Automate et termes proches
From Nouveau Larousse
illustré, vers 1900, publié sous la direction de Claude Augé.
Tome Premier.
du grec automatos, spontané, qui se meut de soi-même ; de autos, soi-même, matos, effort et maommai, je me meus.
n.m. Instrument construit de façon à obéir mathématiquement à une cause de mouvement qu'un agent extérieur lui a communiqué : une balance, un tourne-broche, une horloge, sont des automates.
- Particulièrement, machine qui, mue par un appareil caché, imite les mouvements des corps animés. Les automates de Vaucanson firent l'admiration de nos pères.
- Au figuré : être sans volonté, sans initiative, inconscient ou inintelligent ; qui obéit comme une machine à la volonté d'autrui ou à des impulsions étrangères. Le sot est automate, il est machine, il est ressort (La Bruyère).
- Manufactures : automates à tisser, navettes que l'on emploie dans les filatures de coton.
- Mécanique : automate planétaire, automate imaginé par Huyghens. Les roues ont des dimensions déterminées par les éléments du système solaire, et leurs rapports sont exprimés par de très grands nombres que Huyghens chercha à simplifier, afin de ne pas multiplier outre mesure le nombre des dents de ces roues.
- Adjectif : Dans les même sens, jouet automate, courtisan automate, vie automate
- Synonymes : automate, androïde, machine. Tout ouvrage de mécanique est une machine. L'automate est ce qui, sans être conscient, se meut par soi-même ou a le pouvoir d'un mouvement spontané. Ce terme convient surtout aux machines imitant les êtres animés. L'androïde est un automate à forme humaine.
- Encyclopédie. Usuellement, le mot automate sert à désigner une clase de machines mues par une puissance et un mécanisme cachés et imitant la forme et les mouvements d'êtres animés. L'androïde est un automate imitant la figure de l'homme et quelques unes de ses actions.
Automata by Vaucanson
On emploie dans la construction des automates toutes les ressources combinées de la mécanique et de la physique : ressorts, leviers, plans inclinés, cliquets, règles et roues dentées, étoiles, poulies, raréfaction ou compression d'air, cordons ou chaînettes, soupapes, aimants, chutes de corps (poids, sable fin), déplacement du centre de gravité, etc.
Les Grecs, et plus tard les Romains, connurent certains jouets mécaniques, notamment de petits androïdes analogues à nos poupées. D'après Favorinus, cité par Aulu-Gelle, Archytas de Tarente aurait fait, 400 avant JC, un pigeon de bois qui pouvait voler.
Albert le Grand, mathématicien du XIIIe siècle, aurait réalisé, après un labeur de trente ans, un concierge androïde, ouvrant aux visiteurs quand ils frappaient, puis leur adressant quelques mots.
Le père Kircher, Porta, Gassendi, attribuent à Regiomontanus (Jean Müller), une mouche de fer capable de tourner dans sa chambre et de revenir dans sa main, ainsi qu'un aigle métallique, qui aurait volé au devant de l'empereur Maximilien, lorsque ce prince entra dans Nuremberg (14 juin 1470). L'existence de ces chefs d'oeuvre n'a jamais été bien établie.
Les premiers automates authentiques ne paraissent pas antérieurs au XVIIe siècle. Descartes en construisit un, auquel il donna la figure d'une jeune fille et qu'il appelait en plaisantant sa fille Francine. Dans un voyage sur mer, on eut la curiosité d'ouvrir la casse dans laquelle Francine était enfermée. Surpris par les mouvements de cette machine qui se remuait comme un être animé, le capitaine la jeta à la mer, craignant que ce fut quelque instrument de magie.
Le XVIIIe siècle est véritablement l'âge des automates. Dans les essais de sa jeunesse, l'illustre mécanicien Vaucanson enfanta de "sublimes jouets". Le joueur de flûte traversière, représentant un faune, sur le modèle de la belle statue de Coysevox, et qui exécutait douze airs différents en lançant dans la flûte un courant d'air réellement modifié par les mouvements de la langue, des lèvres et des doigts ; le joueur de tambourin ; une vielleuse existant encore à Paris, au Conservatoire des arts et métiers ; un Aspic, qui servit dans la représentation de la Cléopâtre de Marmontel ; enfin, un canard artificiel, qui battait des ailes, nageait, barbotait, avalait du grain, digérait et évacuait par les voies ordinaires. La vie apparente de ce canard était due à l'action de leviers et d'engrenages mus par un ressort. Le phénomène de la digestion demeura longtemps mystérieux. Robert Houdin, qui fut chargé, vers 1844, de réparer cet automate, raconte dans ses Confidences que l'eau et la graine aspirées tombaient dans une boite placée sous le canard ; quant au prétendu produit de la digestion, qu'on recevait soigneusement sur un plateau d'argent, c'était une bouillie de pain colorée, chassée en dehors par une pompe.
<The duck, by Vaucanson
Parmi les autres automate célèbres, il faut citer :
- les têtes parlantes de l'abbé Mical,
- l'androïde écrivain que Frédéric de Knauss exposa à Vienne en 1760,
- les automates montrés en France et en Suisse en 1783 par les frères Droz, de la Chaux-de-Fonds,
- le Panharmonicon (instrument composé, destiné à imiter un certain nombre d'autres instruments, de façon à pouvoir tenir lieu d'un orchestre) construit en 1808 par Léonard de Maelzel, de Ratisbonne,
- les horloges de Lyon, de Cambrai, celle de Strasbourg, due à Schwilgué (1842),
- l'escamoteur, le danseur de corde, l'oiseau chantant, l'écrivain dessinateur, l'oranger mystérieux, le pâtissier, etc. de Robert Houdin.
Le joueur d'échecs, qui piqua si fort la curiosité de l'Europe, n'était qu'un pseudo-automate. Il fut imaginé, en 1778, par un baron hongrois, Wolfgang de Kempelen, pour faire sortir du territoire russe un proscrit polonais (Woronsky), très habile au jeu des échecs. L'automate joua avec succès contre l'impératrice Catherine II et, plus tard, contre Napoléon Ier, à Schoenbrunn (1809). C'était un androïde asis sur un siège faisant corps avec un coffre monté sur des roulettes. le bruit des rouages permettait au "vrai joueur" de se cacher à volonté dans l'androïde ou dans le meuble.
L'industrie des automates semble surtout restreinte de nos jours à la confection de jouets, de curiosités ou d'objets d'attraction ou de réclame : personnages riant, sifflant, dansant, oiseaux chanteurs et animés en cage ou sur perchoir ; tableaux, boites, sujets et meubles à musique fonctionnant après introduction de pièces de monnaie, etc. On construit cependant des chefs d'oeuvre automatiques pour des plus nobles destinations : la plupart des appareils télégraphiques, les chronomètres, etc., sont de merveilleux automates.
Automate : Myth. gr. Une des Danaïdes. Suivant Pausanias, elle ne prit point part au crime de ses soeurs. Apollodore prétend, au contraire, qu'elle tua son mari.
Automatia : (c'est à dire qui se meut de soi même), mythologie grecque, déesse du hasard. Après avoir affranchi la Sicile, Timoléon éleva, sous ce nom, un temple à la Fortune.
Automatie. Etat d'un un automate. Philosophie : Faculté de se mouvoir et d'agir spontanément.
Automatique : adj. Qui opère par des moyens mécaniques, sous l'influence d'agents inanimés, comme l'eau, le vent, la vapeur, etc. La filature automatique du coton est d'origine anglaise. (L Reybaud). Qui appartient, qui se rapporte aux aux automates. Vaucanson créa de superbes pièces automatiques.
Par extension, se dit aussi des mouvements qui ont lieu sans participation de la volonté, qui sont produits par un instinct machinal. La circulation du sang est un mouvement automatique.
Philosophie : qui appartient à l'automatie, à la spontanéité.
Antonyme : délibéré, intentionnel, médité, prémédité, réfléchi, volontaire.
Automatiquement. adv. D'une manière automatique.
Automatisation. n.f. Action de rendre automatique.
Automatiser : rendre automate; l'habitude finit par automatiser certains ouvriers.
Automatisme.. n.m. Caractère purement machinal des mouvements auxquels la volonté ne participe pas.
Par extension, manque d'intelligence ou de volonté. C'est à l'initiative de la femme que l'humanité doit d'être sortie de l'automatisme (Colins).
(NDLR. suit un long paragraphe sur la physiologie que nous ne reproduisons pas ici)
L'instinct des animaux trouve une base physiologique définie dans la théorie automatique, aidée de la notion d'hérédité, qui explique la transmission aux descendants des perfectionnements acquis dans l'accomplissement des actes coordonnés. L'éducation vient enfin, par la répétition des mêmes actes, assouplir la coordination des mouvements dans telle ou telle direction utile ; et nous assistons aux merveilleurx résultats du dressage.
Il est évident que plus on s'élève vers l'homme, plus la direction intentionelle du cerveau devient prédominante, plus l'automatisme diminue ou semble diminuer. Le cerveau peut modifier même les mouvements de la respiration, les arrêter, les soumettre à un rythme musical ; on a vu des individus pouvant suspendre quelques instants les battements de leur coeur. L'homme doit apprendre beaucoup de mouvements ; c'est à l'éducation qu'il doit la coordination des mouvements de la marche, de la phonation articulée ou de la parole. Mais l'habitude peut créer en lui un automatisme secondaire qui ressemble, dans ses effets, à l'automatisme primitif des animaux.
Comme Laycock l'a montré le premier, le cerveau a une action réflexe propre, analogue à celle des centres inférieures, mais dont la nature est déterminée par les modifications qui apportent à son mécanisme primitif les habitudes héréditaires et acquises. Une impression matérielle fait surgir une idée, qui s'enchaîne avec une autre. L'association d'idées se produit automatiquement ; elle n'est, pour le physiologiste, qu'une classe d'actes cérébraux réflexes. Les récents progrès de l'étude de l'hypnotisme et de la suggestion montrent que les fonctions du cerveau sont encore plus dissociables que l'anatomie ne peut le faire prévoir ; on arrive à réduire le sujet à l'automatisme le plus complet. V. hypnotisme, suggestion.
Automatiste, ou Automaturge : constructeur d'automates. Vaucanson fut un célèbre automatiste.