@DOMAINE:STRATEGIE
@ST OUV:Une profession sous la pression
@TITRE:Cent mille éleveurs, douze serveurs
@CHAPO:L'élevage français doit ses
performances à son informatique: une nébuleuse de
SSII associatives régionales. Poussée par les consommateurs,
surveillée de près par l'Etat qui pourtant réduit
ses subsides, cette communauté doit accroître sa
cohérence sans perdre la dynamique de ses structures coopératives.
@TEXTE:Les PME françaises, dit-on souvent,
ne savent pas s'organiser pour faire face au monde moderne. Et
l'on cite le textile du Nord de l'Italie, avec ses structures
éclatées qui convergent vers de grandes marques
mondialement connues. La France peut montrer au moins un bon exemple
de telles structures, avec la production de lait et de viande.
Et l'informatique joue un rôle de plus en plus important
dans le travail de cette communauté. Elle sert de mémoire
et de réseau de communication à des centaines d'organismes
divers, départementaux, régionaux et nationaux.
Tous animés et gérés par les éleveurs
eux-mêmes, sous le contrôle de l'Etat. Le réseau
des Arsoe (voir encadré) en forme la colonne vertébrale,
même si elle n'a pas le monopole des traitements informatiques
du secteur.
@INTER:Une communauté sous pression
@TEXTE:Cette année, c'est à Roulans,
petite commune de Franche-Comté, que s'est tenue son assemblée
générale. Dans une ambiance qui exprime à
la fois son enracinement et sa technicité. Avec l'accent
de l'Est ou du Midi, ou de Paris, on y parle aussi bien de développements
orientés objet en UML que de petites recettes contre la
mortalité infantile des porcelets.
Ambiance, mais inquiétude aussi. Tout le système
est aujourd'hui sous pression. D'une part l'an 2000 oblige à
réécrire les logiciels. D'autre part la crise de
la "vache folle" exige une coopération accrue
de tous les producteurs et de l'ensemble de la chaîne de
production et de commercialisation. Il faut que le consommateur,
chez son boucher de quartier ou au rayon viandes de son super-marché,
sache d'où vient ce qu'il consomme.
C'est une toute autre informatique qu'il faut donc
mettre en place. Et vite. Hier, les préoccupations étaient
essentiellement sanitaires et génétiques. Il s'agissait
de dépister et de traiter rapidement les maladies traditionnelles
des différents cheptels. D'augmenter les performances de
la production laitière et de la viande par une meilleure
sélection génétique. Les organismes locaux
répondaient suffisamment à ces besoins. Avec chacun
leur informatique et les logiciels les mieux adaptés, qui
peu à peu s'organisaient tout de même en logiciels
à vocation nationale. La traçabilité ne peut
s'accommoder d'une trop grande variété de systèmes,
et exige une circulation rapide des données sur toute la
filière, quelles que soient les régions concernées.
De plus, l'Etat semble vouloir renforcer son emprise.
Tout en réduisant ses crédits (divisés presque
de moitié en trois ans) et en s'excusant au dernier moment
de ne pas venir à Roulans. Faute, sans doute, de n'avoir
pas encore arrêté clairement sa politique.
@INTER:Unir sans démotiver
@TEXTE:Alors, les éleveurs serrent les rangs.
Ils savent qu'ils vont devoir mettre la main au portefeuille pour
financer les nouvelles applications. Et mieux coordonner les efforts
pour réduire les coûts tout en améliorant
les services grâce à une cohérence accrue
des applications, des bases de données nationales et du
réseau.
Localement, les Arsoe s'inquiètent. Ne va-t-on
pas les sacrifier sur l'autel de l'intégration nationale
? Alors elles investissent. La Bretagne joue Internet. La Franche-Comté
étoffe son siège et regroupe sur un même site
tout un ensemble d'organismes professionnels. Depuis ses bureaux,
on peut entendre meugler vaches et taureaux des étables
voisines. La Normandie quitte le centre ville de Caen pour une
zone d'activités mieux adaptée.
Mais elles accroissent aussi leur coopération
transversale. Elles lancent ensemble des projets communs. Elles
visent à converger vers des standards. Elles projettent
un intranet commun. Et elles renforcent leur structure fédérative
nationale, la FIE. Deux permanents lui suffisaient jusqu'ici.
Elle vient de se doter d'un directeur, Ange-Thomas Mascunan. Ancien
consultant et de dirigeant de SSII, il va prendre son bâton
de pélerin pour traduire concrètement les grandes
orientations qui semblent désormais faire un consensus
national. Un maître d'oeuvre général, en quelque
sorte, appuyé sur les moyens de douze entreprises. A travers
lui, toute une profession, cent mille éleveurs, cent mille
PME, jouent sur l'informatique leur autonomie sinon même
leur mode de vie.@SIGNATURE:PIERRE BERGER
@LEGENDE:L'Arsoé de Roulans: la technicité
au coeur de la Franche-Comté.
@TENCA1:LES CHIFFRES DU LAIT
@TEXTE:
- 4 millions d'animaux aux performances contrôlées, dont 3 millions de vaches
- 90 000 élevages
- Services informatiques assurés notamment par les douze Arsoe (Associations régionales de services aux organismes d'élevage), coordonnées par la FIE (France informatique élevage) et le CTIG de Jouy-en-Josas.
- Le réseau FIE comporte une plate-forme nationale, douze serveurs régionaux, 2 600 micro-ordinateurs nomades et 1000 postes fixes au siège des organismes de contrôle. En outre, de nombreux éleveurs se connectent au système à partir de leur micro-ordinateur ou de leur minitel.
- Les Arsoe emploient actuellement 233 personnes, dont 133 aux études et 64 à l'exploitation.
- Les standards envisagés pour les plans qualité sont UML (méthode de conception), Rational Rose (Conception), Visual Basic (développement de prototypes et SQL pour les bases de données.
- L'architecture cible, actuellement en cours de
test, respecterait le désormais classique schéma
à trois niveaux: postes de travail fixes ou mobiles, serveurs
de traitements, serveurs de données. Ces derniers continueront
d'assurer les traitements pour les postes actuels implantés
dans les organismes techniques (contrôle laitier, gestion
des races, etc.).
@T RUB3:"De six logiciels, il faut passer à
un seul"
@SOUS TITRE:Daniel Grémillet, président
de la la CPDE (*)
@INTW QUESTION:A la fois éleveur et responsable
au niveau régional, on vous sent pressé de voir
la profession évoluer ainsi que son informatique. Pourquoi
cette hâte ?
@INTW NOM:Daniel Grémillet:
@TEXTE:La demande du consommateur vient télescoper
toute l'évolution paysanne, toute l'organisation de l'élevage
que nous avions mise en oeuvre depuis plus de trente ans. En même
temps, l'agriculture est engagée dans une mutation formidable
au niveau de la communication et de l'interprétation des
résultats des exploitations, techniques aussi bien qu'économiques.
En matière d'amélioration génétique
et sanitaire, la profession que la performance individuelle ne
peut s'établir que dans la logique collective. Nous avons
un rendez-vous important avec la cohérence informatique.
Nous avons su communiquer au niveau des départements, voire
des régions. Mais nous n'avons pas encore su prendre la
dimension nationale.
@INTW QUESTION:Qu'est-ce que le politique que vous
êtes attend de l'informatique ?
@INTW NOM:D.G.
@TEXTE:De six logiciels, il faut passer à
un seul. Il faut prendre des arbitrages qui nous permettent d'asseoir
la communication entre les différents secteurs. L'APCA
(Assemblée permanente des chambres d'agriculture) a la
même obligation de réussite que la FIE: mettre en
cohérence les choix politiques professionnnels. Nous devons
être capables de mettre en oeuvre un schéma d'identification
et de traçabilité. Une colonne vertébrale
où pourront se greffer un certain nombre de choix régionaux
et départementaux. Car il ne s'agit pas de tuer les initiatives
locales, mais de les fédérer de manière transversale.
@INTW QUESTION:Pouvez-vous y arriver suffisamment
vite ?
@INTW NOM:D.G.
@TEXTE:C'est le grand défi des deux années
qui viennent. Mais la prise de conscience est déjà
réelle. Tenir les propos que j'ai tenus à l'Assemblée
générale de Roulans sans recevoir des tomates, cela
prouve l'évolution qui s'est produite, dans la tête
de chacun. @SIGNATURE:Propos recueillis par P.B.
@LEGENDE:Daniel Grémillet:"Pour l'élevage,
la performance individuelle ne peut s'établir que dans
la logique collective."
(*)Comité de liaison des EDE, Etablissements départementaux de l'élevage. Daniel Gremillet est aussi président de la Chambre d'agriculture des Vosges et d'une coopérative laitière, conseiller régional en Lorraine et bien entendu... éleveur.