Les actuelles technologies de l’information et de la communication (TIC) sont le produit des activités de recherche tant fondamentales qu’appliquées qui relèvent du champ des associations de chercheurs que fédère l’Asti.
Qu’ils soient promoteurs ou critiques, les discours majoritairement tenus sur ces technologies n’hésitent pas à souligner l’impact sociétal des TIC soit pour en magnifier les bénéfices, soit pour s’inquiéter de leurs effets pervers, parfois sans même qu’une évaluation d’impact puisse être menée en raison notamment des insuffisances des instruments de la statistique économique et sociale.
Dans une société fondée sur l’information et sur la connaissance, l’autonomie revendiquée par le chercheur (au sens de l’ « Aufklärung » chère à Pierre Bourdieu) dans le processus d’accumulation des connaissances devrait idéalement s’orienter vers la demande sociale pourvu que cette dernière puisse s’exprimer et que l’administration de la Cité pourvoit à sa satisfaction. Pourtant, à regarder les choses de plus près comme ont pu le faire les recherches tant en économie qu’en sociologie de l’innovation ces dernières décennies (cf. par exemple les travaux de Callon et de Latour, ceux de Flichy ou de Pavitt pour ne citer que les plus connus), on arrive à la conclusion que les chemins de l’innovation technologique s’avèrent moins linéaires et plus tortueux que ne le laissait entrevoir la théorie ou l’idéologie. Force est de constater que les conclusions de ces travaux restent largement ignorés par la vulgate des discours, qu’ils soient professionnels ou médiatiques.
S'appuyant sur l'expérience du Séminaire informatique, réseaux et société co-organisé depuis 1999 par certains membres de l'Asti (Creis, AILF) avec d'autres associations (Iris, Vecam, revue Terminal) et reprenant leur démarche d'exploration et de confrontation (cf. http://www.terminal.sgdg.org/navigation/fr/seminaire.html pour la thématique des séminaires) pour en élargir les perspectives et l’audience, le séminaire « Sciences sociales » se propose d’ouvrir les questionnements des chercheurs en sciences sociales sur les TIC à une confrontation multidisciplinaire au sein de l’Asti réunissant chercheurs, doctorants, praticiens, professionnels, administrateurs, gestionnaires, et associatifs désireux de mieux comprendre l’innovation en actes dans le secteur qui les concerne :
- comment s’exprime la demande sociale en matière de TIC, comment la définir, en préciser les contours ?
- comment mesurer l’impact d’une technologie particulière au plan économique et social, comment améliorer les outils statistiques ?
- rétrospectivement que penser des exercices de prospective menés dans le secteur des TIC ?
- comment analyser le financement et le fonctionnement de la recherche fondamentale et appliquée dans le secteur des TIC ?
- quelles sont les instances de régulation des recherches menées dans le champ des TIC et comment analyser leur fonctionnement ?
- sous quelles conditions, la recherche publique ou privée pourrait-elle se prévaloir dans le champ des TIC d’une certaine «légitimité» économique ou sociale ?
- quelles sont les formes de médiation/négociation émergentes entre les mondes de la recherche, de la production ou des médias et la société civile ?
Le séminaire serait programmé semestriellement autour de thématiques particulières déclinant les points de vue proposés à partir de réunions mensuelles où un voire deux conférenciers issus du secteur des sciences sociales (droit, économie, sociologie, géographie, histoire, psychologie, etc.) présenteraient leurs travaux sur l’innovation technique dans le secteur des TIC pour les confronter à l’expérience des praticiens de la recherche.
Une formule alternative pourrait voir se succéder un conférencier du secteur des TIC décrivant l’état de l’art dans un domaine particulier auquel pourrait succéder un conférencier des sciences sociales apportant un éclairage documenté sur l’impact sociétal des technologies développées, exposés susceptibles d’être discutés par des représentants qualifiés de la société civile ou des médias.
Les conférences du séminaire feraient l’objet d’un projet éditorial fédérateur (publication de résumés ou d’interviews dans Asti-Hebdo, dossier spécifique dans la revue Terminal, édition électronique des actes du séminaire) venant prolonger le cycle semestriel, en fonction de l’intérêt suscité.
Pierre Berger et Dominique Desbois