Prisons. Do less harm in the Hyperworld
La prison. Faire moins mal dans l'hypermonde.
Les prisons matérielles furent un progrès de l'humanité quand elles remplacèrent, à partir du XVIIeme siècle environ, les peines corporelles ou les mutilations, déshumanisantes pour le puni comme pour le bourreau et le spectateur (voir l'ouvrage d'Arlette Lebigre). Mais, dès les années 80, elles avaient atteint... leurs limites. Comment les dépasser? Sans apporter de solution miracle, l'hypermonde réduit l'absurdité ou le scandale de certaines situations.
La prison remplit trois fonctions:
- sécurité de la société en mettant hors d'état de nuire des individus dangereux;
- dissuasion par crainte de la sanction;
- re-socialisation du coupable: recyclage, rééducation, réinsertion.
Contention: empêcher le mal
Dans l'hypermonde, la communication entre humains, amicale ou agressive, n'est pas nécessairement liée à leur mouvements physiques. La criminalité, réelle ou potentielle, s'exerce dans un espace de symboles. L'enfermement physique d'un individu est donc peu pertinent. Mais soyons plus concrets.
Se déplacer physiquement est peu utile pour commettre des crimes. Les biens et activités importants sont désormais de caractère symbolique, scripturaire, on n'y accède pas spécialement aisément en entrant dans l'univers physique des propriétaires de donnés.
La protection physique, n'a plus de sens que pour la violence physique, qui ne représente qu'une part relativement faible de la criminalité: viol sexuel ou violence sadique, ou extortion "à main armée" de biens informationnels ou culturels.
L'importance de l'information circulant autour des individus fait qu'en pratique on peut toujours savoir où ils sont. Il est donc (presque) toujours temps d'intervenir quand on pressent qu'un individu fait des déplacements physiques dangereux.
En revanche, se met en place un système progressif de contention des individus dangereux au sein de l'hypermonde. Ce système s'inscrit dans l'architecture des réseaux de communication, avec leurs droits d'accès, etc.
Ce système consiste à réduire les droits d'accès des détenus aux différentes zones de l'hypermonde et à créer pour eux des espaces particuliers dans l'hypermonde, comportant une surveillance particulière, avec réduction appropriée des droits habituels à la vie privée; un hypertrou pour l'oeil du maton, en quelque sorte... Si nécessaire, l'individu porte un bracelet, ou, à la limite, un implant qui permet de le repérer plus facilement et plus sûrement.
La surveillance atteint un degré bien supérieur à celui des prisons matérielles, puisqu'une des caractéristiques de l'hypermonde est la possibilité d'enregistrement et de duplication de toutes les opérations demandées par un individu. On peut alors pratiquer:
- une analyse a posteriori en partie automatisée des activités des détenus par un personnel approprié, avec repérage le cas échéant de tendances plus ou moins positives ou négatives,
- une analyse permanente des activités potentiellement dangereuses.
La contention physique ne subsiste que comme cas limite, pour les criminels violents comme pour les malades mentaux.
Dissuasion: la peur du gendarme
La prison fait peur, et non sans raison, surtout quand elle est surchargée et quand le personnel est insuffisant et mal formé.
Mais elle ne faisait pas assez peur, au Xxeme siècle, puisque la criminalité ne baissait guère!
D'autre part, elle était inéquitablement appliquée, la peine étant parfois disproportionnée à la faute, notamment dans le cas de la prison préventive.
De toutes façons, le caractère inhumain de certains situations carcérales, pour les geôliers comme pour les détenus, ne pouvait être justifié par la dissuasion, à partir du moment où l'on disposait d'autres procédés.
Outre les sanctions "positives" (travail au service de la communauté) déjà parfois pratiquées, les sanctions infligées dans l'hypermonde ne sont pas moins dissuasives, créant d'ailleurs dans les cas extrêmes une "hyperprison" qui pourrait être extrêmement pénible.
Les formes sont multiples. Les plus ordinaires vont de soi: la peine consiste en privation d'accès à une part plus ou moins grande de l'hypermonde intéressant. En termes plus concrets, on limite les revenus, les droits de créer des objets, et a fortiori l'accès par l'hypermonde aux ressources réelles sensibles.
Rassurons ceux qui craindraient un hypermonde trop douillet, trop faible face aux criminels: il n'est que trop facile, dans un hypermonde fortement implanté, d'envisager des contraintes voire des peines qui rendraient la vie des condamnés pire encore que celle des détenus d'hier. Il faut trouver le dosage le plus humain de la dureté de la peine entre l'effet préventif de dissuasion et le caractère choquant de toute peine volontairement infligée par un humain à un autre humain.
Le point clé: recyclage, réinsertion
Sur ce point, on peut difficilement faire pire que la prison traditionnelle. Et l'hypermonde a beaucoup apporté. Il peut en effet:
- créer des espaces et des parcours pédagogiques spécialement adaptés,
- réguler la rentrée progressive dans les zones normales de l'hypermonde.