Créativité
L'Experience Music Project de Seattle
Frank Gehry contingente ses illustrations. Nous avons droit à une illustration (dans l'article original de Pixel). Diccan en reprend ici une autre, reprise de Wikipedia* Geek Girl
par Mireille Boris.
Article paru dans la revue Pixel en juin 1999.
L'architecte le plus surprenant du monde s'allie à l'un des hommes les plus riches du monde pour concevoir un musée en l'honneur de l'expérience rock'n'roll. Il commence par découper en morceaux une guitare électrique...
Les méthodes de construction de ce "dé-constructiviste" ne se conçoivent plus sans CATIA
Paul Allen et sa sœur Jody sont considérés comme les "Medicis" de Seattle, Etat de Washington. Allen n'est pas seulement le co-fondateur de Microsoft avec Bill Gates et l'un des hommes les plus riches du monde. Joueur de guitare, il est passionné de musique rock, et en particulier de la légende du rock Jimmy Hendrix. C'est en sa mémoire que lui et sa sœur décident de construire un musée interactif de 139000 pieds carrés, dont le prix de base est de 100 millions de $, en faisant appel à Frank Gehry, l'architecte le plus révolutionnaire (et apparemment l'un des plus chers) des Etats Unis.
Jimmy Hendrix détruisait ses instruments pendant ses concerts. Les premiers dessins de Gehry représentent des guitares écrasées. L'aspect final du bâtiment évoque les instruments, les voitures, les stars du rock et l'esprit qui animait cette musique, mais les allusions à la guitare ne sont plus littérales. La forme est intentionnellement abstraite, ouverte à l'interprétation. Certains y voient une oreille interne, une molaire géante, un Blob (film d'horreur), voire la topographie de Seattle. On la compare encore à un champignon cosmique. Des témoins disent que le projet ressemble à une hallucination psychédélique, d'autres qu'il aurait dû le rester… Il est en tous cas à des années-lumière en avance de ce qui se construit couramment aux Etats Unis et dans le monde. C'est plus une œuvre d'art qu'un building. L'EMP(Experience Music Project) est ouvert depuis quelques mois et commence à attirer les foules. Le pari d'en faire un centre culturel vivant, de plus en plus actif, semble en passe d'être gagné.
Frank Gehry choisit la forme avant la fonction. Il conçoit comme un sculpteur, des maquettes modelées à la main. Celles-ci, dans une phase précoce, sont modélisées sur CATIA de Dassault Systèmes, que son agence utilise depuis dix ans. Sous son influence, FOGA (Frank O. Gehry Associates) a développé la spécialité de modéliser un projet par l'extérieur de sa forme. Ce dé-constructiviste, qui a beaucoup pratiqué Le Corbusier et les constructivistes, lutte contre le monolithisme en développant des formes irrégulières en cluster dans les grands espaces.
Le "Madonna Wall", or
L'EMP est un univers curviligne, free-form (comme il y a du free-jazz). Des bâtiments en forme de coques asymétriques sont reliés par un monorail comme dans un Luna Park… Un "Sky Church", foyer, place de réunion, "l'Artist Journey", théâtre de réalité virtuelle, des galeries d'exposition, des restaurants, des night-clubs, des studios d'enregistrements ouverts au public…. La surface en vagues de l'EMP, abolit la distinction entre murs et toits.
La peau de l'édifice est constituée de plus de 4000 panneaux d'acier ou aluminium (pas deux identiques). Ils ont été découpés individuellement et mis en forme par ordinateur. L'acier inoxydable léger est pourpre, or et argent, coloré dans un bain d'acide chargé électriquement. L'aluminium est peint en rouge et bleu clair. Le Sky Church est pourpre et le "Madonna Wall", or.
Pour supporter la peau qui a été modélisée dans CATIA, une structure en côtes (comme l'intérieur d'une baleine) est calculée. Chaque côte aura une géométrie différente, pour correspondre aux différents panneaux de surface. La structure finale compte autant d'éléments distincts qu'un building de 70 étages. Les cadres supportant les morceaux de peau sont fixés à un tube d'aluminium de 5 pouces de diamètres au moyen d' ancres d'aluminium extrudés appelés ancres "rock n 'roll"…
Des croquis sur papier, des modèles de blocs ont aidé Gehry et ses clients à comprendre comment le projet se placerait dans le site. Les idées ont été raffinées et des couleurs introduites dans les modèles modelés à la main. Des rendus informatiques ont été rapidement nécessaires pour recorder les formes, produire des plans de construction détaillés, des calculs de coûts. Le rendu ordinateur a permis la création d'un modèle tridimensionnel réaliste de la conception finale, - un véritable prototype virtuel.
Des experts Boeing à la rescousse
Le rôle de CATIA ne s' est pas arrêté à la conception. Des stations CATIA ont été installées par l'équipe d'architectes et les sociétés d'ingénierie et du bâtiment sur le site de construction. Frank Gehry est particulièrement intéressé par l'utilisation des matériaux dans la construction . Il manifeste un respect de longue date aux entrepreneurs du Bâtiment. Il a établi avec eux des relations de travail très étroites pour explorer de nouvelles possibilités d'applications ou des applications limites de matériaux dans ses projets, associant l'équipe de construction à la conception.
Les gens du Bâtiment cependant sont assez conservateurs. L’immeuble était si nouveau pour eux, que des experts de Boeing sont venus travailler sur le site de construction. Lisa C. Wickwire, ingénieur chez Boeing, est devenue le conduit le communication de l'équipe de construction. - "La technologie n'est pas la limite, mais la peur de la technologie", résume Niculaï Tutos, de Dassault Systèmes America. L'équipe de construction a été électrisée par cette double mission impossible. Briser les règles – et courber les lignes droites!
Un robot a été conçu pour courber différemment les 280 côtes d'acier. Le fournisseur du mur rideau a découpé avec un robot, les milliers de pièces différentes qui forment la peau de métal convolutée du building. Sa compagnie A. Zahner Co en est sortie différente, affirme le chef de chantier M. Hoffman.…" C'est la géométrie la plus complexe que nous ayons essayé de construire". Ce fut un apprentissages douloureux, mais les sous-traitants, devinrent à leur tour de farouches partisans de la construction intégrée par ordinateur."CATIA a une puissance graphique bien supérieure en solide et en surface à Autocad 3D. De plus, le logiciel
permet de rattraper les erreurs pendant la construction même," explique Jim Glymph, responsable CAO de FOGA.
"Des formes qui ne sont pas le cube classique"
Neculai Tutos est responsable chez Dassault Systèmes America de l’AEC (Architecture Engineering Building). Il collabore depuis 10 ans avec Frank Gehry :
" Frank a montré à ceux qui pensaient que CATIA, outil de conception d’avions ne pouvait s’appliquer aux bâtiments avaient tort. Le logiciel permet de maîtriser les géométries complexes et facilite l’introduction de formes qui ne sont pas le cube classique.
Seattle a été terminé l’an dernier. Nous étions en contact permanent avec le bureau de Frank, et fournissions tout ce dont ils avaient besoin - nouveaux matériaux, nouvelles formes. Les modules de Surface Modelling et de Structural Design ont été les plus utilisés - pour les analyses et itérations de la forme à la structure et de la structure à la forme.
CATIA possède en plus des outils puissants de conception mécanique des buildings, comme la climatisation.
Pour connecter la conception avec les équipes de construction, Enovia Portal a été utilisé.
Frank Gehry utilise 25 postes CATIA, et les sous-traitants beaucoup plus.
Ce n’est pas la peine d’être nombreux pour faire la révolution. Le bureau de Frank Gehry est petit. C’est une petite organisation qui est en train de changer le monde de l’architecture."
Frank Gehry a d'abord utilisé CATIA pour réaliser un abri bus pour la ville de Hanovre. Puis il y eut, le célèbre Musée Guggenheim de Bilbao, des édifices à Prague, le Disney Concert Hall, en Californie. Prochain projet, le MIT(Massachusetts Institute of Technology) Project à Boston, tout à la fois "Environmental Virtual Campus" et "Centre for Computer Information and Intelligence Sciences" qui doit être terminé en 2003.
Pour compléter, je propose d'aller en chercher sur Internet :
* Seattle Times
* Great Buildings
* Seattle Insider (** ce lien ne fonctionne plus en 2014).
(Ces sites valent vraiment la visite…)