@CHAPO:Les sanctions commencent à tomber sur les applications de gestion non conformes aux exigences du contrôle fiscal, d'ailleurs presqu'impossibles à satisfaire intégralement. Principales infractions sanctionnées: données incomplètes et documentation insuffisante.
@TEXTE:Fini de rire. Soutenu par ses brigades de contrôle des comptabilités informatisées (BVCI), doté d'un arsenal législatif puissant, le fisc a commencé à sévir. Les sanctions peuvent coûter cher. Et l'expérience confirme les inquiétudes exprimées après la publication de la loi de 1989. L'administration se trouve à la fois désarmée par la complexité des systèmes d'information, et sur-armée par des textes qui lui permet presque toujours de prendre l'entreprise en défaut.
"A coup sûr, des failles apparaissent lors d'un contrôle d'une comptabiltié informatisée" indique Michel Lesourd, directeur des études informatiques au Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables. Ces lacunes apparaissent d'autant mieux que le contrôle porte "sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats...", autant dire à la quasi-totalité des applications de gestion de l'entreprise. Et l'Administration exige un archivage de trois exercices complets avec les moyens nécessaires pour reconstituer tout résultat. L'entreprise doit aussi fournir toute la documentation nécessaire. Des exigences logiques, certes, mais qui s'avèrent en pratique très difficiles à satisfaire.
@INTER:Les entreprises sous-estiment le problème
@TEXTE:Dans l'ensemble, les entreprises sous-estiment l'ampleur des incidences d'un contrôle fiscal. Même les grandes firmes, dont la moitié seulement avait pris connaissance de la loi au moment d'une enquête menée par l'Ordre l'an dernier. Les PME/PMI sont particulièrement vulnérables, faute de temps et/ou de compétences pour s'initier aux subtilités des procédures de contrôle. Et toutes les entreprises se fient trop aveuglément aux SSII et aux fournisseurs de progiciels pour leur fournir l'assistance et la documentation nécessaire en cas de contrôle.
Affinant son analyse, l'Ordre a étudié 19 notifications de redressement ayant pour origine un contrôle de comptabilités informatisées. Les manquements peuvent se classer en quatre catégories: non respect de la procédure légale, données concourant directement à la comptabilité, données y concourant indirectement, documentation informatique.
La procédure de contrôle des comptabilités informatisées comporte un échange de courrier destiné à choisir le mode d'exécution parmi les trois définis par la loi: par les agents de l'administration sur le matériel du contribuable, par le contribuable ou par une SSII sur ses matériels, par l'administration sur copie des documents et programmes. En ne répondant pas dans les délais prévus, souvent d'ailleurs fort brefs, l'entreprise se met dans son tort.
@INTER:On confond sauvegarde et archivage
@TEXTE:Sur les données à fournir, on pourrait résumer les manquements observés à la confusion entre sauvegarde et archivage. Il ne suffit pas de faire régulièrement des sauvegardes, ni même de prendre en fin d'exercice une "photographie" complète des applications. Visant un redémarrage en cas d'incident, ces données ne sont pas exploitables pour un contrôle, car elles ne comportent pas les mouvements intermédiaires, notamment les mouvements. Pour permettre aux inspecteurs de mener leurs investigations, il faut présenter des données détaillées, ainsi que les programmes nécessaires à leur exploitation. Ce qui pourrait, le cas échéant, obliger à conserver les matériels nécessaires à la mise en oeuvre d'exploitation anciennes.
Cette obligation ne se limite pas à la comptabilité proprement dite, mais s'étend aux données et traitements qui concourent à la formation des résultats comptables. A la facturation, par exemple. Et encore, commente Michel Lesourd "La facturation est un terme générique qui doit englober les demandes de cotation, les bons de commande, les courriers échangés (et fax) à cette occasion, les confirmations de bons de commande, les bons de sortie de magasin, les mouvements de stocks, les bons de livraison, les bons de transport...". Tout cela doit être conservé en bonne et due forme sur son support d'origine, et sous forme accessible par les applications concernées.
@INTER:La documentation "utilisateur" ne suffit pas
@TEXTE:Les entreprises méconnaissent aussi les exigences légales en matière de documentation, qui vont très loin. D'une part l'entreprise doit pouvoir fournir "un document décrivant les procédures et l'organisation comptables". Elle doit aussi pouvoir présenter (ou faire présenter) "un ensemble documentaire retraçant les différentes phases d'un processus de conception, d'exploitation et de maintenance..." qui doit "retracer chaque stade de développent et être mis à jour à chaque modification...". Et l'administration ne se fait pas faute de réclamer cette documentation!
Pratiquement aucune entreprise ne peut satisfaire complètement à cette obligation, et d'autant moins qu'elle a recours à des sous-traitants et à des progiciels. La documentation "utilisateur", et notamment les aides en ligne, ne répond pas aux critères fixés par l'administration. L'entreprise doit donc s'en préoccuper, et obtenir de ses fournisseurs des accords écrits et contractuels. Ils devraient s'engager soit à fournir une assistance lors du contrôle fiscal, soit à fournir la documentation demandée par l'inspecteur, soit à le recevoir pour étude des dossiers sur place.
On voit mal, en pratique, comment les entreprises pourraient parvenir à se mettre à l'abri de toute critique. En particulier les plus petites, qui achètent des logiciels à bon marché par ces canaux de grande distribution qu'on imagine mal préparés à répondre à de telles exigences. L'Ordre avait envisagé de mettre en place un "label" pour les progiciels concernés, mais y a renoncé en face des risques juridiques importants qui en découleraient.
@INTER:Une situation malsaine
@TEXTE:Fatalistes, ou trop en quête de réactivité et compétitivité, les entreprises négligent d'assurer leurs arrières. Dans les grands groupes, note Michel Lesourd, on voit tantôt la comptabilité s'inquiéter et faire pression sur une informatique indifférente à ces soucis de ronds de cuir... tantôt des informaticiens prévoyants alerter des comptables insouciants. Difficile, certes, de se motiver pour mettre en place une organisation sans utilité immédiate, coûteuse (une estimation faite par une grande entreprise à la fin de 1993 conduisait un investissement de 25 millions de F), et sans garantie de protection sans faille.
La situation actuelle ne peut donc vraiment satisfaire personne. Ni l'administration, car la complexité des gestions intégrées et la souplesse du "sans papier" laissent aux fraudeurs de nouvelles possibilités d'échapper aux contrôles. Ni les entreprises, car elles ne peuvent se mettre à l'abri de toute critique et de toute arbitraire dans la sanction. L'Ordre des experts comptables, le CNPF et le Syntec recherchent conjointement des solutions pratiques. A l'heure de la "qualité totale", de l'ingénierie concourante et de la transparence permise par les échanges de données informatisés, il devrait être possible de s'entendre sur de nouvelles méthodes qui permettraient de donner à tous, pour un prix raisonnable, les garanties nécessaires? @SIGNATURE:PIERRE BERGER
@ENCADRE TITRE:SOURCES A CONSULTER
@ENCADRE TEXTE:L'Ordre des experts comptables va publier incessamment un petit guide "Contrôle fiscal des comptabilités informatisées" (Aux Editions Comptables Malesherbes, Paris), qui comporte un guide de diagnostic et, en annexe, les textes législatifs concernant le contrôle des comptabilités informatisées ainsi que les factures transmises par voie télématique.
En juin 1994, la Revue française de comptabilité a fait le point sur la question (articles de Michel Lesourd et Montserrat Goya, ce dernier assorti d'une bonne bibliographie). Un prochain numéro reviendra sur ces questions en tenant compte des cas concrets observés dans les entreprises. Aux éditions Francis Lefebvre, tant le Bulletin comptable et financier que les mémentos annuels consacrent des articles à ces questions. La Revue fiducaire a un dossier en préparation sur cette question.
Dans Le monde informatique, on lira en particulier "L'administration s'engage à rester raisonnable" (débat entre la DGI et Price Waterhouse, numéro du 29/6/92).
@SURTITRE:ECHANGES DE DONNEES INFORMATISES
@TITRE:Le réseau des experts-comptables
@TEXTE:La profession comptable joue à fond la carte de la dématérialisation des échanges. 130 informaticiens, venant des cabinets les plus dynamiques, des centres de gestion et des associations agréées, des SSII et des banques ont participé le 17 janvier à une journée sur l'EDI. Ils ont travaillé notamment sur le message EDI-Liasse, version française du message Edifact Infent.
La normalisation convient à la diversité de ses structures: 12 000 professions libérales, mais aussi 7000 sociétés dont certaines emploient plusieurs centaines de personnes. Les messages standard facilitent les liaisons entre progiciels de fournisseurs différents: aux derniers congrès de l'Ordre, les SSII concernées ont démontré l'inter-opérabilité de leurs produits. Au congrès de Nantes, en octobre dernier, la présentation reliait des postes CCMX, Cegid et Servant Soft à des serveurs, dont celui d'Arva (expertise d'assurance). Ils peuvent même aider, au sein de certaines entreprises, à relier les applications de différents établissements ou filiales.
La normalisation permet aussi de s'adapter aux exigences évolutives de l'Administration: direction générale des Impôts, organismes de sécurité sociale, caisses de retraite et de prévoyance.
Pour favoriser l'EDI, l'Ordre a lancé l'association Infotrans. Elle offre aujourd'hui une solution collective, avec un centre relais qui collecte l'information des cabinets et la redistribue sous forme normalisée aux partenaires administratifs et financiers. Dans l'avenir, les experts-comptables deviendront eux-mêmes centres relais. Tous les professionnels vont pouvoir participer à un réseau, établi aux moindres frais en s'appuyant au maximum sur les connexions existantes: certaines SSII connectent déjà plusieurs milliers de cabinets, et Tedeco peut assurer les liaisons avec l'Administration.
Reste à convaincre. Les professionnels sont pratiquement informatisés à 100%, mais de manière disparate ("à la fois un Sicob et un musée" commentent certains observateurs. La population rajeunit: 58% des professionnels ont moins de 45 ans, et 26% des experts-comptables moins de 30 ans. Les entreprises et les pouvoirs publics eux-mêmes à la dématérialisation. Pour y répondre, René Ricol, président de l'Ordre, a donné pour objectif à la profession de doubler en 1995 le nombre des liasses fiscales par rapport à 1994. "Tout ne sera pas très bien la première année" précise-t-il, mais "Qu'importe, le processus est engagé, c'est l'essentiel".@SIGNATURE:P.B.
@ENCADRE TITRE:Les normes Edificas
@ENCADRE TEXTE:
Normes déjà élaborées:
- balance
- écriture comptable
- plan de comptes
En cours:
- comptes annuels
- demande de documents
- grand livre
- plan de regroupement
- profil de dossier comptable.