Professeur à l'université d'Aix-Marseille III
Cet exposé reprend les thèses d'un article publié dans "Culture technique" no 21
Le problème de l'épistémologie est de savoir comment discerner si une science n'est pas en réalité une pseudo-science, comme la phrénologie. Il faut donc savoir ce qu'est l'informatique.
Or il n'y a pas de définition satisfaisante de l'informatique :
- celle de l'Académie en fait une sorte de science des sciences, car
quelle science n'est pas un traitement rationnel de l'information,
- celle d'Arsac implique une séparation entre sens et forme, ce qui ne
tient pas,
- le mariage de la logique formelle et du fer à souder n'est qu'une plaisanterie
qui sous-tend trop de programmes d'enseignement,
-le critère de Popper ne fonctionne pas non plus : qu'est-ce qu'un énoncé
informatique testable ou falsifiable ?
JLLM se rallie à la définition de Simon : computation science, ou science des machines "computantes", mais le problème de l'informatique, c'est que son objet ne préexiste pas à son étude, l'objet se construit dans la science elle-même. Et on néglige trop d'enseigner l'histoire des sciences, afin de faire réfléchir les étudiants à ce qu'ils font ou feront.
JLLM dénonce la prégnance du modèle d'A. Comte et de son organisation des sciences alors que les nouvelles sciences sont d'un autre type, la première de ces nouvelles sciences étant la cybernétique. Elles construisent leur objet (cf. les sciences de l'artificiel de Simon). En fait, elles se fondent sur un projet de connaissance, et l'épistémologie s'élabore à l'intérieur de chaque science, comme l'a bien vu Piaget (référence au constructivisme de Piaget).
Les sciences positivistes se fondent sur la séparation sujet-objet, indispensable à l'objectivité. En réalité, notre mode de connaissance se fonde sur l'interaction sujet-objet car un comportement n'est intelligible qu'à travers sont projet. Ce qui est important aujourd'hui, c'est que toutes les sciences sont en train de s'interroger sur elles-mêmes, sur les conditions de leur production. C'est la vitalité de nos questions qui fera l'épistémologie ? Ne pas se satisfaire trop vite de quelques mots-clés.
A la position défendue par Ali Kilic ici-même, en novembre, à savoir que l'informatique est en réalité un ensemble de plusieurs sciences, JLLM répond que c'est une façon d'éviter de poser le problème. Si l'informatique se compose de plusieurs sciences, si elle forme malgré tout une unité, la recherche de cette unité propulse une dynamique de la réflexion. Et que peut-on enseigner si l'informatique n'est pas une science.
Compte-rendu rédigé par C. Hoffsaes