Stic-Hebdo |
No 29. 4 octobre 2004
Sommaire : Trois questions à Paul Maillot, Business-Models| L'actualité de la semaine | Théories et concepts | Enseignement | Dans les entreprises et les administrations | Manifestations | Détente
"La société que j'anime a au contraire la volonté d'aller vers l'amont, vers des innovations de rupture."
Stic Hebdo : Quels sont les thèmes qui vous paraissent aujourd'hui intéressants pour un investisseur qui se qualifie lui-même comme "vecteur de réussite des start-up"
Paul Maillot : Nous nous intéressons à des projets qui ont une dimension stratégique, pas à des détails ou à des gadgets. Nous cherchons des innovations qui soient vraiment une rupture par rapport au marché, au secteur économique, voire aux technologies en cours. Et nous voulons que ces innovations apportent de la valeur au consommateur, au client final, à l'utilisateur si vous voulez. Enfin, nous ne prenons pas de projets qui nous confronteraient à de très grands acteurs déjà bien installés, ou simplement qui exigeraient des capitaux et des délais de retour sur investissement trop importants.
Quant aux secteurs, nous privilégions le thème "société de l'information" au sens large et plein du terme. Il peut s'agir aussi bien d'outils pour le musicien ou de jeux "richmedia massivement multi joueurs sur Internet" ou d'outils pour le musicien que d'outils de moyens de recherche sur la Toile ou pour la sécurité. Il y a des promesses considérables du côté de la vraie mobilité, du sans fil : au delà du portable, la panoplie des transmissions wireless ouvrent sur le bureau mobile, l'électronique embarquée, les nouvelles formes de domotique (digital home), le pervasive (ou ambient) computing...
Et, en termes de secteur, nous visons par exemple le secteur de la santé. C'est un secteur difficile, en particulier en France, parce qu'il est la croisée des chemins, qu'il recoupe beaucoup de liens. Mais il est à mon sens appelé à être d'autant plus novateur qu'il na pas encore été véritablement touché en profondeur, c'est à dire par exemple dans ses processus de "production opérationnels", par la vague des nouvelles technologies de l'information.
Plutôt que la gestion, hospitalière par exemple, nous visons les nouvelles approches : télémédecine, télésurveillance médicale, médecine proactive et simulations, assistance aux personnes âgées, suivi automatique permanent et simple des paramètres physiologiques majeurs/pathologies en toutes circonstances (supposant de nouveux capteurs et biochips), suivi automatique personnalisé des dossiers médicaux et fouille de données, etc. Il faut s'attendre ici à des percées, des avancées impressionnantes tant conceptuelles que pratiques.
Nous considérons comme cruciale la montée des open systems, et nous notons que de très grands acteurs y investissent massivement. Les limitations structurelles que nous rencontrons encore seront dépassées par l'émergence de nouveaux modèles économiques, comme le titre même de notre entreprise le suggère. L'exemple de Red Hat, si son succès se confirme, montre que le succès est à la rencontre de deux pistes :
- des modèles d'affaires qui combinent une offre libre et une offre (si je puis dire) non libre, cette combinaison débouchant sur une valeur ajoutée pour l'utilisateur final,
- des offres de service autour de cette offre combinée
S.H. Bénéficiez-vous de travaux de recherche sur ces nouveaux modèles économiques ?
P.M. A chaque fois qu'il y a rupture technologique, il y a un ébranlement du schéma productif et de commercialisation antérieur. Et la montée des standards en informatique est une telle rupture, qui concerne directement la communauté des chercheurs. Car, comme l'a dit récemment Linus Torwald, le modèle du logiciel livre va s'imposer dans de nombreux domaines (en particulier les infrastructures), parce qu'il relève de la même démarche que la démarche scientifique. Le monde de la science est quelque chose d'ouvert : vous trouvez, vous publiez, vous êtes critiqué par vos pairs, vos concepts s'enrichissent et tout la communauté avec vous. Et le plus étonnant est qu'un tel modèle ait prouvé son efficacité sur un produit comme un système d'exploitation, produit extrêmement complexe et exigeant beaucoup de maintenance.
Mais un large fossé sépare nos laboratoires français de la vie réelle, des besoins comme des stratégies de mise en place de l'innovation dans cette vie réelle. Ce fossé n'a rien d'inéluctable. Je crois que l'industrie pourrait le réduire considérablement, pour le plus grand bénéfice de tous à commencer par les chercheurs eux mêmes, qui auraient la satisfaction de voir leurs travaux déboucher. L'incontestable compétence et le dynamisme de nos laboratoires doit être focalisée sur les points qui ont les meilleures chances de créer de la valeur pour l'utilisateur final. Et donc de se transformer en succès stratégique durable et rentable.
Pour répondre plus précisément à votre question, nous ne mettons pas en oeuvre explicitement des modèles économiques élaborés dans des laboratoires. C'est nous, si l'on peut dire, nous les entreprises, qui sommes à proprement parler les chercheurs et les expérimentateurs dans ce domaine. Cela dit, je sais, pour y avoir participé, que certains travaux ont été menés par exemple au laboratoire de sciences économiques de Polytechnique.
S.H. Est-il encore raisonnable d'investir, après l'éclatement de la bulle Internet ?
P.M.. Certes, il y a eu des phénomènes "parasites" transitoires. Quand tant de gens, dont beaucoup de néophytes mais aussi des professionnels, découvrent en même temps des possibilités jusque là impensables, il y a emballement. On a connu cela avec les canaux et plus encore les chemins de fer : les mêmes phénomènes d'emballement suivi d'effondrement, puis de reprise, et de reprise forte. En fait, aujourd'hui, nous sommes allés au delà de ce qu'imaginaient les visionnaires au début des années 1990. Et cela va continuer, parce qu'il y a encore beaucoup à attendre au niveau des composants (matrice de tous les progrès, ou presque) et surtout parce que les grands et les petits acteurs ont compris l'importance des standards et de l'ouverture, et que les standards ouvrent des marchés.
En France, il ne manque pas de personnes désireuses d'investir dans l'innovation. Et l'on peut attendre beaucoup (s'il est effectivement suivi d'effets, ce qui reste à démontrer) de l'accord récemment signé entre le ministère des Finances et les assurances, pour élargir vers l'innovation les classes d'actifs où elles peuvent placer leurs réserves (massivement constituées d'obligations et d'immobilier selon le code des Assurances, régi par Bercy). D'un strict point de vue de technique financière, cette diversification des placements devrait globalement fiabiliser leurs placements.
Mais, en France, les sources de financement (pour ce qui est des capitaux propres, si indispensables) ne s'intéressent aux entreprises qu'à partir du moment où elles ont décollé, qu'elles ont déjà un certain chiffre d'affaires. Les canaux allant vers les phases amont de la création et de l'industrialisation sont atrophiés. Paradoxalement, des formules comme les FCPI s'en sont détournées pour une large part. La société que j'anime a au contraire la volonté d'aller vers l'amont, vers des innovations de rupture. Mon courriel est donc ouvert aux équipes qui ont des projets vraiment innovants et d'envergure, même si elles sont encore dans les phases amont de leur démarche.
Propos recueillis par Pierre Berger
Lle message conjoint (Unesco, OIT, PNUD, Unicef) à l'occasion de la
Journée mondiale des enseignants du 5 octobre , se résume à
un "bravo et merci". Il était en faveur des nouvelles technologies
à la précédente édition, il y a trois ans, comme
en témoigne cet extrait : " Le bon enseignant est celui qui guide
les apprenants dans le formidable dédale des connaissances aujourd'hui
disponibles et qui leur montre comment bien les exploiter et les communiquer.
Ce sont là de lourdes responsabilités dont ne peuvent s'acquitter
que des professionnels dévoués ayant reçu une formation
adéquate. ...
Ils doivent aussi contribuer à adapter les nouvelles technologies au
processus éducatif dans un monde où ces technologies, qui devraient
en principe contribuer au renforcement des capacités, risquent au contraire
d'aggraver les inégalités.
En tant qu'agents de popularisation de la technologie, les enseignants peuvent
en effet contribuer à réduire la fracture numérique et
ses effets négatifs sur le développement tout en améliorant
les perspectives professionnelles de leurs élèves. "
Le site de l'Unesco.
Programme détaillé et inscriptions
Rubrique animée par Jacques Baudé
Pour les manifestations TIC en rapport avec l'enseignement et la formation, consulter le site Educnet.
L'Afscet organise, conjointement avec AE-MCX et APC, une manifestation pour rendre hommage au fondateur de la seconde cybernétique : Heinz von Foerster. Elle se déroulera le 26 octobre 2004 à l'Université Paris VII à partir de 13H 45.
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