son aptitude remarquable à des tirages aléatoire aussi complexes que voulu, alors qu'on ne disposait guère que de deux moyens jusqu'à présent: les dés et le battage des cartes.
Même dans le sport, les outils informationnels jouent un rôle croissant . La presse sportive, les systèmes d'affichage, particulièrement développées, et les réseaux de transmission, radio, vidéo et informatique (depuis les jeux d'hiver de Grenoble en 1968). L'ordinateur peut servir aussi à l'établissement de statistiques (en basket, notamment), de classements en tous genres (par exemple Olivetti pour le ski).
Y.2 Information, autonomie, liberté
Acquérant peu à peu savoir et savoir-faire, l'homme prend aussi son autonomie. De gré ou de force, à moins qu'il ne parvienne pas à l'âge adulte.
Il y a un certain surplus, au delà des nécessités de l'existence. Il y a donc place pour la décision libre, pour un peu de décision au moins. Une économie de l'information est aussi une économie de la liberté. Pourtant, certains y voient une contradiction : plus je sais, moins je suis libre. En particulier pour l'information prévisionnelle : si je connais l'avenir, où est ma liberté? On pourrait interpréter de cette manière les théories shannoniennes : l'information réduit l'incertitude, donc la liberté de choix. Il faudrait plus mathématicien que moi pour montrer scientifiquement qu'il n'en est rien. Je pense que toutes information augmente la liberté, tout en réduisant les fausses libertés (Merton dit, à niveau élevé, des choses de ce genre).
A la limite, dans un espace totalement plat, sans structure, je suis totalement libre... sur un vaste esplanade de béton, je peux aller indifféremment dans n'importe quelle direction... mais cette liberté-là est "sans intérêt". L'information est différence.
Dans un espace structuré, je pourrai faire des choix. D'ailleurs, si je veux effectivement déployer ma liberté sur la plaque de béton, je la structurerai. Je tracerai des traits à la craie, comme les enfants jouent à la marelle.
On va donc consommer de l'information pour exercer sa liberté. Jusqu'à l'absurde, comme ces revues qui donnent des trucs pour gagner à la loterie. Ou encore les horoscopes et les voyantes : une manière comme une autre de tracer des traits dans un avenir trop vaste pour choisir. C'est une question d'équilibre : la voyante peut aussi servir d'excuse pour ne pas choisir.
Un espace trop bien quadrillé ne laisse plus de liberté de mouvement.
Tout information, par rapport à une alternative de choix, en augmente la liberté. Ou bien, en effet, elle ne modifie pas les avantages et inconvénients respectifs des deux options, et cette information élimine des obstacles potentiels au choix. Ou bien, au contraire, elle précise ou renforce les avantages d'une solution par rapport à l'autre, et alors elle ramène à l'option fondamentale des choix absolus, bien ou mal.
Mais, cas négatif, elle réduit l'écart. si on arrive à l'indifférence, il n'y a plus décision.
Une bonne part de l'offre actuelle d'information est orientée vers ces chois : Que choisir. Et des dizaines de revues spécialisées.
Beaucoup de mes décisions étant importantes pour d'autres personnes ou organismes, ceux-ci vont s'empresser de m'informer : c'est la publicité commerciale, politique, idéologie.
Y.3 Information sur moi-même
"Connais-toi toi-même", dit Socrate. Mais pour se connaître, on a besoin des autres, et d'outils. Le miroir à la base! Mais aussi tous les tests que prodiguent les revues. Ce sera une autre grande application de l'informatique individuelle. C'est une des fonctions plus ou moins explicite des jeux : on se mesure, on se compare, aux autre et à soi-même d'une partie sur l'autre.
Les types d'information et les produits à inventer sont très nombreux, et les marchés potentiels considérables.
Les jeunes cherchent à se connaître pour s'orienter professionnellement, pour choisir un partenaire. Les adultes pour vire un maximum. Les personnes âgées pour se maintenir. Tous, pour déterminer leurs limites, leurs zones de risques.
Les technologies à mettre en oeuvre vont du capteur porté en permanence (par exemple, montre donnant le rythme cardiaque) à l'ordinateur puissant utilisé pour faire des horosocpoe... en passant par l'auto-diagnostic médical sur micro-ordinateur complété par l'accès à un réseau pour les cas difficiles. Les technologies traditionnelles, papier et téléphone, garderont longtemps une grande place. Le champ reste largement ouvert à l'imagination.
Y.4 Le besoin d'émettre
Consommer, c'est exister. Pour être, il faut émettre. Les promoteurs de produits informationnels nouveaux pensent d'abord à la consommation : livres, radios, disques, cassettes, TV, consultation de banques de données.
Emettre, certes, est plus difficile. Et nos sociétés, dans tous les meilleurs, s'ingénieur à le rendre plus difficile, en l'assortissant de conditions astreignantes. On commence par encourager l'enfant : "Marche, fais encore un pas... Dis moi quelque chose". Pour arriver plus tard à "Tais toi, reste tranquille".
Autrefois, les enfants n'avaient pas le droit de parler à table, et l'expression écrite personnelle se réduisait aux lettres de nouvel an, que le parrain consciencieux retournait en soulignant les fautes d'orthographe.
Il est vrai qu'un excès d'émission est rapidement insupportable. Notre capacité d'écoute est limitée si l'émission n'est pas soigneusement "montée". Ce que j'ai envie d'émettre ne correspond jamais sans effort à ce que vous avez envie d'entendre.
Pire : tout pouvoir vit aux dépens de ceux qu'il oblige à l'écouter. Pourquoi encouragerait-il l'émission, hormis celle de ses représentants mandatés?
Au fil des siècles et des décennies, pourtant, de nouvelles techniques facilitent l'émission, et des règles du jeu se mettent en place pour l'autoriser dans des limite qu'on espère raisonnables.
L'écriture reste un exercice pénible. Pour quelques journalistes, écrivains, thésards et bavards en tous genre, combien de paralysés de la plume. Ce n'est pas faute d'efforts techniques : le crayon feutre est plus facile à manier que la plume d'oie (ou le pinceau chinois), la carte poste et la carte de voeux plus vite remplies que la traumatisante feuille de papier blanc. Un dessin d'enfant même, avec quelque légende, suffira au parrain résigné (sinon soulagé de ne pas avoir à répondre au cher filleul autrement que par sa signature au bas d'un chèque).
D'autres médias, certes, sont plus maniables. La photo se fait toute seule, à condition de se limiter au "souvent de famille". Les diapos ont fait leur preuve dans les années 50... et vite lassé. Ne parlons pas du cinémaé, classique ou vidéo. Ses limites restent étroite, tant il est difficile de monter un spectacle intéressant. Pour faire cinq minutes de film intéressant, il faut autre chose que cinq minutes de prise de vue au hasard d'un après-midi libre.
Peut-on aller plus loin? Y a-t-il des moyens d'ouvrir plus largement les voies de l'émission pour que chacun puisse faire entendre sa voix un peu plus loin, un peu plus longtemps?
Il y a certainement place pour la créativité et l'entreprise commerciale. Avec l'ordinateur? Par exemple une transposition de la CAO (conception assistée par ordinateur), des bureaux d'aide à la création de messages personnels? (on le fait plus ou moins pour les funerariums...). A creuser.
Reste l'équation à faire entre émission et réception. Si une personne, émettant un message d'une longueur donnée, intéresse plusieurs personnes, cela crée un déséquilibre entre l'émetteur et l'ensemble des récepteurs. Ce déséquilibre doit être compensée de quelques manière.
Si le nombre de récepteurs reste assez faible (famille, petit groupe d'amis), le déséquilibre s'organise au sein d'un jeu de rôles, plus ou moins inégalitaire par nature. Si le nombre de récepteurs est élevé, il faut que la qualité du message soit exceptionnelle. Hors des charismes spécifiques ou des situations très particulières (le témoin par accident d'un événement important par exemple).
La création de tels messages, contenu et contenant, exige un investissement dépassant l'activité courante, et sera donc rétribuée par des voies économiques directes (le prix de la place de cinéma), indirectes (publicité, dont le coût est inclus dans le prix de vente du produit), ou des voies politiques (associations locales, nationales, avec une rétribution monétaire plus ou moins différée et répartie par la voie des cotisations et des impôts).
Mais on sort du cadre de l'individuel. Il ne suffira jamais d'un bel outil informationnel pour passionner les foules. Mais il y aura toujours des commerciaux pour essayer de nous le faire croire.
La multiplication des émetteurs et de leur puissance d'émission conduit à des goulots d'étranglement, à des saturations à deux niveaux :
- les canaux de communication, les réseaux et commutateurs,
- la capacité réceptrice des destinataires.
Pour les canaux, la croissance est si grande qu'un expert américain avait prédit, entre les deux guerres, qu'il faudrait affecter toutes les jeunes filles aux centraux. L'automatique fit sauter ce bouchon. Mais, face aux besoins croissants, il faudra mettre en place et des règlemnentations et des puissances de communication et de commutation appropriées. La communication en elle-même appelle une "valeur ajoutée".
Quant à la capacité réceptrice des utilisateurs, ne peut-elle être accrue? La multiplicité des émetteurs est pour les récepteurs un atout (abondance de l'offre, jeu de la concurrence) à condition de pouvoir exercer librement et intelligemment des choix. Cela suppose, notamment :
- une certaine ascèse de l'écoute, l'aptitude et la volonté de ne pas écouter, lire n'importe quoi, de ne pas échanger des messages ou participer à des conférences avec n'importe qui et dans n'importe quelles conditions;
- de l'information sur les médias;
- des outils spécifiques de filtrage (le répondeur téléphonique joue parfois ce rôle aujourd'hui).
Musique. L'électronique apporte une grande facilité d'émission plus ou moins assistée. Mais aussi des moyens de réception. Chaînes, baladeurs.
A la fois qualité et quantité. Plus la mémorisation (disque, compact, etc.) et la transmission (radios, télés). Question: passe bien sur le RNIS.
Y.5 La communication bilatérale
Quoi de nouveau ici depuis Adam et Eve, prototype de la communication à deux? Eve née, selon la Bible, non pas tant du désir sexuel d'Adam, que de son besoin de parler avec son semblable.
Le nouveau, c'est la "médiatisation", l'intervention de médias de communication.
L'écriture resta longtemps le seul moyen significatif autre que le contact direct. Le téléphone l'a aujourd'hui largement supplantée dans cette fonction. Et s'accroit encore chaque jour. Le besoin semble sans limites. Les cabines se multiplient, et sont toujours occupées quand on en a besoin. Tous les ménages s'équipent, il faudra bientôt plusieurs lignes par logement.
Marchés énormes, largement soustraites à l'activité économique des entreprises par le monopole des PTT, mais de plus dérégulés, et élargis par la péritéléphonie, la péri-minitélie, etc.
La montée des médiations dans toute communication fait craindre parfois que la communication directe, d'homme à homme, ne finisse par disparaître. Asimov en a dressé un tableau saisissant dans "Les cavernes d'acier".
Le danger me paraît réel dans certains cas : le porteur de baladeur est un peu "coupé du monde".
Globalement, je pense au contraire que la communication interpersonnelle sera plutôt facilitée. Voir les expériences très positives de Rachel Cohen et de son équipe en milieu d'école maternelle.
Voir aussi les publicités des PTT pour le téléphone. Il y a un élargissement du nombre de personne accessibles. Mais il y aura toujours des nostalgiques du "village" et fanatiques de la "ville" à tout crin. Les deux modèles de communication ont leurs charmes...
Ces développements, au demeurant marchés majeurs même s'ils ne sont pas toujours faciles, font naître deux grandes questions :
- jusqu'où peut aller la "prothèse" informationnelle individuelle sans dénaturer l'homme?
- jusqu'où le pouvoir peut-il laisser se créer des réseaux multilatéraux puissants et incontrôlés?
...
Une partie de la CAO de vie, la majeure partie peut-être, va consister à construire son système d'information personnel. Organise les interfaces, charger peu à peu des bases de données, tisser des liens avec les autres.
Autrefois il y avait peu de choses. Le plus souvent rien du tout. Quelques papiers juridiques, des livres de comptes, un album photo, un arbre généalogique. Exceptions de quelques aristocrates, d'Ibn Haldoun.
AVOIR/ETRE
L'avoir a un gros avantage sur l'être: il peut se découper, s'échanger. Il est plus opératoire. L'être, c'est toujours vague, et passablement binaire, manichéen. qu'est-ce qu'un supplément d'âme...
HUMAN INERTIA VS TECHNOLOGICAL PROGRESS
Talk rather of human investement, and investement rate