@CHAPO:Agences autonomes, commerciaux salariés, bancassurance, vente directe... chaque type de réseau de distribution appelle des solutions informatique adaptées. Mais l'essentiel de la profession continue de faire confiance aux grands systèmes propriétaires.
@TEXTE:L'apparente homogénéité des produits d'assurance vendus en France (automobile, habitation, protections complémentaires) va de pair avec des modes de relation bien différents entre assureurs et assurés. Les compagnies traditionnelles (et une partie des mutuelles) s'appuient toujours sur un réseau d'agences à l'autonomie d'autant plus forte qu'elle se fonde en droit sur une loi de 1947. Les "mutuelles sans intermédiaires" et des structures nouvelles mises en place par les grands groupes classiques gèrent leurs agences comme le font les banques: un personnel salarié et une organisation définie par la hiérarchie centrale. Les menaces qui pèsent sur les régimes de retraite poussent aujorud'hui de nouveaux modes de distribution: équipes de commerciaux itinérants, vente par l'intermédiaire des banques.
Chacun de ces canaux se dote d'une informatique à son image, conduisant à une grande diversité des choix techniques et en particulier des architectures. Enfin le progrès même de technologies comme la télématique vocale encourage les compagnies, après des années d'expériences sans grand résultat, à chercher le contact le plus direct entre les assurés... et leurs ordinateurs.
Le premier "Forum des technologies de l'assurance" qui se tient ce printemps (voir encadré) permettra de faire le point sur cette diversification comme sur l'évolution générale de l'informatique dans l'assurance, depuis la refonte des architectures centrales jusqu'à l'EDI (Echange de données informatisé). Concentrons nous ici sur l'informatique des réseaux commerciaux.
Dans les réseaux à agences traditionnelles, les évolutions techniques ont toujours été freinées par le médiocre enthousiasme des agents, de tempérament plus littéraire que scientifique, et toujours prêts à suspecter les compagnies de profiter de l'informatique pour rogner leurs marge de liberté tout autant que leurs marges au sens le plus comptable du terme.
Les Mutuelles du Mans donnent le ton, avec une informatique d'agence particulièrement étoffée, et considérée comme une des meilleurs du marché (reportage dans ce numéro). L'autonomie de l'agence est radicalement garantie par celle du système informatique, un mini-ordinateur multi-poste, relié de manière souple et en quelque sorte sur un pied d'égalité, à l'informatique centrale. Les fonctionnalités font place à la comptabilité autonome de l'agence, y compris s'il pratique certaines formes d'assurances avec d'autres organismes.
Mais ce perfectionnement se paye. En coût: de l'ordre de 500 000 F en moyenne pour un système à deux écrans. Même s'il faut se garder de toute comparaison avec l'achat de deux micro-ordinateurs "taiwanais" (2x 6000F TTC pour un 486 assez musclé) et quelques logiciels de grande diffusion (quelques milliers de francs)... ce montant donne à réfléchir. En délais aussi: il a fallu cinq ans pour passer de la décision de développement au déploiement généralisé dans les agences. Conséquence: elles se voient livrer aujourd'hui un matériel en fin de course (Bull en cessera la fabrication dans quelques mois) et un logiciel on ne peut plus "propriétaire" dont la réactivité à terme devrait faire problème. Tout au plus envisage-t-on, pour le prochain cycle quinquannuel, un portage sous Unix... du Cobol et de la base de données réseaux.
Pour les "mutuelles sans intermédiaires", nous avons récemment décrit le cas de la Macif (LMI du 3/5/93) , lui aussi exemplaire par la perfection de de ses développements, mais dont la rigidité ne laisse guère de satisfaction aux partisans des systèmes ouverts et décentralisés. L'architecture rappelle celle des banques, avec des centaines ou milliers de terminaux rattachés aux sites centraux par des niveaux intermédiaires fonctionnellement passifs.
L'innovation se déploie plus rapidement dans les forces de vente directement pilotées par les Compagnies pour la vente des produits patrimoniaux. Ici, les taux de croissance importants et la concurrence particulièremnet vive conduisent à mettre en place plus rapidement (un peu plus de deux ans aux AGF) une informatique sur portatifs. Le coût complet n'est pas négligeable là non plus (de l'ordre de 100 000 F par machine). Mais la technologie, plus récente, ouvre plus largement l'avenir pour les futures versions que les besoins fonctionnels et le perfectionnement des machines portatives ne manqueront pas d'appeler.
Enfin, le vent des concepts les plus en vogue souffle sans entraves dans les structures les plus récentes. Réseaux de micros, architectures client/serveur, orientation objet forment la base même de l'informatique de la Xaar (LMI du 17 décembre), qui construit ses antennes commerciales à partir de zéro. Ou de Pacifica (dans ce numéro), qui se branche sur l'énorme et complexe réseau du Crédit agricole. Dans les deux cas, les cycles de développement sont environ de deux ans, pour la conception d'une informatique complète de compagnie, des agences aux applications centrales. Dans les deux cas, on est aujourd'hui au coeur d'un deuxième cycle: le premier, très court, ayant sans doute relevé de la maquette autant que du projet en vraie grandeur. A un démarrage "sur les chapeaux de roues" en à peu près un an, succède un deuxième cycle plus mûr.
Dans quelques cas, hiers marginaux mais aujourd'hui de plus en plus significatifs, les technologies elles-mêmes font naître de nouveaux types de relation avec les assurés. Le perfectionnement des techniques d'impression et de routage encourage (Eurofil, pr exemple) la vente directe par correspondance voire par téléphone. Plus radicalement encore, la télématique vocale conduit à des relations sans intermédiaires entre les assurés et les systèmes informatiques des compagnies. Les succès rencontrés par la Macif, qui vient de généraliser son service vocal après des expériences dans certains départements, en témoignent. Jusqu'où ira-t-on dans cette voie? Aux assurés, existants ou prospects, de répondre!@SIGNATURE:PIERRE BERGER
Jusqu'à présent, les grandes plaques tectoniques de la planète assurance ne bougent qu'à leurs marges. De temps à autre, un petit séîsme laisse pressentif
Dans ce milieu très jaloux de ses spécificités, le recours au progiciel était jusqu'à présent toujours resté marginal, qu'il s'agisse des outils généraux (comptabilité, personnel et même bureautique) ou d'applicatifs verticaux spécialement conçus pour la profession. Non que l'offre se soit manifestée: IBM proposait les produits Alis dès les années 1960. Mais il fallu attendre ces toutes dernières années pour voir des réalisations en vraie grandeur. L'UAF (LMI du 27/4/92) n'y avait eu recours qu'après un reverse engineering complet du produit d'origine sous Pacbase. Plus récemment, la branche vie de Groupama (Assurance et Informatique Magazine, 12/93) marquait un pas décisif avec le produit américain Continuum.
L'avenir des progiciels ne peut s'ouvrir très rapidement pour la distribution de l'assurance. A moins de considérer comme tels les applicatifs développés par les Compagnies ou Mutuelles pour leurs agents, éventuellement par sous-traitance à une filiale ad hoc. (MMA). La situation peut se comparer à celle de l'automobile, où les grandes marques tiennent à conserver le contrôle de leurs réseaux de concessionnaires. Cela explique aussi le peu de succès de l'EDI pour la vente de l'assurance, alors qu'il progresse fortement en matière de réglements de sinistres (avec le réseau D'Arva), parce que la coopération entre les institutions s'y impose.
Les solutions informatiques mises en oeuvre aujourd'hui pour la distribution de l'assurance reflètent donc bien les structures propres à l'exercice de ce métier en France. Les nouveautés technologiques