@DOMAINE:RELATIONS INTERBANCAIRES

@ST OUV:ENTREPRISE ETENDUE

@TITRE:Pas d'Euro sans réseaux!

@CHAPO:La monnaie unique a besoin d'informatique autant que de volonté politique. Les banques françaises investissent des centaines de millions de F pour être prêtes en 1998. Une construction complexe, à base de machines Unix, de progiciels et d'infogérance. Et dans une perspective de restructuration profonde du secteur.

@TEXTE:Le temps presse. A la Banque de France, dans les grands établissements financiers, mais aussi dans les organismes interbancaires et les SSII, les équipes de développement s'affairent autour des premières réalisations pilotes. La CRI (voir glossaire), ses applicatifs et ses réseaux viennent de passer un premier essai il y a quinze jours avec des résultats encourageants. Il leur reste un peu plus d'un an, d'ici au 1er janvier 1998, pour mettre en place ces systèmes indispensables à l'Euro et sans droit à l'erreur ni à la panne. Et, un an plus tard, la clé de voûte européenne, Target (Trans-European automated real-time gross settlement express transfer system). Sinon l'Euro devra attendre, même si nous satisfaisons aux critères de Maastricht.

Une politique monétaire européenne exige en effet que les banques centrales, et la Banque centrale européenne, puissent intervenir très vite, en s'appuyant sur des "places" nationales efficaces et fiables. Au dessus des outils actuels de compensation des chèques et des virements et des paiements par cartes, il faut organiser des systèmes temps réel pour les paiements de gros montants. Et, en contrepartie, dans les mêmes délais, pouvoir livrer les titres boursiers qui garantissent les paiements. Seule l'informatique répond au problème. Il en coûtera au moins 300 millions de F aux banques françaises, mais l'investissement est incontournable.

@INTER:Target, clef de voûte européenne

@TEXTE:Au sommet de l'édifice européen, Target connecte les systèmes nationaux (voir figure), sous l'autorité de la Banque centrale européenne. Il assure les paiements de gros montants. Pour garantir l'efficacité et la fiabilité, il opère en temps réel (quelques secondes normalement, une demi-heure au maximum) et "en brut" (gross settlement), c'est à dire sans compensation de créances réciproques entre établissements. L'énormité des sommes en jeu ne permet pas, en effet d'attendre la fin de la journée pour régler des soldes. Car il suffirait qu'une seule banque soit incapable de payer pour mettre toutes les autres en péril: c'est "le risque systémique", qu'il faut à tout prix éviter.

@INTER:La CRI et les subtilités françaises

@TEXTE:La France aurait sans doute pu se contenter elle aussi d'un système minimaliste en temps réel et en brut, le TBF élaboré par la Banque de France. Mais l'absence de toute compensation en cours de journée contraindrait nos banques à provisionner des montants considérables, excédant assez largement leurs fonds propres. Elles mettent donc en place un organisme spécialisé, la CRI, qui assurera l'ensemble des liaisons, et permettra aussi des compensations limitant les besoins de trésorerie, grâce au "système net protégé" (SNP).

Le SNP applique, en temps réel, un jeu compliqué de techniques de sécurité et notamment, pour se garantir contre le risque systémique, les règles dites de Lamfalussy. Elles comportent notamment une limitation du nombre des partenaires et des accords bilatéraux sur les crédits que chaque partenaire accorde à chacun des autres. Avec dépôts de titres limités à ces niveaux de garantie. Ces dépôts, de montants considérables tout de même, doivent se constituer chaque matin et se liquider le soir. Ce qui conduit à compléter le système actuel Relit avec une version à grande vitesse, le RGV. Tout se tient!

La CRI assurera en outre les versements en fin de journée des systèmes de compensation des petits montants: SIT, Relit, RGV. Et enfin les liaisons avec TBF. On arrive donc au schéma principal de la place financière parisienne, et à son schéma quotidien de fonctionnement. Des "flux tendus", diraient les industriels. Qui rejoindront, par Target, ceux de nos partenaires européens. A commencer par les Anglais (dont le système Chaps a une confortable avance), Allemands et Belges.

Le dernier conseil des ministres des Quinze, tenu samedi dernier à Dublin, n'a sans doute pas parlé beaucoup d'informatique. Pour l'instant, l'intendance suit. Le progrès standards et des architectures ouvertes n'y est pas pour rien.@SIGNATURE:PIERRE BERGER

////////////////Deuxième papier en base de la page

@TITRE:Globalisation, dématérialisation, restructuration

@TEXTE:Ces nouveaux "systèmes de place" ne consommeront qu'une puissance informatique assez modeste. Mais ils contribuent activement à la "globalisation" nationale et européenne de toutes les activités financières. Les structures locales de compensation disparaissent et les "comptoirs" de la Banque de France perdent une partie de leur fonction.

L'emploi va souffrir de gains de productivité dans un secteur déjà en sureffectifs. La monnaie unique et les systèmes de place vont faire disparaître les personnels (et les spéculateurs) qui vivaient des activités de change intra-européennes et des jeux subtils entre places. Quelques trésoriers devant leur station de travail feront tourner tout l'ensemble.

Enfin, il faut s'attendre à des effets de concentration, tout particulièrement en France. Certaines de nos banques, déjà en situation critique, passeront-elles ce difficile cap de fin de siècle. Les projets de restructuration vont déjà bon train.

La globalisation ira encore plus loin au niveau européen. La loi française de "modernisation des activités financières" (JO du 4 juillet 1996) aligne l'Hexagone sur les directives de Bruxelles. Les frontières s'abaissent aussi bien entre pays qu'entre catégories d'établissements. Rien n'empêchera un établissement agréé en Italie d'intervenir directement sur la Bourse de Paris. Et d'ailleurs, une part non négligeable des montants échangés, en espèces comme en titres, pourra se faire directement de gré à gré, sans passer par les marchés boursiers ou même les banques. Internet, pour peu qu'il sache se sécuriser, joue en faveur de la "désintermédiation".

Ainsi, la constitution d'un bloc monétaire européen capable de lutter contre la spéculation interne et contre la suprématie du dollar va logiquement s'accompagner d'une concentration des pouvoirs et des activités financières européennes. On voit d'ailleurs Londres s'inquiéter de la montée en force de l'Euro sur l'axe Paris-Bonn. "L'Angleterre va commencer à payer le prix de son refus d'un engagement européen" (Alain Vernholes, Le Monde du 15/8/1996). Une révolution informatique autant que financière, qui commencera à se concrétiser dans deux ans!@SIGNATURE:P.B.

//////////////////Troisième papier, sur la page en face

@DOMAINE:RELATIONS INTERBANCAIRES

@TITRE:Unix, progiciels et infogérance

@CHAPO:Fonctionnant sous Unix, voire sous NT, ces super-réseaux exigent un investissement (relativement) modeste. Pour l'essentiel sous-traité aux SSII, principalement Axime-Stéria et Cap-Gémini-Swift. Leur exploitation devrait ensuite suivre la dynamique actuelle de concentration et de mise en infogérance.

@TEXTE:Techniquement, ces méga-projets se traduisent en fait par l'adjonction de machines relativement petites aux parcs existants. Des nains par rapport aux grands sites à mainframes qui continuent de traiter les masses de petits montants et de gérer les comptes courants de la clientèle. Globalement, en tenant compte des systèmes implantés dans les établissements financiers, le marché global atteint 300 millions au moins, avec beaucoup de développements logiciels pour appliquer les principes de fonctionnement (notamment les règles de Lamfalussy) et fournir aux trésoriers des interfaces synthétiques et efficaces. Peu de choses, tout de même, par rapport aux quelques 60 milliards nécessaires pour adapter à l'Euro le patrimoine applicatif de base.

@INTER:Unix pour Target et la CRI

@TEXTE:Au sommet, Target a choisi une approche minimaliste : définition des règles et des formats de donnés avec un minimum de fonctions de pilotage au niveau de la Banque centrale européenne. La CRI, constituée en SAS (société à actionnariat simplifié), restera une petite structure, sous-traitant l'essentiel de ses activités. Elle a confié les développements à Axime-Stéria, en Unis sur machine Hewlett-Packard à haute disponibilité. L'exploitation en reviendra à Axime (peut-être à sa filiale Segif).

@INTER:L'équipement des banques

@TEXTE:Trois groupes bancaires français ont lancé des développements spécifiques (sous MVS): BNP, Banques Populaires, CIC. Les autres font appel aux progiciels, réalisés principalement par deux consortiums, Cap-Sesa/Swift (Barclays Bank, Caisse des dépôts et consignations, CCF, Crédit Agricole, Crédit Lyonnais, Crédit du Nord, ) et Axime-Stéria (Banque de France, BFCE, Compagnie bancaire, Indosuez, Paribas, Société générale, Banque Worms). La Poste et les Caisses d'Epargne n'ont pas encore annoncé leur choix. Ces produits n'ont besoin que de machines modestes. Le produit de Cap-Sesa, par exemple, tourne sur RS 6000, et sous Windows NT pour les petits établissements.

Dans chaque banque, cet applicatif est complété par un outil de connexion par le réseau, fourni tantôt par Axime-Stéria, tantôt par Cap-Sesa Swift. Certaines banques, comme la Barclays (qui a joué un rôle décisif dans le lancement du processus de développement par progiciels), combinent des produits de source différente. Il reste encore à assurer les liaisons avec les machines hôtes de chaque banque, ce qui relève en général de développements spécifiques en interne.

@INTER:Concentration et infogérance

@TEXTE:Une fois lancés, ces grands systèmes devraient se concentrer d'une manière comparable à l'exploitation des grands sites informatiques. A la limite, les fonctions de trésorerie ne deviennent qu'une forme supplémentaire de pupitrage. Une console de plus à côté de la gestion du transactionnel et des réseaux.

Grâce à l'infogérance, cette concentration ne s'arrête plus aux frontières des établissements, si grands, prestigieux et stratégiques qu'ils soient. Exemple type: la Segif, créé en mai dernier pour regrouper les capacités de traitement informatique de la SBF (Société des bourses françaises) et d'Axime. Avec un chiffre d'affaires prévu de 400 MF.

Quant aux réseau proprement dit, Swift semble rafler toute la mise, bénéficiant d'une insertion ancienne et profonde dans les milieux bancaires. Mais la Sita, spécialiste du transport aérien, peut elle aussi offrir des prestations et a constitué une filiale spécialisée dans les applications financières. @SIGNATURE:P.B.

@T ENCA1: CHIFFRES-CLES

@TEXTE ENCA2:

40 000 virements interbancaires par jour

60 milliards de francs pour petits montants

1200 milliards de francs pour gros montants

Côut de la monnaie unique pour les banques françaises : 66 milliards de F

Coût de la CRI/TBF plus de 300 milliards de F.

6 banques représentent 36% des échanges de gros montant

@T ENCA1:LE COMPTE A REBOURS

10 janvier 1995. Accord entre la Banque de France et l'Afec pour la constitution de la CRI

mai 1995. Premier rapport Target

automne 1995: démarrage des développements de solutions CRI pour les banques

juillet 1996. Loi française sur la modernisation des activités financières

août 1996. publication des spécifications techniques de Target

septembre 1996 premiers essais des solutions CRI

2 janvier 1997. Démarrage de la CRI

15 avril 1997. Démarrage de TBF

30 juin 1997. Démarrage du RGV

1er janvier 1998. La CRI complètement opérationnelle

1er janvier 1999. Démarrage de Target