@SURTITRE:CLIENT/SERVEUR

@TITRE:Europcar relance (provisoirement...)

ses mainframes

Les nuits blanches d'Europcar

@CHAPO:Faute de tenir à pleine charge, le système ouvert à base de machines NCR et Sequent sous Oracle 7, en FM chez Perot Systèmes, a dû, provisoirement et partiellement, rendre la main aux machines classiques IBM et Nixdorf.

@TEXTE:Robert Verasdonk, jusqu'à présent directeur informatique d'Europcar, ne répond plus au téléphone. Le grand projet qu'il a lancé il y a quatre ans ne parvient pas à prendre tout à fait son envol. Greenway, le nouveau système de gestion, innove peut-être sur trop de terrains à la fois: machines Unix multiples, donc certaines massivement parallèles, base de données relationnelle Oracle, le tout en facilities management, un contrat phare pour Perot Systems en Europe.

Signé en janvier 1991, le contrat tire Europcar d'une impasse: les coûts informatiques croissent de 20% par an, le chiffre d'affaires de 14% seulement, selon Robert Verasdonk. Il apporte aussi des atouts stratégiques: "Investissant dans ce système révolutionnaire, Europcar se place au premier rang pour le service à la clientèle, et prend plusieurs années d'avance sur la concurrence", déclarait Freddy Dellis, directeur général, en avril 1992.

@INTER:Au dessus de 2000 utilisateurs, les performances s'effondrent

@TEXTE:Au début du projet, tout marche bien. L'écriture des applicatifs, sous SQL-Forms (Oracle), se fait pratiquement en un an (mi 92-mi 93), pour un ensemble de six grosses applications transactionnelles. Les premières phases de montée en charge, jusqu'à 1000 utilisateurs (ou 2000, les informations divergent sur ce point), donnent satisfaction. Mais au jour J (1/1/94), Greenway ne peut démarrer que partiellement. Les problèmes culminent à la mi-avril. Jusqu'à 2000 utilisateurs, le temps de réponse reste linéaire. Au delà, les machines s'effondraient. Perot Systems a alors recours à des machines Sequent. Elles ne suffisent pas non plus. En juin, Europcar devait remet une partie importante de la charge sur son ancien système propriétaire, à base d'IBM et de Nixdorf, pour absorber les charges de production.

Fin août, la position officielle (mais non écrite) de la firme se résume comme suit. "En raison de problèmes de capacité dans les dernières phases d'implémentation, le système Greenway n'est pas totalement opérationnel dans tous les pays. Cependant l'ensemble de réservation n'est pas affecté et reste opérationnel dans toute l'Europe. Les anciens systèmes ne sont utilisés, de façon temporaire, qu'en France et en Allemagne. Europcar et Perot Systems travaillent en commun pour arriver à une mise en oeuvre complète dans les meilleurs délais".

@INTER:Renforcer et régler le système pour tenir la charge

@TEXTE:Une des principales actions de reprise a consisté, au printemps dernier, à mettre en place, parallèlement au système de production, un deuxième système plus puissant, dit "de développement". Le premier comportait deux noeuds Sequent 790, le deuxième quatre noeuds S60. Il était prévu de basculer de l'un sur l'autre à la fin de juillet. Il semble qu'actuellement le passage se fasse plutôt progressivement, avec trois noeuds en production.

Oracle, par ailleurs, prépare de nouvelles versions d'Oracle 7, qui devraient être prochainement livrées. Cependant, nous a indiqué Michel Rocher, directeur général, Greenway utilise toujours, depuis octobre 1993, la même versions 7.015.

Mais les temps de réponse du réseau (TCP/IP sur X25) font l'objet d'études approfondies, et l'emploi de nouvelles technologies de compression aurait donné des résultats intéressants.

@INTER:La valeur symbolique d'un projet pionnier

@TEXTE:Cette réalisation prend une valeur symbolique importante pour l'ensemble de l'industrie informatique. Greenway, dans son état actuel, apporte des arguments aux partisans comme aux adversaires des systèmes ouverts (voir article page suivante).

Quant aux partenaires, ils seront contents de voir le bout du tunnel. Chez ATT-GIS, les regrets n'empêchent pas la solidarité: "Nous nous sommes engagés sur un type de projet qui ne nous convient pas" (André Bahan, vice-président marketing, selon Datamation). Mais la filiale française perçoit plutôt l'utilité d'une réussite finale pour la crédibilité d'ensemble de la communauté client/serveur.

Pour Perot Systems: le contrat, selon ComputerWoche, dépasse les 2 milliards de dollars, matériel, logiciel et télécommunications comprises. En outre, la SSII joue sa crédibilité sur le marché européen, où le projet Greenway devait lui servir de vitrine. Et elle la joue sur le secteur le plus intéressant du FM, les systèmes ouverts. Comme les autres acteurs de ce marché, elle n'a aucun intérêt à se voir enfermer dans des "FM de transition" limités aux grands systèmes, qui ne sont porteurs d'avenir ni pour le chiffre d'affaires ni pour la motivation des hommes.

Chez Europcar, Robert Verasdonk se voit remplacé par deux responsables: John West pour la gestion interne, Malcom Stirling pour les relations avec l'extérieur. Selon un des intervenants, le passage complet au nouveau système pourrait intervenir en octobre. L'heure n'est pas aux communiqués!@SIGNATURE:PIERRE BERGER

@LEGENDE PHOTO:L'informatique est stratégique en location de voitures, car elle permet à la fois l'optimisation des coûts et le perfectionnement des services aux clients.

@ENCADRE TITRE:LE PARC ACTUEL

@ENCADRE TEXTE:Europcar dispose actuellement de 43 serveurs ATT-GIS, répartis comme suit: deux machines 3600 (comptant l'une pour 3, l'autre pour 2), trois 3550, deux 3455, vingt huit 3450 et cinq 3410. Elles sont reliées par des réseaux TCP/IP et X 25. S'y ajoutent six machines Sequent (Symmetry 2000 et 5000), dont actuellement trois en production et les autres en développement (répartition susceptible d'évoluer rapidement). Reste en place, pour l'instant, un système IBM sous MVS et des machines Siemens-Nixdorf.

///////////////////sous-papier

@TITRE:Les leçons du projet Greenway

Les partisans des bons vieux systèmes propriétaires se frottent peut-être les mains et voient dans les difficultés d'Europcar (article page précédente) un excellent argument à opposer aux partisans des "systèmes ouverts". Mais les échecs spectaculaires rencontrés ces derniers mois avec les machines classiques(le système boursier anglais Taurus, en particulier), ou du moins les grandes difficultés de grands projets comme Socrate à la SNCF ne peuvent que les inciter à une certaine modestie. On ne saura pas avant fin octobre si Europcar et Perot ont gagné leur pari. En tous cas, client/serveur ou pas, les grands projets informatiques restent des aventures. Poussées tant par la technologie que par une compétition féroce (particulièrement dans les secteurs de services comme la location automobile), les entreprises ne peuvent survivre qu'en prenant des risques. Après tout, faut-il s'en plaindre? Ce n'est sûrement pas pour déplaire au fougueux Ross Perot, qui n'hésita pas à envoyer un commando en Iran pour libérer son personel au moment de la prise d'otages à l'ambassade américaine.

o Contre

- Les difficultés du projet Greenway d'Europcar, qui aura au moins dix mois de retard, met en cause la mâturité des "systèmes ouverts", dès que l'on dépasse une certaine échelle (plusieurs milliers d'utilisateurs). De manière trompeuse, les succès des premiers sites donnent à tort, pendant un certain temps, l'impression que le succès est à portée demain. On déchante, hélas, quelques semaines plus tard.

- Les grands concurrents se contentent des systèmes classiques à base de machines IBM et ne semblent pas rencontrer de difficultés particulières. Hertz (LMI du 22/3/93) a rapatrié sur Oklahoma City la quasi-totalité des machines intermédiaires qu'elle avait installée dans ses principales filiales. Avis avait de même trois ans plus tôt. Les développements nouveaux s'appuient plutôt sur des serveurs spécialisés appuyés sur le système principal. Avis, par exemple, a mis en place un serveur Sun sous Unix, branché sur ses bases MVS/DB2. Les utilisateurs y accèdent à partir de postes Macintosh.

- On ne dispose pas encore de méthodes sûres pour dimensionner correctement de tels systèmes, et les meilleurs bancs d'essais (TPC-C, par exemple) ne sont pas encore convaincants. De tels projets restent des paris.

o Pour

- Les grands applicatifs transactionnels sous Unix/Oracle se prêtent à un développement rapide. Si le projet parvient à ses fins en octobre, il aura fallu moins de quatre ans, à partir du contrat d'origine, pour le terminer. Un délai raisonnable pour un ensemble de cette taille (3000 terminaux, 9 pays, liaisons avec l'extérieur) comportant des applications complexes et faisant appel à des matériels et logiciels innovants.

- Les systèmes sous Unix, font preuve de leur ouverture, c'est le moins qu'on puisse dire: une architecture basée au départ sur des machines d'un constructeur (ATT-GIS) peut accueillir très rapidement, et au plus haut niveau de puissance, des matériels d'une autre source (Sequent). @SIGNATURE:P.B.