Zéro-Un Informatique. 1967-70

Le cadre

Au Sicob de 1966, au moment de sortir, j'avise le petit stand de 0.1. Informatique (sous l'escalier près d'une sortie). A l'époque, c'est un petit mensuel qui en est à peu près au numéro 4. Je m'enquiers des prix d'abonnement, les déclare excessifs par rapport au prix des revues américaines, me plains de ne pouvoir obtenir de spécimens gratuits... je m'obstine tellement que le fondateur Pierre-Jean Réfrégier, assis au fond du stand, vient voir qui est cet énergumène. Il me demande pourquoi je tiens tant à avoir ces numéros, puisque ce n'est pas mon travail. Faute d'abonné, il flaire le pigiste, et me propose de prendre les spécimens que je veux à condition de lui envoyer deux ou trois critiques de livres, notamment Le Littératron d'Escarpit et Paradoxes de la conscience et limites de l'automatisme de Raymond Ruyer.

Mon style doit lui plaire. Ou simplement il profite d'une occasion à une époque où les connaisseurs de l'informatique sont encore rares, et peu poussés vers la presse. Il me propose un contrat à forfait: il me paiera une page à chaque numéro. Si j'en fais plus, il me paiera au nombre de pages, si j'en fais moins, il me paiera une page quand même. Génial. Presque choquant pour moi : il ne m'était pas venu à l'idée d'être payé pour faire connaître mes idées.

Soucieux de fournir ma page à chaque numéro, plus ou moins mensuel, je finis par trouver la charge un peu lourde, et envisage d'abandonner. Mon père me dit "Ce n'est pas mal. Tu ferais un bon journaliste". Moi : Pas question, c'est un métier de sauteur, pas sérieux..." ...

Mais, entre temps je commence à m'ennuyer un peu à La Foncière. J'ai refusé le poste de "chef programmeur" que me proposait mon patron et parrain René Pauly. Après bien des hésitations, encouragé par Marie-Thérèse, je finis par sauter le pas. Ce n'est pas très raisonnable, même à cette époque où le travail ne manque pas comme à la fin du siècle : alors que je suis marié et père de famille, je démissionne d'un poste sûr pour me lancer dans un métier complètement nouveau, et sur un secteur encore très étroit à l'époque, et dans une petite entreprise. Mais je ne l'ai pas regretté par la suite !

Rencontres avec Pierre-Jean Réfrégier, rédacteur en chef.  Je doute. Il vient déjeuner à la maison avec mon père, déjeuner avec lui et Clément Pillerault sur les boulevards.

A partir ce moment, l'informatique devient mon souci, mon occupation et le pain quotidien de ma petite famille. A mon grand regret, l'ordinateur reste trop cher pour que je puisse programmer moi-même. Impensable de toutes façons. De plus à l'époque, on programme par bordereaux, peu adapté à travail personnel

Belle rencontre de presse à l'Oustau de Baumanière (aux Baux de Provence), par Syseca. Les conjoints sont invités.

Le journalisme, un métier

Maurice Réfrégier, propriétaire des Editions Tests,  et le responsable de la publicité, regardent le premier (ou un des premiers) 0.1. Hebdo.

Avec Clément Pillerault, nous répondons à l'appelle de De Gaulle (image prise dans Internet).

Après les émois et les incertitudes d'un nouveau métier, très vite "je m'éclate", comme on dit dans les années 2000. Je dis à des amis "Si j'étais rentier, je paierais pour faire ce métier". Pensez : les fournisseurs m'invitent à leurs conférences de pressse, on des attaché(e)s de presse aux petits soins ; les éditeurs envoient gratuitement tours leurs livres. Quel contraste avec mon vécu à La Foncière !

C'est excellent pour la vanité personnelle. A un de mes premiers déplacements, pour un colloque scientifique (à Vauhallan), avec des célébrités comme de Possel ou Schutzenberger, je suis intimidé... jusqu'au mot d'ouverture ou le président lance en se tournant vers moi : "Et je remercie la presse professionnelle d'être venue participer à cette rencontre".

D'un point de vue déontologique (je m'en étais assuré préalablement, mais connaissais mal les usages), je suis frappé par le beau courage de notre direction comme de tout l'encadrement et la doctrine de la maison.

Que ce soit le patron Maurice Réfrégier, son fils Pierre-Jean ou le rédacteur-en-chef de la revue d’électricité Clément Pillerault : la doctine est claire : les journalistes écrivent ce qu’ils pensent devoir écrire et n’ont pas à faire plaisir aux annonceurs, ni même à se sentir tenus, après un beau voyage, d’en faire des compte-rendus élogieux. La seule chose qui compte, c’est l’intérêt du lecteur.

J'en garderai de fermes habitudes que mes employeurs ne contrarieront qu'exceptionnellement (et le pire sur ce point, sera moi-même, quand les faiblesses financières de Noosphère ne me permettront pas de jouer les petits soldats).

Clément Pillerault : "Hélas, on est bien obligé de faire les journaux avec des journalistes".

Je serais plutôt gêné par le luxe qui souvent nous est offert, dans des voyages de presse qui, parfois, visent plus à nous distraire, sinon à nous compromettre, qu'à nous faire vraiment travailler. En particulier les grandes "réunions utilisateurs" qu'organisent certains fournisseurs (Venise avec Olivetti, Djerba et Istamboul avec Cap-Gemini...), d'autant plus facilemnet qu'à l'époque, le fisc ferme les yeux sur ces dépenses. Mais on ne m'a jamais proposé de chèque pour écrire un article favorable. Ni même d' "oreiller garni", comme cela se pratique (ou se pratiquait ?) paraît-il assez couramment. Une seule fois, en trente ans, une attachée de presse, n'arrivant pas à m'intéresser à son produit, m'a lancé au téléphone "On dit que je suis très jolie, voulez-vous venir vérifier ?".

Mais c’est un grand plaisir d’être invité par des gens com)étents, par exemple à Vauhallan plutôt, avec Schutzenberger,  de Possel...).

Les jeux de pouvoir du journaliste. Lle métier : on s'exprime moins que je ne pensais, on n'est pas considéré comme un expert

Le jeu avec les attaché(e)s de presse : Mme Pavard, le JO et les JO d’hiveri , Caillon et mon premier  Voyage aux Etats-Unis.
Nico (prince Nicolas Tchavatze). La boite de Neuilly.

Relations avec la publicité

La culture "édition" héritée de mon père m'est utile. Mais évidememment, en matière de presse, j'ai beaucoup à apprendre. Après un an, on me laissera savoir que Maurice Réfrégier, le chef de l'entreprise (lui-même passionné de presse, élève de Lazarefff) a dit "C'est un bon journaliste" (A la suite d'un article, assez critique, sur l'installation d'un lecteur optique à la Caisse des Dépôts).

J'ai aussi quelques petites inquiétudes au niveau de mes compétences en informatique. Je suis rapidement rassuré, tant pour de mauvaises que pour de bonnes raisons. Quelques anecdotes.

- Le groupe pétrolier Schlumberger annonce des machines spécialisées (convolveurs) qu'elle veut commercialiser après les avoir développées pour ses propres besoins (modélisation des réservoirs). S'agissant de calcul technique, et pour une de mes premières conférences de presse, je suis dans mes petits souliers. Je m'assieds à côté d'un confrère qui a l'air tout à fait sérieux. Présentations. "Et toi, tu es là pour qui ?". "Pour 0.1. Informatique". "Ah, au moins toi, tu vas y comprendre quelque chose".

- On me confie la réécriture d'un article sur la gestion des stocks. Ici encore, légèrement au dessus de ma limite d'incompétence. Par bonheur, j'y trouve quelques erreurs flagrantes, ce qui me permet de dialoguer avec l'auteur sur un terrain d'égalité. Comme il a envie d'être publié, et moi plein de bonne volonté, nous nous sommes très bien entendus, et j'ai tout à fait assimilé ce qu'est un lissage exponentiel. En fait une excellente introduction à la gestion par algorithmes, comme on dirait en 2019.

Assez rapidement, je m'aperçois que mes lectures m'ont conduit à un niveau suffisant pour ce qu'on me demande de faire. Et qu'en outre j'ai une compétence que n'ont pas les autres journalistes : j'ai été d'abord un utilisateur dans une (relativement) grande entreprise. Je sais donc ce qui se passe chez les clients, sur le terrain. Et les "avis d'experts" ne m'impressionnent donc guère. Cela suprend parfois mes collègues et collaborateurs, mais je me trompe rarement.

Tout n'est pas rose tous les jours. Clément Pillerault, un des directeurs, commente : "Hélas, on est bien obligé de faire les journaux avec des journalistes". Je m'aperçois (et.ou on me fait comprendre) aussi qu'un journaliste professionnel, à la différence d'un intervenant extérieur dans un journal comme l'Argus des Assurances, n'est pas payé essentiellement pour donner son avis sur tout et rien, mais pour rendre compte honnètement et lisiblement des événements et informations qu'on lui donne, quitte à les compléter et à la vérifier, ou à enquêter. Et aussi, pour passer une bonne part de son temps à réécrire des articles venant de l'extérieur (pigistes, scientifiques, services de presse). Le métier est plus ancillaire qu'il n'en a l'air.

Je souffre aussi de la fugacité des publications dans une revue professionnelle, a fortiori un hebdomadaire. Sitôt lu, sitôt oublié. Là-dessus, Internet apportera de profondes satisfactions : le temps réet ET l'éternité.

Et la signature plus encore que le contenu (?). C'est très exceptionnellement (cinq ou six fois peut-être en trente ans) qu'on me dira "Ah, je suis content de faire votre connaissance, vous qui avez écrit cet article, qui a changé ma façon de voir ... ".

Le métier qu’il me fallait

La carrière journaliste a été idéale pour mon profil En effet c'est un métier :

- 1. on est, de toutes façons, toujours en décalage par rapport à ses interlocuteurs; en particulier, étranger à leur échelle sociale ; Sandrine m'a dit un jour "Tu nous a expliqué que tu étais aussi  l'aise avec un concierge qu'avec un PDG, et que tu pouvais les traiter de la même façon. La vie m'a appris que, en général, c'est un très mauvais comportement".

Mais effectivement, pour un journaliste, un concierge ou une secrétaire sont souvent plus utiles qu'un PDG ; notamment parce qu'ils ne formatent pas leur communication autant que les patrons ; en tous cas les patrons de grosses boites ; avec les petits patrons, c'est parfois génial, parfois dingue, parce qu'ils ne comprennent pas du tout ce qu'est un journaliste, alors   . tantôt ils te prennent pour un publicitaire, et ils veulent contrôler que tu racontes juste ce qu'ils veulent . tantôt ils te prennent pour un confessseur et t'expliquent toute les faiblesses de leur entreprise voire leurs mésaventures amoureuses -.tantôt ils ne veulent même pas te voir du tout.  

Dans une grosse boite bien organisée, le journaliste est canalisé d'une manière à la fois agréable et assez efficace pour lui... jusqu'à une limite bien définie ;  un couloir de velours à l'intérieur d'une gaine d'acier. C'était très impressionnant chez IBM en particulier. Nettement moins chez Bull (où une fois, passant à l'heure de midi, les bureaux vides, et ayant dit que je cherchais de la documentation, le concierge m'a emmené dans un local où il y avait des rayons entiers de doc "diffusion restreinte". Je n'ai pas abusé, mais j'en ai profité quand même.

- 2. les diplômes ne comptent pas, si on est doué pour le métier (facilité d'écriture, goût de la nouveauté permanente, voire de la provoc.). Si j'étais resté dans l'assurance, et a fortiori dans l'informatique, j'aurais été assez vite bloqué, ne sortant ni d'une Grande Ecole ni d'une fac. de droit.   Evidemment, j'ai souffert de ce décalage, même avec mes collègues journalistes , car j'avais des préoccupations théoriques qui leur étaient étrangères. Préoccupations
- parfois excellentes parce qu'elles me permettaient de voir de de prévoir bien au delà de ce que me racontaient mes interlocuteurs ; là, j'ai parfois, en un éclair, fait des sauts dans l'avenir que mes collègues comprenaient tellement peu qu'ils ne voyaient même pas l'importane qu'elles avaient; le plus fort a été en 1997, quand j'ai compris la portée d'Internet, et leur ai dit que le métier allait profondément changer, et que si j'étais plus jeune, je changerais de métier le plus vite possible ; certains n'ont compris que vers 2005,quand ils ont reçu leur lettre de licenciement  

- parfois dangereuses, car j'avais tendance à croire tout ce qu'on voulait, pour peu que cela aille dans le sens de mes théories du moment.   Et bien,entendu, j'aurais bien aimé que mes travaux théoriques soient reconnus par le milieu universitaire. Mais, pour ce monde là, j'ai toujours été un "candide" (je cite). Pour y entrer, il aurait fallu que je me lance par exemple dans un doctorat, y étant admis sur dossier. Mais, même comme cela, c'est un milieu assez fermé à ceux qui ne viennent pas du sérail. J'ai vu des centraliens et des X , quittant une carrière d'ingénieur en entreprise pour devenir profs de fac. avoir un mal fou à faire leur trou.

 

L'environnement technologique

Des années 1950 à 1980 environ, le Sicob est la grande rencontre annuelle de l'informatique et des technologies de l'information en général. La grande voûte triangulaire du Cnit trône en majesté,avant d'être d'abord enterrrée par le RER, puis entresolée pour devenir principalement un centre commercial.

Photocopie, au début lente, rare chère
fax ? Telex, AFP (pour concurrencer Sidier).
La machine à écrire.
Contacts directs par téléphone, conférence de presse, et papier (communiqués).

La chaine éditoriale
maquette faite à grands frais par un extérieur
essais avec Varityper pour le cahier d'actualité
les journalistes écrivent à la main en général
compo plomb à la Linotype. On ne peut pas jouer sur les corps, à peine sur les italiques
Maquette très précise fait par un ami de Pierre-Jean
cello, relecture, placards, montage, puis offset
bichro/cahier couleur

En 1979, les micro-ordinateurs commencent à viser le grand public. Mon groupe de presse (Tests) lance "L'ordinateur individuel"

la bureautique

Le logiciel
les grandes machines, mais aussi des terminaux, le time-sharing
il y a des services. Va de soi, en quelque sorte
nous mêmes à 01 utilisons les services

mes méthodes d'analyse
Inforsid.

Déjà des minis, le voyage Bull autour du G55 en 1969.

Zéro-Un se lance alors dans une aventure qui ne se renouvellera qu'une fois : la création d'un annuaire des utilisateurs de l'informatique. Ce travail m'est confié, combinant une enquête dans le journal avec des fichiers récupérés par un commercial de Bull, ami de la rédaction.
Pour la saisie des données du Scope , nous utilisons une technique originale (et éphémère) dans le domaine de la saisie des données: la perforation de ruban avec un terminal Télex

 

 

Mes idées

C'est vers 1963 que je commence à élaborer une réflexion plus originale sur le thème qui sera le coeur de ma réflexion pendant tout le reste de ma vie : la montée de l'informatique, de la digitalisation, et ses conséquences de tous ordres, pour l'économie comme pour la philosophie et pour l'art. Et, comme utilisateur à La Foncière puis comme journaliste, je vais en devenir à la fois un spectateur passionné et un acteur engagé. Sur la portée de mon engagement, il est difficile de le mesurer. Aucun de mes articles, à ma connaissance, n'a eu les effets radicaux de "Safari, ou la chasse aux français"...

Je ne peux évidemment pas prétendre à l'objectivité. Du moins mes lecteurs peuvent-ils se reporter à mes écrits, qui sont, eux des "faits" aujourd'hui indépendants de l'idée que je m'en fais. Une partie d'entre eux sont disponibles sur ce site (pointeurs ci-dessous). D'autres sont accessibles dans les bibliothèques qui disposent des publications auxquelles j'ai collaboré.

En me relisant aujourd'hui (novembre 2010), il me semble qu'il y a un quelques constantes dans ma réflexion et mes écrits.
- La conviction que l'informatique va se développer, se généraliser (c'est seulement vers 1971-72 que j'ai des doutes sur ce point, et que je me demande si une informatique "mûre" ne va pas diminuer sensiblement l'intérêt d'un journaliste qui lui soit consacré). C'est le volet prospectif de mes réflexions. Globalement, je vois assez bien les grandes orientations, mais je fais un certain nombre d'erreurs :
. souvent par sous-estimation des délais nécessaires à la diffusion d'une technologie (typiquement : au début des années 1980, je pense que le Fax va être très vite supplanté par la messagerie, alors qu'il a pratiquement devant lui vingt bonnes années ; d'une manière plus générale, en ce qui concerne l'intelligence artificielle)
. parfois en me laissant entraîner par mes théories aux dépens de l'observation concrète.

- Le sentiment que je dois mettre ma plume au service d'une informatique maîtrisée, au service de l'homme (et, tant que je serai croyant, s'inscrivant dans une perspective chrétienne). C'est une des raisons qui motivent mon passage au journalisme. D'où le caractère souvent moralisateur de mes textes.

- Par conséquent, la lutte permanente contre le caractère fondamentalement a-moral du capitalisme, et en particulier d'IBM, qui joue un rôle considérable non seulement sur le plan économique mais idéologique jusqu'aux années 1990.

- Et un appel constant au monde de la recherche pour qu'elle les outils intellectuels et techniques de cette maîtrise. Malheureusement, je prêche presque toujours dans le désert. En effet :
- les constructeurs restent dans leur logique capitaliste et se gardent bien de soutenir sérieusement des recherches qui freineraient plutôt qu'autre chose le développement de leurs affaire (typiquement, histoire de la méthode De Blanpré, Axial contre Merise, etc.);
- les sociétés de service n'investisent pas dans la recherche (voir notamment l'interview, très tardive dans ma réflxion, de Roland de Conihout)
- les universités voient essentiellement l'informatique comme une branche, et une branche subalterne, des mathématiques ; de toutes façons, le fonctionnement universitaire, avec ses thèses, ses publications et ses congrès, ne permet pas le type d'approche expérimentale à long terme qui aurait été nécessaire (voir, ici encore, l'interview très tardive du chercheur suisse sur les méthodes d'analyse).

On peut distinguer (sans vouloir donner trop d'importance à ce type de "périodisation") plusieurs époques, correspondant sensiblement aux décennies successives.

Mes réalisations technologiques

Mon bureau à mes débuts à 0.1. Avec la machine à écrire que j'avais achetée au Congo.

Mon système d’information personnel.
Rangement de la photothèque Alarcen.  
conservation méthodique de mes doc (feuilles de paie, impôts, photos, agendas).

Mon aptitude à la frappe est désormais un atout apprécié. Au fil des ans, j'essaie de me doter d'outils bureautiques (le mot n'existe qu'à partir de 1977). Par exemple un composeur de numéros de téléphone à cartes perforées (spéciales, pas le modèle mécanographique). Assez efficace. Mais qu'on est loin du téléphone d'aujourd'hui !

 Mes idées

J’ai conçu dès l’origine mon travail de journaliste en informatique dans une optique de “bien se servir de l’informatique”. Un de mes premiers grands papiers le dit explicitement

Je me suis battu ensuite (Voir mes combats ).
- sur les menaces pour la vie privée (qui débouchera sur la loi de 1978)
- sur les conditions de travail dans les services informatisés
- pour l’informatique “répartie”   (contre une informatique trop centralisée)
- pour le downsizing
- pour Internet, d'une ceraine façon

Je prends ici, rapidement et un peu en avance sur mon milieu (notamment sur le comité de rédaction d'Informatique et Gestion), une position "post-moderne", dont des auteurs comme Bruno Lussato ou Jean-Louis le Moigne se feront les théoriciens,

De même, je crois qu'il est erroné de lier étroitement la naissance de l'informatique à la recherche militaire, dans le cadre du projet Manhattan de la bombe atomique. Certes, les besoins particuliers et les crédits quasi-illimités dont ont bénéficie de projet ont joué un rôle majeur. Mais les autres grands créateurs de l'informatique n'avaient rien de militaire. Et, depuis longtemps, l'armée n'est plus le principal client d'Intel!
Applications et gestion autant que technique.
Je découvre les aspects stratégie et méthode, par exemple avec l'article " mécaniser ou intégrer" d'E E Bourrouillou),
La gestion de stocks (avec Boutel) et la RO (avec Eugène)

Deux aspects
- informatique = ordinateur, programmation
- informatique = SI, personne sait trop, sinon les gens des méthodes (Mallet, Martzloff)

Combattre

- pour la participation des utilisateurs et des syndicats aux stratégies informatiques des enterprises
- pour le “downsizing” (contre les mainframes propriétaires)
- pour l’industialisation des services (là, j’ai talement perdu la bataille).

Leur histoire, et ma participation à leur développement

Nos libertés face à l'informatique, dictature ou démocratie nouvelle . (0.1. Informatique, 1967). Inspiré par un article de Computer Automation, qui est plutôt un reportage sur les utilisations de l'ordinateur par la police. Je fais une grande envolée en généralisant sur la démocratie en général. Un papier nettement en avance sur l'état des esprits. Quelque naïvetés, ou espoirs qui ne se sont pas confimés. Assez corrrecte anticipation, en revanche, de la loi de 1978).
Ma position est nettement, comme toujours, à la fois audacieuse dans la prévision, et attentive aux dangers, et surtout poussant à des solutions créatives. De ce dernier point de vue, les idées que j'expose ne seront que très partiellement suivies par la suite.

Une_ame qui bouge (Nouvelle inédite, 1969 ). Idée de base : dans l'avenir, les gens normaux ne ciruleront plus. Bouger, c'est être dans la police... ou dans la contestion. C'est mon premier essai de romancier. Il sera sans suite, vu les avis très négatifs de mon environnement. J'ai pourtant travaillé mon style et cherché une consctrution aussi bien dans le déroulement que dans les bases techniques.

Là, j'ai fait un pas conceptuel assez important. C'est déjà, quelque 20 ans avant la création du Club, un Hypermonde. Certes je ne parle pas d'Internet, mais c'est exactement comme s'il existait. Je pense avoir été en partie inspiré par Le Meilleur des Mondes, de Huxley, notamment avec cette idée qu'il existe des sortes d'espaces relativement isolés où les "déviants" peuvent se développer sans perturber l'ensemble du système.

Il y a aussi un côté oecuménique dans le propos, dans la mesure où le monastère traditionaliste joue un rôle de passeur pour le progressiste vers un univers différent.

Je ne crois pas que d'autres auteurs de SF aient traité de ce thème. Il y a quand meme l'Asimov des Caves of Steel.

Marcel me prête La Pléiade. Je parle de Church/Gödel à Jo Cohen qui se marre.

Le rôle de l'Etat

Il y a un grand moment, en France, où une approche ambitieuse, expérimentale et maîtrisée a semblé pouvoir s'imposer au plus haut niveau : c'est la publication, pousse par Giscard d'Estaing, du rapport Nora-Minc. D'où débouchera la télématique française, avec son heure de gloire... et ses lendemains qui déchantent

Religion

Pour moi, c’est l’heure des les engagements professionnels et familiaux. Ce n'est plus l'heure des hésitations. Marie-Thérèse et moi trouvons tout normal de transmettre notre foi à nos enfants. Seul Cyril sera tout de suite réfractaire. Tout en admettant qu'il y a quelques problèmes, nous espérons toujours qu'il y aura convergence entre la foi et la raison, entre gauche et droite, entre bourgeois et ouvriers, entre ex-colonisateurs et pays en émergence.

A Saint Jean Baptiste de Belleville comme à Saint Nicolas de Maisons-Laffitte, nous sommes de bons paroissiens actifs, voire militants, et ne nous posons pas trop de questions, cherchant simplement un bon équilibre entre des positions trop progressistes ou trop traditionaliste. Nous espérons toujours que le Vatican reviendra un jour sur son refus de la contraception et de l'avortement, sur le célibat des prêtres et l'accès des femmes aux ordres sacerdotaux.

 

De ce point de vue, la carrière journaliste est idéale pour mon profil En effet c'est un métier :

- 1. on est, de toutes façons, toujours en décalage par rapport à ses interlocuteurs; en particulier, étranger à leur échelle sociale ; Sandrine m'a dit un jour "Tu nous a expliqué que tu étais aussi  l'aise avec un concierge qu'avec un PDG, et que tu pouvais les traiter de la même façon. La vie m'a appris que, en général, c'est un très mauvais comportement".

Mais effectivement, pour un journaliste, un concierge ou une secrétaire sont souvent plus utiles qu'un PDG ; notamment parce qu'ils ne formatent pas leur communication autant que les patrons ; en tous cas les patrons de grosses boites ; avec les petits patrons, c'est parfois génial, parfois dingue, parce qu'ils ne comprennent pas du tout ce qu'est un journaliste, alors   . tantôt ils te prennent pour un publicitaire, et ils veulent contrôler que tu racontes juste ce qu'ils veulent . tantôt ils te prennent pour un confessseur et t'expliquent toute les faiblesses de leur entreprise voire leurs mésaventures amoureuses -.tantôt ils ne veulent même pas te voir du tout.  

Dans une grosse entreprise bien organisée, le journaliste est canalisé d'une manière à la fois agréable et assez efficace pour lui... jusqu'à une limite bien définie ;  un couloir de velours à l'intérieur d'une gaine d'acier. C'était très impressionnant chez IBM en particulier. Nettement moins chez Bull ( une fois, passant à l'heure de midi, les bureaux vides, et ayant dit que je cherchais de la documentation, le concierge m'a emmené dans un local il y avait des rayons entiers de doc "diffusion restreinte". Je n'ai pas abusé, mais j'en ai profité quand même.

 

- 2. les diplômes ne comptent pas, si on est doué pour le métier (facilité d'écriture, goût de la nouveauté permanente, voire de la provoc.). Si j'étais resté dans l'assurance, et a fortiori dans l'informatique, j'aurais été assez vite bloqué, ne sortant ni d'une Grande Ecole ni d'une fac. de droit.   Evidemment, j'ai souffert de ce décalage, même avec mes collègues journalistes , car j'avais des préoccupations théoriques qui leur étaient étrangères. Préoccupations
- parfois excellentes parce qu'elles me permettaient de voir de de prévoir bien au delà de ce que me racontaient mes interlocuteurs ; , j'ai parfois, en un éclair, fait des sauts dans l'avenir que mes collègues comprenaient tellement peu qu'ils ne voyaient même pas l'importane qu'elles avaient; le plus fort a été en 1997, quand j'ai compris la portée d'Internet, et leur ai dit que le métier allait profondément changer, et que si j'étais plus jeune, je changerais de métier le plus vite possible ; certains n'ont compris que vers 2005,quand ils ont reçu leur lettre de licenciement  

 

- parfois dangereuses, car j'avais tendance à croire tout ce qu'on voulait, pour peu que cela aille dans le sens de mes théories du moment.   Et bien,entendu, j'aurais bien aimé que mes travaux théoriques soient reconnus par le milieu universitaire. Mais, pour ce monde , j'ai toujours été un "candide" (je cite). Pour y entrer, il aurait fallu que je me lance par exemple dans un doctorat, y étant admis sur dossier. Mais, même comme cela, c'est un milieu assez fermé à ceux qui ne viennent pas du sérail. J'ai vu des centraliens et des X , quittant une carrière d'ingénieur en entreprise pour devenir profs de fac. avoir un mal fou à faire leur trou.

 

 

Notes

[1]Personnes


Personnalité de Pierre-Jean Réfrégier, le fondateur financé par son père Maurice (élève de Lazareff)), Gilbert Cristini, Chantal Wourgaft (ancienne résistante, et qui regrettait cette époque).

Colllègues  Roger Bui, Brenier, Guy Vézian, Karady.
/Sidier, la letre rose
Pierre Schaeffer, Electronique actualités
autorité : Boutel (je joue bien), réécriture.

[2]Esquisse d’une histoire

La préhistoire. 1890-1965

ISFDépouillement de la revue des Ingénieurs et scientifiques de France, de 1885à 1904.

Dépouillement partiel du Bulletin du comité national de l'organisation française, de 1927 à 1932. J'ai fait ce dépouillement au siège du Cnof, alors à Puteaux (Hauts-de-Seine), peu de temps avant sa mise en liquidation. Il est hélas probable que ce bulletin, ronéoté, n'a pas fait l'objet d'un dépôt légal et qu'il est désormais introuvable.

La phase "moderne", 1965-1975

Cette décennie peut être qualifiée de "moderne" à differents titres : l'informatique centralisée et des discours "scientifiques" inspirés notamment des mathématiques modernes (sensiblement, de 1965 à 1975) ; l'informatique est en phase aussi bien avec l'art (le grand public commence à connaître Picasso, quelque soixante ans après Les demoiselles d'Avignon), et d'autres aspects des sciences et techniques : recherche opérationnelle, PPBS (Mac Namara au Viet-Nam). Et les MIS (Management Information Systems, ou Integrated)

En particulier, l'intelligence artificielle, thème assez permanent de débats, avec une sorte de pulsation des optimismes et des pessimismes :
- un optimisme sans nuances dans certains milieux, dans ligne de Turing, du centre de calcul de Grenoble, (années 1960) ; puis on déchante et on oublie assez largement le thème ; dans cette phase, influencé notamment par mon cousin Vincent Meissonnier (qui travaille à Grenoble), je fais assez nettement partie des "optimistes";

Les constructeurs

Il est difficile d'imaginer, en 2010, que l'informatique française a été puissamment dominée; depuis les années 1930 jusqu'aux années 1980, par les constructeurs de matériels. IBM au plan mondial, avec de puissants concurrents nationaux (Bull en France, ICL en Angletere, Siemens en Allemagne, Fujitsu (?) au Japon) et quelques puissants seconds, comme Univac (qui deviendra Unisys), Burroughs... Cette domination revient avec le Gafa

En France, IBM est non seulement le premier consructeur mais le premier prestataire de services dès avant la guerre. C'est cette firme qui commandite la création du mot ordinateur, qui soutient à Grenoble un des premiers grands centres de recherche universitaire en informatique, et son propre centre de recherche à La Gaude, près de Nice. Elle dispose d'importantes usines en France (Corbeil-Essonnes, Montpellier). Elle est évidememment très puissante au sein des associations professionnelles (Afin, Afcet) et des groupes spécialisés des organismes de normalisation.

A l'époque, jusqu'aux années 1980, l'ordinateur est beaucoup trop coûteux pour qu'une entreprise puisse se permettre d'en avoir plusieurs, en tous cas d'avoir plusieurs fournisseurs. Seuls quelques très grands "utilisateurs" comme on dit à l'époque peuvent se le permettre, comme EDF, l'Aérospatiale ou le Crédit Lyonnais. C'est que le choix d'un constructeur implique aussi le choix des périphériques et du système d'exploitation, et autour d'eux des personnels qui ne peuvent être formés, en tout cas qualifiés, que par les constructeurs eux-mêmes.

Les prestataires de services

Les SSII, comme on dit.
Salons, congrès, presse professionnelle, associations professsionnelles

Les universités et les grand instituts publics

Principalement l'Iria, qui deviendra l'Inria.

Les Utilisateurs

Le CXP, le Capa, le Cigref

Dès ce moment, certaines formes de décentralisation sont possibles, mais restent marginales par rapport au grand mouvement de concentration ; ici, personnellement, je suis un promoteur de l'informatique assez en phase avec les grands acteurs du marché, tout en attirant l'attention sur certains excès possibles ; la grande voix de cette époque est le directeur informatique d'EDF, Pierre Lhermitte

L'Etat

L'Etat est doublement concerné : enjeux indusriels, stratégie nucléaire. D'où le Plan Calcul.

Marcel: ne comprend pas, même quand il a eu un Mac. Ex. de Mandelbrot. Tuilages
TSI Le Candide
Le Moigne IDG Inforsit
Watier. Pas eu le temps
Kochansky, Jean-Eric Forge (CXP, centre d'éxpérimentation des logiciels), Legrenzi

 

Thèrese Outin (? ) Laurent Frybourg