@SURTITRE:INFORMATIQUE STRATEGIQUE

@TITRE:Aux Galeries Lafayette,

une SSII pour innover

@CHAPO:Le groupe concentre son informatique sur une filiale spécialisée, se dote d'une puissante architecture et commercialise ses techniques et son savoir faire.

@TEXTE:L'informatique stratégique n'est pas un vain mot au groupe Galeries Lafayette. A l'instar de cas d'école américains comme United Airlines avec son système de réservation Sabre, le meilleur de l'informatique maison se met au service de la profession toute entière. L'informatique est constituée en filiale, sous le nom de Mag Info Consultant. Elle relève du "pôle services", aux côtés des prestations financières de Cofinoga et de la livraison à domicile Télémarket. Le pôle dispose même d'une entité de recherche (GIE Recherche Haussmann). Et il est animé par un des grands promoteurs des nouvelles technologies appliquées au commerce, Philippe Lemoine (voir encadré).

Cette politique a permis au groupe de se doter d'une informatique puissante, essentiellement à base de mainframes IBM. Il est fier de sa base de données, de 1,8 téra-octets, la plus grosse du monde en accès direct sous DB2. Elle supporte 4,5 millions de transactions. Et l'entreprise est site-pilote pour l'emploi du parallélisme, notamment en batch. Même au plan des architectures d'application, le groupe se situe en pointe avec son concept Store Flow. Une conception orientée objets, assemblés ici comme les éléments d'un processus.

@INTER:Les objets, composants d'un processus continu

@TEXTE:Créer un objet est conceptuellement facile, note Jean Arhan, directeur des activités extérieures de Mag Info. Mais il ne doit pas se définir n'importe comment: il faut tenir compte des performances comme des fonctionnalités. La vraie difficulté vient de leur intégration. Contrairement aux approches les plus répandues (OLE, par exemple), on s'attache ici à les assembler dans les cadres de processus. Comme l'exprime par exemple le nom d'un des produits de la maison: Store Flow. L'analyse consiste à définir les processus et à y insérer les bonnes briques matérielles et logicielles. La plus-value vient de l'intégration. L'AGL de demain sera un outil de conception de workflow. Qui sonne le glas du progiciel classique: la gestion des objets et la construction des processus ne peuvent s'intégrer un progiciel figé, a fortiori à un progiciel intégré pour l'ensemble de l'entreprise.

Les données ne manquent pas. Les terminaux de points de vente peuvent en fournir des masses, au niveau unitaire de chaque produit. Mais très peu d'entreprises s'en servent vraiment. Car il faut intégrer ces données dans un véritable système d'information, depuis la base jusqu'au directeur général. Or, en général, le système comporte des ruptures.

Un des premiers rôles de l'informatique est de mieux connaître les produits, pour les suivre dans le détail. Chaque produit a son double informationnel: qui l'a livré, combien il en reste en stock, quel effort sera nécessaire pour le vendre. Chez un client de Mag Info comme Tati, par exemple, on connaît au jour le jour la marge réelle de n'importe quel article. Il faut savoir combien coûte une solde, une remise au personnel. L'énormité des bases de données s'explique en partie par là. L'outil interne Mag 2000 a multiplié par 150 le nombre d'articles gérés, ce qui conduit à trois millions de références, et encore sans tenir compte de la taille, du coloris ou du textile.

Cette vision continue doit s'étendre aux opérations temporaires, par exemple. En général, elles se traitent en marge du système d'information, avec une série de verrues pour les y intégrer tant bien que mal. Aux Galeries Lafayette, les journées 3J s'insèrent complètement dans le fonctionnement standard. Le référencement des produits reste standard, de même que l'iconographie des catalogues, extraite à partir de la banque d'images unique. Seuls changent les processus d'achat, les présentations, etc.

@INTER:Une intégration du haut en bas des processus

@TEXTE:L'intégration doit monter jusqu'au plus haut niveau. La démarche des dirigeants doit s'intégrer de manière interactive dans le système di'nformation. Actuellement, le travail décisionnel se fait le plus souvent sur un tableur, en dehors du système. Les projets de Mag Info prévoient que le directeur général ait un écran graphique sur son bureau, qui lui montre visuellement les données importantes. Et qu'il puisse ensuite injecter directement ses décisions dans le système, avec sa signature électronique pour bien garantir l'origine des instructions.

"Ce qui fait la force d'une entreprise", commente Jean Arhan, " ce n'est pas le système d'information en lui-même, mais la manière de l'utiliser, le positionnement stratégique. Vous ne remplacerez jamais un commerçant par une technologie. Mais il faut lui apporter des éléments normalisés, une couche de présentation qui lui permette d'accéder à la donnée pertinente. C'est pourquoi nous nous intéressons beaucoup au data mining. "

On parvient plus facilement à une telle cohérence, à un modèle d'entreprise basé sur un référentiel unique, quand on installe de nouveaux magasins. Comme le super-marché que GB Inno a installé à Izmir (Turquie), et dont les actionnaires sont 47 petits commerçants de la région. La volonté, la rigueur... et le schéma directeur comptent plus que la technologie.

@INTER:Rendre au commerce toute sa valeur

@TEXTE:Poussé à leurs limites, certains schémas réduisent presque la distribution à un jeu d'automates. Une organisation tayloriste fait orchestrer les individus comme les tâches par des outils de workflow qui matérialisent la stratégie. Les outils de supervision (par exemple dans le produit Flow Mark) comportent un visuel élaboré, exploitant méthodiquement la couleur. Il affiche des alertes immédiates, qui conduisent parfois à rappeler les gens à l'ordre, parfois à déceler un goulot d'étranglement, ou encore à re-décrire un processus qui a été mal modélisé.

Dans un schéma ultime, du genre de Walmart aux Etats-Unis, le distributeur n'est plus qu'un observateur. Le fournisseur a un accès en temps réel à l'ensemble du processus, et détermine ses actions en juste à temps. Une forme ultime du concept d'ECR (Efficient consumer response).

Mais, au contraire, un bon système d'information peut rendre son poids au distributeur. S'il dispose d'une bonne base de données et d'outils de data mining performants, il peut reprendre l'initiative, et "vendre de l'information" au fournisseur. Il retrouve sa valeur ajoutée spécifique, il redevient propriétaire de sa clientèle. Etant entendu que sa première valeur, c'est sa compétence et son positionnement stratégique. L'explosion d'Internet va encore bousculer le rapport des forces. Du moins le groupe Galeries Lafayette s'est-il placé pour y trouver sa place. Au point qu'on se demande si les services informatiques ne deviendront pas sa valeur la plus sûre.@SIGNATURE:PIERRE BERGER et BORIS PERZINSKY

@INTER:L'ARCHITECTURE

@TEXTE:Depuis le 1er janvier 1996, une architecture Parallel Sysplex Datasharing supporte le système marketing. Le parallélisme porte sur les données comme sur les traitements, transactionnels et par lots. Il sera progressivement étendu à l'ensemble des applications. Le déport d'une partie des machines sur un autre site physique, avec mirroring des données critiques, va progressivement permettre un backup pratiquement instantané.

La figure représente l'architecture cible. Cette duplication deviendra opérationnelle à la fin du 1er trimestre 1996, d'abord en mode asynchrone, puis en temps réel cet été.

Autour de ce noyau, une vingtaine d'AS 400 et de RS 6000 complètent l'équipement du site central comme des magasins. La bandothèque automatique Storagetec 4400 gère 40 téra-octets et l'ensemble du parc compte 6000 écrans, 3000 terminaux points de vente, 6500 terminaux de paiement électronique, 3500 minitels professionnels et un quarantaine de distributeurs de billets. L'entreprise reste donc très "bleue", même si elle a commencé à abandonner "le monde strictement propriétaire".

D'un point de vue fonctionnel, entre le front office (caisses, terminaux) et le back-office (gestion et décision), un "middle-office" joue un rôle fédérateur.

@LEGENDE INFOGRAPHIE:

L'ARCHITECTURE CIBLE DE MAG INFO

CEC: Central Electronic Complex

HTPS: High Performance Transaction Server

HPQS: High Performance Query System

DB: Data Base

DS: Data Sharing

@ENCADRE TITRE:RESOLUMENT PROSPECTIF

@ENCADRE TEXTE:Pour Philippe Lemoine, le commerce est le secteur-clé de l'an 2000. Dans le rapport du groupe qu'il a présidé en 1992 pour l'Institut du commerce et de la consommation, on relève, aux côtés de considérations techniques ou pragmatiques, des perspectives avant-gardistes.

"Le commerce est un des tout premiers secteurs utilisateurs de l'informatique... cette progression rapide est loin d'être achevée, lorsque l'on explore le foisonnement des applications qui vont se généraliser dans un futur proche".

"L'informatique va permettre au commerce de mieux connaître ses clients et de diversifier ses prestations, tandis que son organisation se libérera de plus en plus des nomenclatures et des contraintes du monde de la marchandise".

"Mais cette arrivée massive des technologies d'information dans ce qui était hier la périphérie de l'organisation économique annonce un effet de ressac. L'informatisation du commerce est, en effet, le dernier stade avant l'informatisation des ménages".

"Nous entrons dans une économie d'un type nouveau et nous ne savons pas la décrire".

ENCADRE TITRE:LE GROUPE ET SA SSII

@ENCADRE TEXTE:Avec 507 magasins et 36 000 collaborateurs, le groupe Galeries Lafayette réalise un chiffre d'affaires de 38 millliards de francs. Il s'organise en trois pôles : grands magasins (Galeries Lafayette, Nouvelles Galeries, BHV), magasins populaires (Monoprix, Uniprix), Services Laser (Cofinoga, Télémarket, GIE Rercherche Haussmann, Mag Info Consultant).

Chaque pôle a deux rôles: apporter des compétences aux groupe et se développer lui même tant à travers ses filières actuelles que par le lancement de nouvelles opérations.

Télémarket propose ses prestations par différents médias: téléphone (45%), minitel (40%) et télécopie (15%). Le catalogue porte sur les produits de consommation courante, avec quelque 2200 articles. Le développement reste modéré. "Cela dépend de la valeur subjective qu'une personne ou un ménage attribue à son temps", explique Jean-Claude Pelissolo, directeur général de la branche services. A 50 F de l'heure, le surcoût de la livraison à domicile dissuade. A 150 ou 200 F, le service devient compétitif. Ce qui explique que le client-type soit un ménage bi-actif avec trois enfants: il a des revenus suffisants et n'a pas le temps de faire les courses. Le revenu n'est qu'un des facteurs, en fait.

Un telle structure permet l'expérimentation, pour voir comment le client ressent les nouvelles prestations. Il faut tester à la fois la mécanique du service, les modes d'utilisation et de navigation du client, mais aussi son acceptation. Personne ne peut vraiment le prévoir à l'avance. "Par exemple, quand les montres électroniques ont fait leur apparition, on voulait le tout digital." commente Jean-Claude Pelissolo, "Et puis les montres sont aujourd'hui presque toutes analogiques, avec la puce digitale ramenée à l'intérieur. C'est le client qui en a décidé ainsi."

Autre exemple de nouveau service: l'option "zapping" du service d'abonnement à des revues, où le groupe occupe la deuxième position en France. Avec cette option, pour remplacer un abonnement au Nouvel Observateur par L'Express, ou l'inverse, il suffit d'un coup de téléphone, sans changement de contrat.

Quant aux ressources informatiques, elles sont désormais concentrées au sein de Mag Info Consultant, arrivée dans le groupe avec le rachat des Nouvelles Galeries. Elle est devenue le pôle de regroupement des informaticiens du groupe comme de ses moyens matériels et logiciels. Les Galeries Lafayette n'ont plus de direction informatique. Dans les autres entreprises du groupe, il y a toujours des gens qui participent à la rédaction du cahier des charges. Et des organisateurs, notamment aux Galeries Lafayette. Mais le gros du travail de développement se concentre à Mag Info. D'autres groupes, comme le Printemps, seraient plutôt tentés par l'externalisation.

Le chiffre d'affaires de Mag Info Consultant, SSII spécialisée, a atteint 460 million de F en 1995. Il provient pour un tiers des grands magasins du groupe, un tiers de Cofinoga et un tiers de clients externes. Les activités se diversifient et la clientèle va du distributeur au détaillant, et s'élargit à d'autres secteurs, par exemple le transport avec la RATP. Les prestations couvrent l'équipement en matériels, l'édition de logiciels, l'infogérance et l'intégration de systèmes.

Les effectifs informatiques s'élèvent à 450 personnes. Une centaine de développeurs travaille pour les Galeries Lafayette, 130 pour Cofinoga et 80 pour les clients externes au groupe. Système et exploitation emploient 110 personnes, et 25 se consacrent aux nouvelles technologies.