Association Française des
Sciences et Technologies de l'Information

Hebdo
No 20 .5 février 2001

Sommaire : Trois questions à Annie Marcheix | Actualité de la semaine | La recherche en pratique | Enseignement | Théories et concepts | Manifestations | Le livre de la semaine |


Trois questions à Annie Marcheix , présidente de l'AILF.

Asti-Hebdo : Quels sont les thèmes sur lesquels travaille actuellement l' AILF ?

Annie Marcheix : Nous avons toujours travaillé sur deux thèmes :
- la prise en compte des langues et des cultures en informatique ;
- les questions de citoyenneté. La promotion de la langue a toujours été le coeur des actions que mène l'association et des groupes de travail qu'elle constitue. Nous sommes membres, es-qualité, de la commission de terminologie de l'informatique et des composants, depuis plus de quinze ans.

Nous avons choisi d'y rester quand le dispositif a été révisé, car nous pensons qu'il est absolument nécessaire que des professionnels de l'informatique (du monde universitaire ou des entreprises) soient aux côtés des linguistes, des grammairiens et des autres compétences qui sont nécessaires pour ce type de travail.

La difficulté majeure, c'est de faire prendre en compte les termes assez tôt dans le nouveau processus. Il ne faut pas avant que l'usage d'un terme soit trop établi et que l'habitude soit prise. Car il est alors pratiquement impossible de faire renoncer les professionnels soit aux termes empruntés aux autres langues, soit à des équivalents trop approximatifs.

Notre objectif est d'apporter à la Commission les informations nécessaires pour éclairer le travail à partir des réalités professionnelles mais aussi des fondements techniques, pour aboutir à des définitions précises et exactes.

L'importance, ou les difficultés, de certains termes nous ont conduit, depuis deux ans, à produire des "fiches pratiques", faisant le point sur un terme en une page A4 (recto). Elles sont diffusées sous forme papier mais aussi disponibles sur notre site. Exemples : digital/ numérique, visio et vidéo, internationalisation et localisation.

En revanche, nous avons l'agrément, mais nous ne croyons pas qu'il soit vraiment utile de conduire systématiquement devant les tribunaux les distributeurs de produits étrangers en France. Le plus souvent, au delà de l'étiquetage, ils ne disposent pas de l'information nécessaire à une bonne traduction de la documentation. Nous mettons plutôt l'accent sur un travail tout en amont de la chaîne de production, pour qu'une bonne internationalisation permette ensuite aisément une localisation dans notre pays comme dans les autres pays.

Il est essentiel aussi de sensibiliser les décideurs à ces questions. Les équipes techniques ne demanderaient qu'à être convaincues, mais si les directions n'incluent pas l'internationalisation dans leur stratégie, dans leur modèle économique, les techniciens n'auront pas les budgets ni les délais pour travailler correctement.

La documentation n'est pas tout. Une bonne localisation exige que tous les maillons des chaînes de traitement soient à niveau : de la saisie au clavier jusqu'à la restitution sur imprimante en passant par les fonctions de recherche et de tri. Il faut éviter de se laisser piéger par la complexité. Les utilisateurs ont besoin de prescriptions claires et suffisamment synthétiques et complètes. Nous nous disons parfois en riant qu'il faudrait "représenter les chosese en 3D" !

C'est autour de ces questions que nous organisons nos colloques LexiPraxi. Le dernièr s'est tenue en décembre 2000 sur les technologies de l'internet et les langues, et l'accès au savoir sur la toile ; la volonté de montrer la marche entreprise vers le plurilinguisme et l'interculturel (Actes disponibles au secrétariat de l'association).

Hebdo : Qu'entendez-vous plus précisément par "citoyenneté" ?

A.M. : Ici non plus, nous ne travaillons pas seuls. Nous agissons avec d'autres associatoins. En 1997, nous avons constitué un collectif "Fichiers et citoyenneté" avec le Creis, Iris, Vecam, la revue Terminal et Souriez-vous-êtes-filmé.

Ce collectif, avec deux autres collectifs et la Ligue des droits de l'homme a créé formellement, en 1999, l'intercollectif Delis, composé d'une quarantaine d'associations et de syndicats regroupant un grande nombre de métiers concernés : informaticiens, sociologues, médecins, juristes, travailleurs sociaux, statisticiens, Autant de savoirs et de savoir-faire très différents !

Petit à petit, nous avons appris à travailler ensemble pour appréhender globalement les projets d'informatisation de la société qui mettent en jeu différents aspects des droits de l'homme. Nous avons, par exemple, organisé un colloque "Surfichés, ne vous en fichez plus..." le 25 avril 1998.

Nous avons travaillé, et agi, sur
- la transposition en droit français de la directive européenne sur la protection des données à caractère personnel mais aussi les flux transfrontières de ces données liés au commerce électronique ;
- l'informatisation du système de santé ; nous travaillons actuellement sur l'identifiant permanent du patient (vu la manière dont le dispositif se construit, cet identifiant devrait présenter plus de danger que d'avantages réels) ;
- l'informatisation de l'action sociale ; nous avons publié un fascicule intitulé "Pour des droits sociaux sans casier social", pour aider les professionnels du social à s'impliquer dans l'informatisation de leur secteur ;

Nous nous battons pour d'efficaces moyens de sécurité efficaces soient mis en oeuvre, que la valeur créée par les regroupements d'informations ne fasse pas naître des enjeux que l'on ne pourra pas maîtriser, que des solutions globalisantes et centralisatrices ne rendent pas vulnérables les dispositifs conçus. Les technologies d'aujourd'hui permettent de gérer autrement les choses.

Hebdo : Toutes ces questions semblent bien techniques. Relèvent-elles vraiment d'un travail associatif ?

A.M. : Permettez-mois de vous répondre par un exemple, d'ailleurs lié aux deux actions précédentes. Il s'agit, en coopérant avec d'autres associations, d'enrichir la représentativité comité national créé par l'Afnor, miroir du sous-comité 36 JTC1 de l'ISO, sur la normalisation des outils de médiation pédagogique.

Cette normalisation ne concernera pas les ressources pédagogique (les contenus). Mais la normalisation des outils prédéterminera notamment les modalités d'action des enseignants et des formateurs. La norme est certes une protection, mais si elle va trop loin, elle ne respecte plus ni les métiers ni la nature des choses. Et ici la volonté de marchandisation est évidente.

Cela semble peut-être abstrait, et pourtant l'enjeu est considérable. Souvent, au plan professionnel et ses contraintes, pour en prendre la mesure.. Le monde associatif apporte alors un cadre pour porter un autre regard, pour suggérer des solutions alternatives.

C'est dans de telles perspectives que l'AILF a décidé de faire partie des associations fondatrices de l'Asti. Une recherche de confluence entre des approches savante et sociétale.



Actualité de la semaine :


La recherche en pratique


Enseignement


Théories et concepts


Manifestations


Le livre de la semaine


L'équipe ASTI HEBDO : Directeur de la publication : Malik Ghallab. Rédacteur en chef : Pierre Berger. Secrétaire général de la rédaction : François Louis Nicolet, Chef de rubrique : Mireille Boris. Asti-Hebdo est diffusé par FTPress