L'Atlas mondial de l'Internet

La nouvelle édition de l'étude de l'Idate est disponible. Ces éléments de synthèse sont extraits de l'édition 2000 de l'étude réalisée par l'IDATE "L'Atlas mondial de l'Internet" dont le premier volet vient de paraître.

Depuis fin 1998 et les débuts de Freeserve au Royaume-Uni, la vague de l'Internet gratuit s'est propagée dans toute l'Europe. Cependant, les marchés nationaux de l'accès commuté restent aujourd'hui, dans la quasi-totalité des pays européens, contrôlés par l'opérateur historique, même si AOL compte, en août 2000, près de 3.8 millions d'abonnés sur toute l'Europe.

Que retenir de ces douze derniers mois d'activité Internet ? L'exercice est difficile, mais il nous paraît utile de relever au moins les points suivants :

- les premiers pas de l'Internet Mobile : les Européens, et dans un autre contexte les Japonais, ont découvert que l'extraordinaire engouement de leurs populations pour la téléphonie cellulaire, devait conduire à considérer les mobiles comme un vecteur privilégié de dissémination de l'Internet. L'attribution des licences 3G (UMTS), souvent à des prix très élevés, conjointement au lancement des premiers services WAP a illustré en Europe l'appétit des grands opérateurs mais aussi des acteurs du monde Internet ; tandis que le succès spectaculaire des services i-mode de DoCoMo, comptant à présent plus de 10 millions d'abonnés, suscite convoitise et intérêt ;

- la fusion d'AOL et de Time Warner : plusieurs lectures ont été faites de cette fusion sans précédent entre le leader mondial du service Internet et le premier groupe d'entertainment. On retiendra la crédibilité que semble conférer cet accord à l'accès à l'Internet par câble mais aussi la création de valeur - financière et à long terme - attachée au mariage de la net-économie et des médias dits traditionnels en termes de marques, de contenus, d'équipes, de modèles économiques,

- l'acquisition de Lycos par Terra Networks : l'extraordinaire succès de l'introduction de Terra Networks par Telefónica, les atouts que lui a donné, sur les marchés hispanophones, l'omniprésence de l'opérateur espagnol en Amérique latine, ont permis la première prise de contrôle par un acteur européen d'une entreprise historique du développement Internet des années 90. On retiendra que l'introduction en bourse de Terra Networks a été suivie de celle des filiales Internet de Deutsche Telekom (T-Online) et France Telecom (Wanadoo). Complétées par le lancement de Vizzavi (Vivendi-Vodafone), et Chello (UPC, bien que depuis peu contrôlé par Liberty Media/AT&T et regroupé avec les activités hors US d'Excite@Home), ces firmes font apparaître les ambitions nouvelles que l'Europe peut avoir dans l'économie Internet ;

- le début d'un déploiement en vraie grandeur des technologies d'accès à haut débit : trop lentement sans doute au regard des attentes exprimées, mais à un rythme qui dépasse celui des simples expérimentations, les différentes plates-formes d'accès à haut débit se mettent en place. Le câble conserve une longueur d'avance et pourrait être difficile à concurrencer sur le marché résidentiel dans les pays fortement équipés en réseaux câblés. L'extension progressive des réglementations imposant le dégroupage devrait généraliser dans les pays occidentaux un marché concurrentiel pour des services SDSL (petites entreprises) et ADSL (SOHO et marché résidentiel). Les boucles locales radio (LMDS) font l'objet dans de très nombreux pays d'attribution de licences et devraient constituer un autre vecteur d'investissements très significatifs dans l'accès à haut débit.
On aura toutefois la prudence de souligner que, si les business plans sont avancés, le marché va devoir faire la preuve dans les mois qui viennent que les modèles économiques sur lesquels ils sont fondés sont bien pertinents ;

- la multiplication des projets de "market places" : après une année 1999 marquée par l'affirmation des ambitions des portails grand public, de nombreux acteurs se sont orientés vers les portails thématiques et professionnels, susceptibles d'être valorisés dans les investissements engagés pour les Intranet, ou se déclinant sous la forme de "carrefours d'affaire" (market places). L'industrie automobile, la grande distribution, l'aéronautique, l'énergie, etc., ont généré en quelques mois des regroupements ambitieux et parfois ambigus (sur le plan de la neutralité des plates-formes de transaction ainsi constituées) pour faciliter les relations entre donneurs d'ordre et sous-traitants ;

- la Net-économie qui trébuche en bourse en avril : certains y ont vu la vanité des attributs complaisamment associés à la Nouvelle Economie : une propension à attirer des capitaux sans préoccupation sur la profitabilité des activités créées. La crise limitée des valeurs Internet aura eu le mérite de rappeler que toute nouvelle idée (quand elle est nouvelle !), n'est pas obligatoirement bonne. La plus grande sélectivité des investisseurs s'est aussi accompagnée d'une tendance à privilégier les "click and mortar", même si les approches Internet des grands groupes "installés" ne peuvent constituer une garantie ;

- l'échec de la fusion WorldCom-Sprint : c'est un évènement qui s'inscrit en rupture avec une série impressionnante de fusions, spectaculairement illustrée par la saga de WorldCom. Malgré cette pause, nous sommes persuadés que les fusions vont se poursuivre, y compris avec des implications pour ces deux compagnies. Plus prosaïquement, cet échec est le résultat des risques d'abus de positions dominantes perçus par les instances anti-trust européennes (au regard du marché des backbones européens) et américaines (au regard du marché longue distance). L'arrêt de la cour demandant la scission de Microsoft a été plus complexe dans ses attendus et conséquences. En attendant le résultat de la procédure d'appel, Cisco a devancé Microsoft en termes de capitalisation et s'est même imposé comme la première valorisation mondiale.


- L'Internet en Europe de l'Ouest

Les pays scandinaves ont été les précurseurs de l'Internet commercial en Europe et sont toujours, mi-2000, les mieux équipés du continent avec 50 % des foyers connectés pour la Finlande, et 41% pour la Suède.

L'Allemagne est le premier marché Internet d'Europe. Deutsche Telekom, qui a su adapter à Internet son service en ligne T-Online, contrôle largement le marché de l'accès commuté destiné aux résidentiels et aux Soho. T-Online est aujourd'hui le premier fournisseur d'accès Internet européen avec des présences en Autriche et en France (Club-Internet). T-Online prévoit ainsi 7 millions d'abonnés d'ici fin 2000.

Le Royaume-Uni a été le berceau du développement de l'Internet gratuit, qui a connu un succès éclair dans le pays, dopant considérablement le marché final anglais qui compte près de 16 millions d'internautes mi-2000. L'ISP gratuit Freeserve, lancé en septembre 1998 par Dixons, numéro un britannique de la distribution de produits électriques, a détrôné en 3 mois le leader AOL/CompuServe UK. Au printemps 2000, le Royaume-Uni s'est une fois de plus distingué avec l'apparition des premiers forfaits illimités, communications locales comprises (NTL, Altavista) qui se propagent à présent dans d'autres pays européens. De plus, le 1er juin 2000, BT a lancé son forfait illimité pour communications locales destinées à Internet (SurfTime) . BT a été ainsi le premier opérateur historique à lancer une telle offre.

En France, l'arrivée, début 1999, des premiers ISP gratuits a dynamisé le marché de l'accès commuté. Si celui-ci reste contrôlé par France Télécom et AOL/CompuServe, les ISP gratuits figurent aujourd'hui parmi les leaders du marché résidentiel. Le marché professionnel, lui, reste assez éclaté. La France reste toujours nettement en retard par rapport aux leaders européens comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou le Royaume-Uni. Le succès du Minitel est en partie responsable du retard français dans le domaine de l'Internet. Cependant, la baisse du coût de l'accès à Internet (suite à l'arrivée d'ISP gratuits), la mise en place de forfaits intégrant les communications téléphoniques et l'arrivée de forfaits illimités, communications locales comprises, devraient doper le développement d'Internet dans le pays.

En Espagne, l'opérateur national, Telefónica, a su utiliser son service en ligne propriétaire, InfoVía, pour développer Internet dans le pays et exporter le modèle en Amérique du Sud. Le marché Internet résidentiel espagnol est aujourd'hui contrôlé par les opérateurs comme Telefónica et sa filiale Terra Network, Retevision ou Uni2.

Telecom Italia, l'opérateur historique italien aujourd'hui sous contrôle du groupe Olivetti, a également lancé une offensive sur le terrain de l'Internet. Aujourd'hui, Olivetti contrôle près de 40 % du marché Internet résidentiel. En Italie, l'Internet gratuit, apparu en mars 1999, a également connu un succès éclair avec notamment Tiscali qui détient mi-2000, 20% de parts de marché sur l'accès commuté.

L'accès Internet haut débit fait une première percée sur le marché européen avec le câble et l'ADSL. Dans les pays où le câble connaît une forte pénétration comme le Benelux, le nombre d'abonnés Internet haut débit croît régulièrement. Il est à noter, à ce propos, l'émergence du premier acteur paneuropéen de l'accès Internet par câble annoncé en juillet 2000 et issu de la fusion de UPC Chello et Excite@Home (hors USA) : Excite Chello (300 000 abonnés dès son lancement).
L'ADSL poursuit son déploiement européen à travers les opérateurs historiques. Si aujourd'hui les accès ADSL sont le plus souvent cantonnés aux grands centres urbains, d'ici 2002, les accès Internet via ADSL seront disponibles dans la plupart des villes moyennes des grands pays européens.

- L'Internet en Europe de l'Est

En Europe de l'Est, l'Internet commercial n'en est qu'à ses débuts. Cependant, certains pays comme la Pologne et la République Tchèque, connaissent un développement rapide d'Internet. En 1999 et 2000, des investisseurs étrangers ont investi sur les marchés Internet d'Europe de l'Est comme : l'Américain GTS, qui a racheté plusieurs ISP en Pologne et en Hongrie notamment, PSINet, qui a investi le marché hongrois, Nextra, filiale du Norvégien Telenor , ou encore KPN qui contrôle EuroWeb, fournisseur d'accès en Hongrie, Slovaquie et République Tchèque.

L'Internet connaît toujours un développement difficile, dans le contexte d'une crise économique persistante et de la vétusté du réseau téléphonique. Le début d'année 2000 a été marqué en Russie par l'émergence de Golden Telecom issu de la fusion de plusieurs opérateurs et contrôlé par GTS. Golden Telecom contrôle près de 15 % du marché Internet russe.


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