@SURTITRE:ALAIN DURAND, DIRECTEUR GENERAL ADJOINT DE L'AFNOR
@TITRE:"L'EDI reprsente un fabuleux banc d'essai pour les outils de normalisation que nous dveloppons"
@CHAPO:Pas de communication entre les entreprises sans normes. L'volution de l'informatique ouvre de nouveaux axes de dveloppement l'Association franaise de normalisation (Afnor). Alain Durand, son directeur gnral, nous en montre la porte.
@INTERVIEW QUESTION:Pour dialoguer, les entreprises doivent parler le mme langage, employer les mmes mots. Quel est l'engagement de l'Afnor dans ce domaine.
@TEXTE:Tout travail de normalisation comporte un volet de terminologie. Il faut d'abord clarifier les termes, quel que soit le secteur concern. La moiti de nos normes comporte au moins, ne serait-ce qu'en introduction, une ou plusieurs dfinition.
Cela reprsente, globalement, quelque 50 000 termes, dfinis en franais et en anglais. Nous allons les mettre disposition de la communaut franaise en relanant le serveur tlmatique Normaterm.
Quant aux codifications, les plus importantes pour les entreprises relvent d'Edifact. Nous grons aussi les normes de l'ISO, par exemple les codes de pays (plusieurs codes, selon le nombre de caractres). Mais nous ne sommes pas exhaustifs: de nombres codifications sont dfinies par les organismes sectoriels.
Nous tudions, dans le cadre du projet europen Tedis, un projet de rfrentiel smantique gnral (Basic Semantic Repository). Plus que les codifications, il concerne les lments de donnes. A partir d'un pivot central, il fait rfrence aux dictionnaires de donnes des diffrents secteurs. Le projet, men par Mike Conroy, d'Edifrance, a dja pass une premire tpe de validation. Une deuxime tape sera franchie en 1993. La communaut europenne devrait prochainement confirmer la poursuite de ces travaux;
@INTERVIEW QUESTION:L'EDI (change de donnes informatis) reprsente donc un volet important de la normalisation.
@TEXTE:L'EDI reprsente un fabuleux banc d'essai pour les outils de normalisation que nous dveloppons. L'ensemble des travaux d'Edifact contruit une base de rfrence considrable. Et le caractre automatis de l'EDI oblige le respecter. C'est une garantie de qualit.
La France joue un rle important sur ces thmes, notamment avec Odile Lambert (Bull), qui contribue au WC3 l'laboration du modle conceptuel de l'EDI.
@INTERVIEW QUESTION:Ces domaines ne sont-ils pas nouveaux pour l'Afnor?
@TEXTE:Autrefois, les normes portaient essentiellement sur des produits. Aujourd'hui, nous travaillons de plus en plus pour les secteurs de services. L'volution vers les servcies touche directement les technologies de l'information, l'informatique. La normalisation accompagne le mouvement. Dans la srie des normes ISO 9000 relatives la qualit, par exemple, une norme Iso vient de sortir l'intention des SSII (9000-3).
Les difficult rsoudre ne sont pas ngligables. La terminologie du mal intgrer les concepts relatifs aux services, par exemple leur valeur ajoute. L'apprciation d'un service comporte des caractres subjectifs (un dmnageur en chemise blanche sduit mais ne travaille pas ncessairement mieux qu'en chemise bleue). Les services nous obligent travailler sur l'organisation mme des entreprises. Par exemple en matire de formation.
Loc Henry, chef de notre service "Efficacit des entreprises" s'intresse particulirement ces questions. Ce que nous proposons, c'est de dfinir des principes, des rgles de l'art. Pour normaliser, il faut pouvoir analyser le service, identifier un certain nombre de processus (par exemple l'accueil tlphonique) et leur attribuer des performances (nombre maximum de sonneries avant la rponse, plus le temps ventuellement pass sur des messages d'attente)
@INTERVIEW QUESTION:Les normalisateurs doivent-ils aller jusqu'au fonctionnement des entreprises?
@TEXTE:La normalisation doit aller jusqu' la modlisation. La monte des services contribue nous y conduire, pour normaliser des concepts comme la qualit totale, le juste temps, le zro-stock. Nous sommes en train de clarifier les modles de relations, de rgles d'change de flux de marchandises. Le travail est norme, il porte sur des milliers de paramtres. Pensez par exemple au bilan cologique d'une entreprise. Nous devons tudier non seulement les fonctions internes d'une entreprise, mais ce qui se passe autour d'elle. Et notamment le modle de ses relations avec ses partenaires.
L'EDI intervient ce niveau du modle conceptuel. Au del des messages et des codifications, il apporte des rgles de gestion des affaires (business practices), des scnarios. L'EDI ouvert pourra servir clarifier les relations entre tous les types de donnes.
En outre, nous assurons la compatibilit ascendante, base du systme de la normalisation, qui procde par monte progressive, par raffinement. Ce processus peut tre lourd, mais faute de base, on ne peut pas construire. La lourdeur est l'invitable contre-partie de la cohrence.
@INTERVIEW QUESTION:N'est-ce pas parfois un handicap trop lourd?
@TEXTE:Nous devons parfois limiter les ambitions. Pour rpondre des besoins urgents, il faut savoir renoncer au rve d'une harmonisation unique, d'une mise en cohrence totale. L'Europe est en train de btir un systme de normes qui ne sont pas totalement homognes avec celles du reste du monde. Car dans certains domaines, des proccupations spcifiquement rgionales appellent des rponses appropries.
Nous conservons cependant des ponts avec les autres champs de la normalisation. Et, bien entendu, la cohrence de certains domaines de base ne se discute pas (codes de pays, units de mesure, mthodes d'valuation). Mis, dans leur dclinaison, les contextes diffrents: contexte juridique, contextes de scurit, ... il y faut admettre des diffrences entre les environnement europens et les environnements anglo-saxons.
@INTERVIEW QUESTION:Pouvez-vous faire face aux difficults du multi-linguisme?
@TEXTE:L'Europe nous pousse vers l'anglais. Il faut combiner notre capacit exporter, donc nous exprimer en langue anglaise, avec celle de faire passer le message au niveau du public, des usagers, qui ne comprennent pas que nous ne parvenions pas leur parler en franais.
Nos entreprises commencnet concevoir ds le dpart leurs produits pour l'environnement anglo-saxon, avec des mots anglais. Il faut ensuite les re-traduire destination du march franais. Nombre de grandes entreprises commencent rencler devant cette charge. C'est un dfi pour les responsables.
Je rends un hommage particulier des firmes trangres, comme Microsoft, qui parviennent raliser des manuels en franais d'excellente qualit.
@INTERVIEW QUESTION:L'efficacit de la normalisation consensuelle " l'europenne" se voit aujourd'hui conteste. On met en avant l'efficacit des standards de facto l'Amricaine, face aux lenteurs de la normalisation OSI, par exemple. Faut-il prendre cette menace au srieux.
@TEXTE:Si c'tait refaire, nous le referions. Certes nous avons parfois chou. Nombre de standards de fait rpondent trs bien aux besoins des entreprises. Ils s'imposent souvent pour des raisons plus psychologiques que rationnelles.
Nous n'en faisons pas moins un travail positif et utile. Le march sanctionne cette normalisation quand elle se fait temps. Il en connat la valeur. Kodak et Philips, par exemple, ont attendu la parution des normes JPEG pour lancer leurs produits de photographie numrise l'intention du grand public. En sens inverse, un excs de standards de fait peut conduire des domination de fait d'un march par certains de ses acteurs. La vritable normalisation est au service de tous. @SIGNATURE:Propos recueillis par PIERRE BERGER.