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Bureautique

Texte écrit vers 1980 je crois.

La bureautique, c'est l'électronique au service du bureau. A ses débuts, elle se basait sur des matériels spécifiques. Elle se présente aujourd'hui comme un ensemble de logiciels, qui se perfectionnent et s'intègrent progressivement. Historiquement, c'est le traitement de texte qui fut longtemps le "fer de lance". Il reste une de ses principales composantes. Un examen de ses grandes fonctions sera donc la meilleure introduction.

1. LE TRAITEMENT DE TEXTE

C'est toujours avec un peu d'émerveillement que l'on découvre les facilités du traitement de texte, par exemple avec Framework sur PC compatible. Ceux qui ont déjà une pratique de la machine à écrire perçoivent d'abord la facilité de correction, de reprise du texte jusqu'à la perfection, de ses modifications ultérieures. L'ordinateur apporte un droit à l'erreur qui n'existait pas, ou se payait de pénibles gommages avec les outils classiques. Par contre, si c'est le premier contact avec un clavier, il faut un certain temps pour s'y faire... mais c'est aussi le plaisir d'accéder, dans des conditions de relative facilité, à la dactylographie, à un texte qui sera d'emblée propre, sans faute, bien présenté.

1.1. Fonctions de base

Ces fonctions de correction et modification sont d'ailleurs diverses, presque trop riches. Rien que pour l'effacement, les possibilités sont nombreuses. La touche Del efface le caractère couvert par le curseur (ce petit carré qui indique à quel endroit de l'écran on travaille), et le texte qui suit se rapproche pour combler le trou. Par contre, la touche "flèche à gauche" efface le caractère à gauche du curseur. Les deux conviennent, mais selon les cas il est plus facile d'utiliser l'une ou l'autre.

On peut aussi effacer tout un ensemble de caractères, grâce à la touche F6 pour déterminer le texte à effacer (il se met en inversé sur l'écran), puis à la même touche Del.

Mais ce bloc délimité grâce à la touche F6, nous pouvons aussi le déplacer à un autre endroit du texte (touche F7) ou le recopier (touche F8). Ces déplacements ou copies peuvent même se faire entre plusieurs textes, s'ils sont simultanément accessibles.

L'effet le plus impressionnant, au début, est le changement de "justification", c'est à dire de longueur des lignes. Mais les fonctions de mise en page sont elles aussi variées : action sur les marges droite et gauche, décalages et tabulations, centrage. Il est facile aussi de "justifier" (sous entendu "à droite"), c'est à dire d'avoir toutes les lignes de même longueur. Mais le résultat n'est vraiment esthétique que sous certaines conditions.

On peut aussi introduire des variantes typographiques : gras, italique, souligné. La qualité des effets obtenus dépendra de l'imprimante utilisée.

Il ne faut d'ailleurs pas en abuser, mais c'est tout de même une précieuse ressource pour rendre un texte plus lisible. Sur les machines à écrire traditionnelles, seul était possible le souligné.

Sur certaines machines, le travail est facilité par la "souris" que l'on déplace à côté du clavier pour commander le curseur et choisir les fonctions.

Framework, du moins dans sa première version, est en revanche assez pauvre pour le découpage du texte en pages et toutes les fonctions connexes : numérotation, entêtes et bas de pages, etc. Sans importance pour taper une lettre, ces fonctions sont bien utiles, sinon indispensables, pour la présentation correcte de rapports et autres ouvrages de quelque longueur.

Tout cela n'est pas aussi facile qu'on pourrait le penser. Au début, l'entrée dans le logiciel et dans sa logique de "cadres" (d'où son nom, frame voulant dire cadre en anglais) ne vient pas tout de suite sous les doigts. Il faut aussi, pour utiliser les fonctions, faire apparaître les menus en haut d'écran. On le fait sans y penser après quelques heures, mais au départ, la présence d'un utilisateur plus avancé est presque indispensable, sur ce logiciel comme sur bien d'autres, si l'on ne veut pas perdre beaucoup de temps à trouver des cheminements qui ne sont pas illogiques, mais que la logique ne suffit pas à faire découvrir.

1.2. Mémorisation

Le texte une fois construit, on le transfère pour utilisation : sur disquette (ou sur disque dur si le micro-ordinateur en dispose), sur imprimante, parfois sur réseau.

L'impression est à elle seule un vaste domaine. A ce stade, traitons la seulement comme un autre moyen de sauvegarder son travail, ou de le rendre plus lisible pour mise au point et correction. En effet, il est fatigant de corriger à l'écran un texte de quelque longueur, et l'on a donc plus de chances de laisser échapper coquilles et fautes d'orthographe. En outre, les écrans courants n'affichent que 24 lignes, ce qui peut gêner une appréciation globale du travail.

Sur disquette, il s'agit d'un stockage pour utilisations ultérieures. Il est d'ailleurs sage, étant donné qu'une panne de courant est toujours possible, ou simplement un pied qui se prend dans les fils, de sauvegarder le texte à intervalle réguliers (par exemple toutes les fois qu'on lève les mains du clavier pour réfléchir à la suite). Cela ne prend guère de temps : on appuie simultanément sur les touches Ctrl et Return, il suffit ensuite d'une ou deux secondes.

La disquette a l'avantage de pouvoir se transporter facilement. Si l'on a la chance de disposer d'un PC aussi bien chez soi qu'à son bureau, rien n'empêche de taper au petit matin ses idées géniales, et de finir leur mise en forme dans la matinée sur le lieu de travail. Le disque dur, de son côté, a l'avantage de la capacité (au moins dix millions de caractères, contre quelques centaines de mille pour les disquettes traditionnelles).

On ne stocke pas seulement du texte à proprement parler, mais aussi des formats de lettres tout préparés, qu'il suffira de compléter, sans avoir à recopier les formules d'entête et de politesse. Et, en poussant un peu plus loin, le traitement de texte permet de réaliser des publipostages en stockant d'une part la lettre, de l'autre le fichier d'adresses. Mais attention : même une imprimante rapide met un certain temps à frapper une lettre, a fortiori un millier de lettres.

En matière commerciale, et surtout juridique, les textes de contrats, polices, statuts de sociétés... se construisent à partir de formules, paragraphes, clauses largement standardisées. On a beaucoup travaillé, à la fin des années 70, sur la constitution de "bibles de textes", notamment pour les notaires, les conseils juridiques. A l'expérience, la méthode trouve assez vite ses limites car les cas particuliers sont plus nombreux, la combinatoire plus riche, la complexité plus profonde qu'on ne pensait. De plus, la "personnalisation" est difficile : en français, on ne passe pas si facilement du masculin au féminin, du singulier au pluriel.

1.3. Impression, enrichissement typographique, PAO

Une des conséquences de la diffusion du traitement de texte, c'est le niveau de qualité des documents produits. Quand on retrouve des dossiers commerciaux datant des années 50, on est frappé par la laideur, l'irrégularité de la frappe, l'imperfection des mises en pages, etc. Maintenant, non seulement le texte peut être corrigé, plusieurs fois si nécessaire, mais on peut en diversifier la présentation, même sur des imprimantes rudimentaires.

Les imprimantes à aiguilles sont devenues la règle pour toutes les applications de base, car leur gamme est étendue, depuis les modèles économiques jusqu'à la "qualité courrier", avec alimentations feuille à feuille, etc.

Avec une imprimante à laser, dont la finesse (en nombre de points par millimètre) est trois fois plus grande que celle d'une imprimante à aiguilles ordinaire, le tracé des lettres peut être plus diversifié, plus élaboré. Gras, italiques, justification prennent tout leur sens, d'autant que les alphabets (polices de caractères) peuvent être "à espacement proportionnel", alors qu'en dactylographie classique un i est aussi large qu'un m.

A ce niveau, l'insertion des graphismes voire des photographies dans le texte doit être de plus en plus soigné. Certains logiciels vont jusqu'à permettre l' "habillage" c'est à dire l'ajustement du texte ligne par ligne pour suivre les contours d'un dessin. On parvient alors à une qualité qui se rapproche des arts graphiques. Il existe aussi des logiciels spécialisés dans le traitement du texte scientifique et de leur partie la plus délicate, les formules mathématiques.

Ces technique sont de plus en plus utilisées pour les rapports, la documentation, et l'édition commerciale pour les petits tirages. C'est ce qu'on appelle la PAO (publication assistée par ordinateur), ou encore l'édition de bureau, voire l'éditique.

La véritable qualité typographique ne peut cependant être obtenue qu'en franchissant un double pas. D'une part la finesse de dessin des caractères, obtenue sur les photocomposeuses, dont la résolution est trois ou quatre fois celle des imprimantes à laser actuelles. D'autre part la qualité de l'impression elle-même, car l'encre typographique est beaucoup plus fine et dense que les résines de l'impression laser.

Quant à la couleur, elle progresse à tous les niveaux, y compris les imprimantes à aiguilles économiques. Mais ses coûts, et les efforts de conception qu'elle exigent dès le départ, ne lui permettent pas une diffusion rapide.

1.4. Transmission

Enfin, si le micro-ordinateur est branché sur un réseau, le texte peut être transmis à distance. Ce sera par exemple le cas d'un journaliste envoyé couvrir une manifestation. Il emporte son micro-ordinateur portable, écrit l'article dans sa chambre d'hôtel ; l'article fini, un coupleur acoustique relie la machine au téléphone et l'article est envoyé tel quel au journal. C'est autrement pratique et fiable que de téléphoner à une sténographe. Dans d'autres cas, la connexion est locale, et il n'y a même pas besoin de se préoccuper de la transmission : le fichier commun, dont l'emplacement géographique n'a pas d'importance, se présente pour l'utilisateur, à l'écran de Framework, comme une disquette supplémentaire.

On peut aussi transmettre le texte à d'autres destinataires. Mais il y a pour l'instant une difficulté majeure, le manque de normalisation. Le problème des couches multiples : codage des caractères proprement dits, des signes diacritiques, des indications de photocomposition et de mise en page. En pratique, actuellement, ce type de transmission est toujours assez difficile à mettre au point, et l'effort nécessaire ne se justifie que pour des volumes suffisants. C'est le cas par exemple des annuaires ou des périodiques.

1.5. L'avenir du texte

Le texte a-t-il un avenir ? La poussée de l'image est impressionnante. Et l'on n'écrit plus à sa marraine pour le nouvel an, on lui téléphone. Quant à l'orthographe... Dans le "bureau sans papier", les petits croquis ne remplaceront-ils pas les longs rapports ?

Il est permis de penser que le texte gardera une place majeure, car la richesse de ses structures et son aptitude à l'abstraction semblent irremplaçables. L'ordinateur ouvre au texte de nouveaux horizons : facilité de création et de modification, de stockage, de transmission. Dès l'école maternelle, des expériences ont montré la richesse de ses possibilités.

Pour les enfants nés après 1975 environ, il est probable que le clavier deviendra un mode d'expression plus naturel et plus aisé que l'écriture manuscrite où ils sont souvent bien maladroits. Et c'est encore l'ordinateur qui se chargera des subtilités, souvent bien arbitraires, de l''orthographe, libérant la jeunesse des heures passées à retenir par coeur que chou, joujou, hibou... prennent un x au pluriel et non un s. Heureusement, car elle aura besoin de tous ses neurones pour maîtriser un monde de plus en plus complexe.

Dans le monde du bureau, certaines formes traditionnelles de texte disparaîtront : la lettre commerciale ou administrative formelle, avec son "J'ai l'honneur" et ses "Nous vous prions d'agréer" devraient laisser place à des messages électroniques plus brefs, souvent plus familiers, mais très élaborés quand le jeu en vaudra la chandelle. Un nouvel art d'écrire a déjà commencé à naître sur les messageries télématiques. On se plaint des messageries roses ! Mais, sans roses, Ronsard aurait-il écrit "Mignonne, allons voir..." ?

2. LE TABLEUR

Le tableur est au comptable ce que le traitement de texte est à la secrétaire. A la base une idée simple : utiliser l'ordinateur pour présenter un tableau de chiffres, aussi bien pour les saisir à l'écran que pour les modifier et les imprimer et, cela va de soi, faire toutes les additions au fur et à mesure, puisque c'est vraiment l'enfance de l'art pour un ordinateur. Voilà une petite touche de magie, impressionnante pour tout comptable ou cadre qui a passé un certain nombre d'heures à faire des additions et à les vérifier pour arriver à faire coïncider un total général à partir des totaux de lignes et de colonnes, bref à faire une "balance carrée".

A partir de là, les fonctions se sont étoffées jusqu'à pouvoir considérer le tableur comme un outil de programmation. Fait au départ pour les micro-ordinateurs, qui lui doivent une bonne part de leur succès dans les applications professionnelles, le tableur est disponible sur certains grands systèmes, et certains langages de quatrième génération peuvent être considérés comme des super-tableurs. Regardons ici ses fonctions de base à l'aide d'un classique : Multiplan.

2.1. La touche de magie pour comptables

Dès son chargement, le tableur présente à l'écran sa structure en lignes et colonnes. On passe d'une "cellule" à l' autre avec le curseur ou automatiquement, par exemple après avoir saisie une donnée élémentaire. En bas de l'écran, la cellule occupée est indiquée en permanence. Par exemple "L1C8" pour ligne 1, colonne 8. C'est plus utile qu'on ne pense, dès qu'on s'éloigne du point de départ L1C1.

Car, dans les applications pratiques, l'écran n'affiche qu'une petite partie du tableau, et c'est donc le seul moyen de se repérer.

Mais aussi, et c'est le deuxième point fort du tableur, le petit jeu de bataille navale conduit à programmer sans en avoir l'air. Dans la cellule L2C3, par exemple, on peut écrire LC(-1)*1,01 ce qui veut dire : la valeur de cette cellule L2C3 est la valeur de la cellule de gauche majorée de 10%. Comme il y a aussi une fonction "recopie" pour reporter cette expression sur toute une ligne, il est facile de faire par exemple des simulations de gestion où la ligne 2 représentera le chiffre d'affaires supposé croître de 10% tous le ans. C'est tout de même autre chose que Basic !

Dans les cellules, on peut aussi mettre du texte, à commencer par les libellés de lignes et de colonnes, en haut et à gauche du tableau, ou ailleurs. Dans chaque cellule, on peut aussi choisir si les chiffres doivent être centrés, alignés, préciser le nombre des décimales. Ainsi, une fois le calcul terminé, il n'y a plus à trouver une dactylo compétente pour tenter une présentation élégante du tableau : il suffit de commander l'impression. Et de recommencer jusqu'à trouver la présentation qui aura le plus de chance de convaincre le PDG.

2.2. Vers la programmation

Comme en traitement de texte, les tableaux peuvent se stocker : tableaux complets, mais aussi cadres généraux de prévision, d'analyse financière. A la limite, certains progiciels peuvent être "écrits en Multiplan".

De même, les tableaux peuvent être transmis à distance, chargés à partir des bases de données de l'entreprise. Il n'y a pas de normes, et chaque entreprise, chaque application, devra faire l'objet d'une étude spécifique pour que les données puissent être échangées. Dans les grandes sociétés, on constitue parfois un infocentre pour que les fichiers centraux puissent être interrogés, notamment à partir de tableurs.

Les tableurs continuent de progresser : présentation graphique à l'écran plus élaborée, tableaux de plusieurs dimensions (par exemple, une "feuille" par département, et une "feuille" pour l'ensemble de la société, avec des fonctions plus ou moins complexes de globalisation), fonctions de liaison avec les grands systèmes, apports de l''intelligence artificielle. Certains "langages de quatrième génération" peuvent être considérés comme des super-tableurs.

3. BASES DE DONNEES

Au niveau de la bureautique, il ne faut pas trop exiger en la matière. Ou alors il faut y englober la quasi-totalité de l'informatique. Normalement, la gestion de données se limite ici à quelques fichiers, avec leurs fonctions de création, consultation, mise à jour, sélections, tris, édition (c'est à dire ici impression). Le tri, à lui seul, est une fonction lourde dès que la taille du fichier dépasse quelques centaines d'enregistrements, et cette fonction n'est d'ailleurs pas toujours offerte.

Dès que l'on sort du cadre de petits fichiers limités dans le temps ou la portée (fichiers personnels), la création d'une base de données est une opération lourde. Les choix doivent se font pour longtemps et impliquent de nombreux utilisateurs. Le recours à des informaticiens professionnels s'impose en général et l'on sort du cadre de la bureautique au sens courant.

4. GRAPHIQUES

La bureautique n'a pas vocation à la création artistique. Ce qu'on demande principalement à ses fonctions graphiques, c'est de représenter de manière évocatrice des résultats chiffrés qui, avec les plus beaux tableurs du monde, restent souvent bien abstraits.

Les graphiques les plus classiques (histogrammes, courbes, camemberts) s'obtiennent en quelques touches à partir de chiffres saisis spécialement ou choisis dans une base de données ou un tableur.

Cependant, même en gestion, on a souvent besoin d'autres types de représentations : systèmes représentés par des boites et des flèches, organigrammes, plans de certaines pièces, figuration simplifiée de zones géographiques. La bureautique y répond avec des outils qui facilitent beaucoup le travail, surtout si l'on dispose d'une souris. Le Macintosh est particulièrement réputé pour cette application. Une partie de l'écran est réservé à la sélection de fonctions (traits plus ou moins épais, formes standard dont on ajustera les dimensions, trames et grisés divers pour identifier les différentes zones, introduction de texte...).

Les images peuvent être obtenues directement à partir de documents lus sur un scanner. Quelle que soit leur origine, on peut évidemment les stocker, mais les volumes occupés sont toujours importants (100 000 caractères pour une image par exemple), sauf quand les images se prêtent à une forte compression par différents procédés.

5. COMMUNICATION

5.1. La messagerie

Nous avons signalé les possibilités de communication à propos des autres fonctions bureautiques. Mais elle peut être aussi être une fin en soi, et la communication typiquement bureautique est la messagerie complétée par l'agenda commun, que l'on peut considérer comme une sorte de mémoire collective. A de détail près, la messagerie bureautique diffère peu de celle qui a été popularisée par la télématique. Elle bénéficie tout de même de postes de travail plus ergonomiques que le minitel conçu pour une large diffusion domestique.

Une bonne messagerie d'entreprise comporte la possibilité d'envoyer des messages simultanément à toutes les boites aux lettre appartenant à un certain groupe (par exemple toutes les personnes d'un même service, ou tous les spécialistes d'une question déterminée).

5.2. L'intégration voix-données

Il serait bien agréable, et efficace, de pouvoir passer en souplesse de la téléphonie classique à l'échange de données ou, mieux encore, de faire les deux à la fois de manière intégrée, une même liaison entre interlocuteurs comportant à la fois des échanges oraux et des transferts de données, textes et images sur l'écran. Mais, bien que l'idée soit ancienne, que la technique ne semble pas s'y opposer sérieusement, que l'utilité soit manifeste, les systèmes qui la mettent en pratique restent exceptionnels. Il y a des produits sur le marché, mais on n'en voit pas dans les entreprises.

Par contre on voit fonctionner certains systèmes de "messagerie vocale" (un perfectionnement du répondeur, en quelque sorte), et les autocommutateurs d'entreprise offrent des fonctions assez riches, que les utilisateurs utilisent parfois, surtout la téléphonie à plusieurs.

5.3 Le réseau local

Ce point semblait lui aussi constitutif de la bureautique à ses origines. Il s'agissait de brancher les postes de travail sur une ligne à haut débit, multifonctions (voix, données, image, etc.). Un certain nombre de produits ont été conçus dans ce sens. Mais, actuellement, le choix du type de réseau est plutôt revenu dans le champ de l'informatique générale, la bureautique se centrant sur le logiciel du poste de travail lui-même.

Il en va de même du concept de "serveur" : serveur d'impresssion, serveur de base de données, qui se sont fondus dans l'informatique générale. On s'oriente vers des architectures à trois niveaux : grands systèmes, machines départementales, stations de travail. C'est au niveau départemental que se situent les serveurs.

La bureautique a été, en quelque sorte, victime de son succès : en prêchant la communication, elle a fait percevoir l'importance de la compatibilité... donc l'inconvénient de concevoir des systèmes bureautiques spécifiques ! Elle devient aujourd'hui un ensemble de logiciels qui peuvent être exploités sur tout niveau de machine, du micro-ordinateur aux plus grands systèmes.

Elle n'a par contre pas fini de courir après un de ses objectifs : l'intégration des fonctions.

6. INTEGRATION

Intégrer ? Vaste programme, obsession constante des informaticiens en quête d'économies d'échelle comme de cohérence des données et des traitements. La bureautique pourrait se définir comme une recherche d'intégration au niveau du poste de travail, par opposition à une informatique axée sur l'intégration du système d'information de l'entreprise considérée globalement.

Intégration suppose puissance de la machine. On a perçu très tôt que traitement de texte, tableur, base de données, communication ne pouvaient rester séparés.

Il y tout de même eu quelques débats d'organisateurs. Certains, plus tayloriens que d'autres, craignaient que le poste "multifonctionnel" ne perturbe les personnels au lieu de les aider. De toutes manières, la technologie n'a pas permis, jusqu'à 1985 environ, de faire coexister de manière efficace et économique toutes les fonctions sur un même poste. Il y avait donc des micro-ordinateurs, plutôt axés sur le calcul et le ableur, des machines de traitement de texte pour secrétaires, et des terminaux pour communiquer (quand on ne se contentait pas du bon vieux téléphone).

Même à partir de cette date, l'intégration ne s'est faite que progressivement, et souvent au prix de pertes d'efficacité, avec des temps d'attente sensibles pour les changements de fonction par exemple. C'est qu'il faut de grandes capacités de mémoire pour héberger simultanément un traitement de texte élaboré, un tableur et une bonne gestion des communications.

Intégrer, c'est aussi utiliser l'écran comme une surface de bureau, avec des zones réparties de manière plus ou moins variable entre les différentes applications et documents : on parle de multi-fenêtrage. Pour que ce soit ergonomique, il faut des graphismes suffisamment fins, donc une gestion de l'écran point par point (bit map) et non plus caractère par caractère... Si l'on veut la couleur en plus, cette seule fonction consomme une puissance de calcul non négligeable.

Enfin, l'intégration oblige à concevoir les différents logiciels (texte, tableur, etc.) de manière cohérente, pour qu'une même commande déclenche toujours le même type d'action quel que soit la fonction. C'est ce qu'on appelle l'orthogonalité du langage.

Tout cela progresse, mais prend du temps. Et les acquis sont toujours remis en cause par la volonté de fournir de nouvelles fonctions, de nouvelles applications. La bureautique exigera donc des matériels toujours plus puissants, pour se faire toujours plus facile, plus naturelle, plus conviviale, sous les doigts et les yeux de l'utilisateur.

7. FALLAIT-IL CREER LE MOT ?

Il a toujours été difficile de définir correctement la bureautique. Le 17 janvier 1982, six ans après son lancement, le Journal Officiel l'a officialisée comme : "L'ensemble des techniques et des moyens tendant à automatiser les activités de bureau et principalement le traitement et la communication de la parole, de l'écrit et de l'image". Mais cette définition n'a jamais fait l'unanimité, notamment parce qu'elle est tellement large qu'elle devrait logiquement absorber toute l'informatique de gestion !

Mais ce mot, pas très joli d'ailleurs, était-il nécessaire, et même utile ? Ses créateurs se sont posé la question. Il avait été prononcé dans un groupe interne d'IBM, lancé par Louis Naugès à la Convention Informatique de 1976, et décolla vraiment avec un numéro d'Informatique et Gestion en avril 77, renforcé en juin de la même année par un colloque de l'Inria (qui d'ailleurs choisissait l'orthographe "burotique").

Le mot répondait à plusieurs préoccupations. Il fallait traduire l'américain "office automation". Il fallait aussi faire émerger une réflexion, celle-là typiquement française, sur le "système individuel d'information". Bureaumatique ? Bureaumation ? Textique ? Certains mots évoquaient trop l'automatisation des tâches alors qu'on voulait plutot "assister" les utilisateurs. D'autres fermaient trop le concept sur le texte. On se mit d'accord sur bureautique. Pas trop esthétique, et d'une construction étymologique contestable (mais plutôt moins que "bureaucratique", qui date du Directoire).

Une fois lancé, le concept a bien répondu à ses fonctions. Il a permis de différencier un certain nombre de produits matériels (au début en tous cas), de logiciels, de compétences, de fonctions dans l'entreprise. Un certain nombre de consultants et de responsables d'entreprise ont tout intérêt à entretenir sa vitalité. Cependant, malgré différents groupes de travail et plusieurs ouvrages, la bureautique n'a jamais vraiment su se doter d'un paradigme conceptuel précis et charpenté. Elle n'a pas non plus mis en place des enseignements officiels qui sont gage de longue vie, comme l'a su faire par exemple la Recherche opérationnelle. On peut donc raisonnablement penser que le mot tombera progressivement en désuétude, comme la cybernétique, par exemple.