@SURTITRE:ARCHITECTURES TECHNIQUES ET PROGICIELS

@TITRE:

Crédit agricole: chacun à son rythme

vers les systèmes ouverts

@CHAPO:Entre les lenteurs des développements classiques sur grands systèmes et les risques de solutions "tout Unix", les sites Bull du Crédit agricole trouvent chacun leur voie, de Saint-Lo à Rouen en passant par Nice et Chartres.

@TEXTE:Organisé en caisses régionales indépendantes, mais faisant le même métier selon des normes communes, le Crédit agricole représente une exceptionnel laboratoires des stratégies informatiques possibles à un moment donné. Qu'elles soient équipées de machines Bull ou IBM, toutes les caisses doivent définir leur position par rapport aux "systèmes ouverts". Et, sans l'écrire, les DSI interrogés admettent que les sites "propriétaires" coûtent ou coûteront plus cher, ou en tous cas n'auront qu'un avenir limité, tout en offrant les avantages rassurants de la continuité et de solutions éprouvées par les ans.

Les sites IBM font encore assez largement confiance à IBM pour résoudre les problèmes de migration qui les attendent. En revanche, les sites Bull visent à se prémunir des avatars prévisibles du constructeur national, et des machines GCos8 en particulier. Toutes, sauf erreur, ont définitivement figé la puissance de leurs mainframes. Les nouveaux développements s'implantent sur des serveurs distincts, sous Unix pour l'essentiel. Mais les stratégies divergent sur la vitesse et les échéances. Les uns se limitent à quelques expériences pilotes. A l'autre extrême, la mutation radicale est engagée, avec abandon programmé de la machine centrale. Enfin, les caisses bretonnes du Gicab et la Franche-Comté privilégient une approche fonctionnelle en profondeur, avec un "découpage bancaire" selon le concept d'urbanisme" lancé il y a quelques années par Jacques Sassoon, à la Caisse nationale.

@INTER:Chartres et Saint-Lo déjà bien engagés

@TEXTE:Saint-Lo s'est échappé du peloton depuis plusieurs années, et garde ses longueurs d'avance. Le DPS 90 partira en 1997, confirme Gérard Lefais, directeur du système d'information. Les nouveaux outils, appuyés sur une série de serveurs Compaq, équipent aujourd'hui la majorité des agences (62) pour les bases personnes/clients/contrats. La gestion des risques démarre dans une agence pilote.

Cette position avancée conduit la caisse régionale a communiquer largement sur son système. Tant pour trouver d'éventuels supporters que de se protéger contre les dangers naturels de l'isolement. A notre époque médiatique, les médias peuvent présenter le meilleur des remparts. Et Saint-Lo a de quoi montrer. Depuis son original système d'exploitation à base d'agents jusqu'à sa politique de reconversion des personnels. Sans oublier qu'elle bat des records en matière de coûts informatiques: 8% du produit net bancaire, contre 15% environ pour les autres caisses (voir tableau). Il se peut que la situation particulière de la Manche, relativement peu urbanisée, facilite ces économies, par comparaison aux caisses à clientèle urbaine, plus gourmandes de services coûteux.

Chartres ne parle pas d'abandonner son DPS 90. Mais, depuis trois ans, le transactionnel des agences passe par un serveur Sun (SS 100), qui encaisse actuellement 100 000 transactions/jour, sur un réseau TCP/IP et à partir de postes de travail OS2/PM ou Windows. Une partie des processus se déroule en asynchrone, avec des mises à jour effectuées en un maximum de dix secondes. L'avenir dépendra de facteurs qui échappent pour partie à l'informatique, puisqu'il est prévu de faire fusionner la caisse avec celle de Blois, équipée d'IBM. Cependant les deux caisses ont engagé une réflexion analogue sur le découpage applicatif. Blois est d'ailleurs sortie pour cette raison du mouvement Exa, comparable à Varalpain (voir ci après) dans le monde IBM. Elles devraient logiquement déboucher, à terme, sur une solution commune Unix.

@INTER:La saga Varalpain

@TITRE:Rouen, Nice et Draguignan n'en sont pas encore à se poser vraiment ce genre de questions. Elles finissent de généraliser l'implantation d'un progiciel intégré sur grand système dont le développement a commencé en 1986, sur la base d'un schéma directeur élaboré pour le Var en 1983. Une longue saga aux nombreux rebondissements. Elle serait restée cachée dans les milieux feutrés de la banque fédérative, si quelques syndicalistes, notamment Jean-Pierre Pagani (Sud-Cam), n'avaient fait appel à des consultants extérieurs pour faire auditer le produit et plus généralement protester contre une politique de fusions et de grands projets qu'ils considèrent comme un gaspillage (voir tableau de chiffres à l'appui) et une menace pour les personnels informatiques de l'institution.

Lancé dans le Var, le produit devait en 1986 tirer son nom, Varalpain, des trois départements qui participèrent à son développement: le Var, les Alpes maritimes et l'Ain. Cette dernière caisse abandonnait l'aventure en 1991. Mais le flambeau était repris par Rouen, qui faisait développer Gabriel, interface graphique sous OS/2 PM. Patrice Vaujour, directeur de l'informatique à Rouen, se félicite des résultats obtenus dans sa caisse. Il explique ses dépenses informatiques, certes élevées (21,5% des charges totales, précise-t-il, en léger écart avec Sud-Cam), par les investissements engagés. Et vont désormais se rapprocher de ce qui lui semble la norme, entre 18 et 20%.

Nice et Draguignan ont aujourd'hui adopté Varalpain complet. Leur directeur informatique commun, Robert Grasset, le confirme: "Nous allons travailler avec Varalpain complet, qui tourne avec les problèmes de performances normaux pour des logiciels qui démarrent". Dans ces deux caisses, l'évolution vers Unix se prépare en douceur. Avec des serveurs sous SCO à Draguignan, par exemple.

@INTER:Concentration et systèmes ouverts

@TITRE:Si importante que soit la technique, elle s'inscrit au Crédit agricole dans une stratégie nationale de réduction du nombre des caisses. En principe une par département au départ, la Fédération nationale n'en veut plus que 59 à l'horizon 1995-95, et vise 35 pour l'an 2000. Il y a quatre ou cinq ans, cette politique de concentration semblait conduire tout droit à un monopole absolu d'IBM. Il ne restait en effet pratiquement plus de que deux filières, IBM et Bull. Et les regroupements jouaient souvent en faveur du "Numéro Un". De même d'ailleurs que dans des groupes comparables comme les Banques populaires.

En prouvant la capacité des serveurs Compaq à reprendre le flambeau, Saint-Lo a cassé cette dynamique, et devancé la généralisation actuelle du mouvement vers les "systèmes ouverts". Les difficultés, ou à tout le moins la grande lenteur de développement des produits basés sur les machines propriétaires, comme Varalpain, jouent en faveur des systèmes ouverts. Mais l'évolution des architectures techniques masque peut-être trop un point essentiel, qui mériterait d'autres analyses: comment évoluent les fonctionnalités et les services effectivement rendus. @SIGNATURE:PIERRE BERGER

@ENCADRE TITRE:UN BUDGET DE SEPT MILLIARDS

@ENCADRE TEXTE:Le groupe se compose de 78 caisses régionales avec leurs filiales et du groupe central, la Caisse nationale et ses filiales. Une caisse régionale moyenne compte environ 900 agents qui gèrent 500 000 comptes.

Le budget informatique total s'élève à 7 milliards de F par an. Le personnel représente 25% de chiffre, et comprend 7200 personnes dont 5000 dans les caisses régionales, 1000 dans les SSII filiales, 800 dans le groupe CNCA et 400 dans les centrales de titres.

Le budget informatique d'une caisse régionale moyenne s'élève à 60 millions de F, pour 60 informaticiens, dont 30 se consacrent aux études.

COMPARAISON DES COUTS INFORMATIQUES DE QUELQUES CAISSES

     Caisse       Nice     Var   Manche   Rouen   Caen     Caisse   
                                                          moyenne   

Produit net          926     777     600     818     514            
bancaire                                                            

Charges              574     555     350     587     350            

dont                 120     112      50     134      70         80 
informatique                                                        

Info/PNB              13      14       8      16      13            

Info/charges          21      20      14      23      20         19 

Part des frais        17      17      35      13      22         25 
de personnel                                                        
dans charges                                                        
informatiques                                                       


Source: Sud-Cam (Union des syndicats de salariés du Crédit agricole mutuel)

@LEGENDE PHOTO:Chartres développe ses serveurs Unix mais ne parle pas d'abandonner son mainframe.

///////////////////////////////

@SURTITRE:ARCHITECTURES

@TITRE:Le Crédit agricole bascule dans l'ouverture

@CHAPO:

@TEXTE:

Dans l'environnement Bull, deux grandes options se font face. D'une part le développement d'un progiciel sur grand système et selon toute l'orthodoxie d'une informatique à la française, appuyée sur Pacbase. De l'autre le mode client/serveur à base de serveurs PC, avec disparition à terme de tout mainframe. Cette solution semble aujourd'hui l'emporter, et pourrait se diffuser assez largement dans le monde du Crédit agricole, quitte à modérer un peu le discours pour satisfaire les susceptibilités dans un milieu aussi "politique".

La solution client/serveur, née à la caisse de Saint-Lo, poursuit aujourd'hui un développement régulier. La date de 1977 se confirme pour l'abandon de GCos 8. Gérard Lefais, directeur du système d'information, précise que le nouvel outil équipe aujourd'hui la majorité des agences (62), pour les bases personnes/clients/contrats. La gestion des risques clients démarre dans une agence pilote.

La solution classique, née dans le Var à partir d'un schéma directeur établi de 1983 à 1986, a pris le nom de Varalpain (Var, Alpes Maritimes, Ain). Aujourd'hui opérationnelle pour les modules de base, elle fait l'objet de bien des critiques. Le Var, en janvier dernier, annonçait qu'il se dotait d'un nouveau système à base d'Unix. Varalpain resterait figé et, en quelque sorte, encapsulé dans le cadre d'une architecture multi-serveurs. Mais, à la différence de Saint-Lo, le Var n'a pas l'intention de se séparer de son mainframe.

Le produit a par la suite été fortement soutenu par un autre utilisateur, la caisse de Rouen. Cette caisse met en oeuvre aujourd'hui toute une panoplie de produits intégrée par Arthur Andersen sous le nom de Tetra. Elle comprend Varalpain (clients et dépôts), Green(prêts), Brahms (commercial) et Gabriel (interface utilisateur). Les coûts sont parmi les plus élevés de la filière Bull au Crédit Agricole (voir tableau).

COMPARAISON DES COUTS INFORMATIQUES

  Caisse     Nice     Var    Manche   Rouen   Caen    Caisse    Banque   
                                                     moyenne    moyenne  

PNB             926     777      600     818    514                      

Charges         574     555      350     587    350                      

dont info.      120     112       50     134     70         80           

Info/PNB         13      14        8      16     13                    8 

Info/charge      21      20       14      23     20         19        13 
s                                                                        


Les partenaires sociaux s'indignent. Ils titrent "pavane pour un rêve informatique défunt". La contestation la plus vive est née dans les Alpes maritimes. Le comité d'entreprise a fait réaliser en 1992 une contre-expertise par Bruno Lussato (connu pour ses positions souvent provocatrices en matière de micro-informtaique). Elle portait essentiellemnet sur Gabriel, mais indirectemnet sur Varalpain, l'un ne se concevant pas sans l'autre. La direction ne lui a pas facilité les choses. Les conclusions des visites en agence ne ménagent pas le produit: "Gabriel paraît apporter un confort d'utilisation supérieur au système précédent, dont il ne masque cependant pas les lourdeurs. Les opérations les plus courantes sont aisées et rapides à réaliser, alors queles opérations plus spéciales et complexes posent problème. Dans ce dernier cas, certains agents préfèrent noter sur une feuille les inforamtions pendant qu'ils osnt avec le client pour les saisis à posteriori. Ceci limite l'intérêt de l'interactivité du système... Il faut également souligner que la plupart des opérations qui ont été réalisées sous nos yeux... ont été perturbées par des incidents de type coupure ou blocage du système".

@INTER:La contradiction de deux concepts

@TEXTE:Les difficultés rencontrées par Varalpain s'expliquent notamment par une raison technique: un outil de développement incompatible avec la conception de base. L'étude préalable et l'étude détaillée, sous maîtrise d'oeuvre Sema, s'appuyait sur le "message logique". La réalisation devait s'appuyer sur Odin, basé sur le même concept. "Les concepteurs ont intégré cette notion de message logique et les études détaillées ont été validées dans l'esprit que plus le message logique sera riche en informations, plus les caisses auront la latitude de personnaliser leurs écrans dans la définition de leur couche locale".

Mais, en 1988, le produit a dû se plier aux normes du Crédit agricole, et adopter Pacbase et son moniteur de dialogue associé, PacDialogue... qui ne connaissait pas le concept de message logique. "Ceci signifie", écrit le rapport d'expertise "qu'à chaque message logique géré dans Varalpain, il faut associer dans Gabriel-Varalpain un fichier au niveau local qu précise le dessin de l'écran, les libellés,... Si, profitant de ce "bricolage" inquiétant par sa fragilité, on rajoute à la description de l'écran en local des particularités liées au micro-ordinateur (gestion de la souris, ascenseurs, couleurs...) on comprend mieux...".

@INTER:L'informatique, prétexte à concentration?

@TITRE:Si importante que soit la technique, elle s'inscrit au Crédit agricole dans une stratégie nationale de réduction du nombre des caisses. En principe une par département au départ, la Fédératino nationale n'en veut plus que 59 à l'horizon 1995-95, et vise 35 pour l'an 2000. Il n'appartient pas à l'informatique de prendre parti sur cette politique. Mais

ENCADRETITRE:LE GROUPE CREDIT AGRICOLE

@ENCADRE TEXTE:Le groupe se compose de 78 caisses régionales avec leurs filiales et du groupe central, la Caisse nationale et ses filiales. Une caisse régionale moyenne compte environ 900 agents qui gèrent 500 000 comptes.

Le budget informatique total s'élève à 7 milliards de F par an. Le personnel représente 25% de chiffre, et comprend 7200 personne,s dont 5000 dans les caisses régionales, 1000 dans les SSII filiales, 800 dans le groupe CNCA et 400 dans les centrales de titres.

Le budget informatique d'une caisse régionale moyenne s'élève à 60 millions de F, pour 60 informaticiens, dont 30 se consacrent aux études.